Les films de guerre nous captivent non seulement parce qu’il y a de l’action intense, mais aussi parce qu’ils nous confrontent à l’atrocité meurtrière des uns et au courage héroïque des autres. De plus, comme le danger est passé (films historiques) ou qu’il est inventé (œuvres de fiction), le frisson ne coûte pas cher : il est même très agréable.
Pouvoir d’achat
Pour nos amis ukrainiens, il ne s’agit plus de cinéma. En France, les attentats du 13 novembre 2015 avaient fait 130 morts et 413 blessés. Plus de six ans après, le pays en reste traumatisé. En Ukraine, le Bataclan, c’est tous les jours, et dans la plupart des grandes villes. À quoi il faut ajouter les logements détruits, les familles séparées, les maris morts ou mutilés au combat, la terreur des bombes, l’incertitude absolue du lendemain.
À l’heure où j’écris, aucunebombe n’est tombée sur notre territoire. Mais les retombées économiques suscitent déjà de la contestation. On voudrait bien que cette guerre n’ait pas de conséquences sur notre pouvoir. Sur notre pouvoir… d’achat.
Excepté les personnes très pauvres, la majorité d’entre nous avons de la marge. Mais sommes-nous prêts à la sacrifier ? Il ne suffira pas de soulager son âme en envoyant des serviettes hygiéniques, de l’argent ou des pâtes pour les réfugiés. Ce qui nous est demandé, c’est d’amputer, au moins temporairement, notre petit confort afin de faire plier l’agresseur. Les sanctions économiques contre la Russie auraient dû être plus radicales dès le début. Mais la prospère Europe tient à ménager ses masses habituées à la consommation.
Jésus disait : « Quand quelqu’un te prend ton vêtement, ne refuse pas non plus ta chemise. » On aime rappeler le souvenir de Saint Martin coupant son manteau en deux pour donner l’autre moitié à un pauvre. Mais nous, à l’heure où j’écris, il ne nous est demandé de sacrifier qu’une partie de notre superflu, uniquement afin d’éviter une guerre apocalyptique sur notre territoire tout en prêtant assistance à un modeste pays que cherche à dévorer un ogre.
Le courage par procuration
Par procuration dans les jeux vidéo, le courage est très facile. On a vu des volontaires partir faire la guerre en Ukraine sans le moindre entraînement militaire… et revenir à la maison au bout de quelques jours.
Il ne nous est pas demandé d’aller nous faire tuer. Seulement de consentir quelques restrictions afin qu’on meure un peu moins à deux ou trois mille kilomètres de chez nous.
Chaque fois que je regarde un western, je me dis que je n’ai jamais risqué ma peau pour sauver un village ou une femme. Le temps de donner un peu de sa vie est venu. Commençons par être des héros modestes là où nous sommes.