PUITS ET FONTAINES
Rue du bon-Puits, Rue du Puits Saint-Pierre... Innombrables sont dans nos pays les noms de rues qui sentent bon l’eau fraîche versée sur une margelle. Ils témoignent d’un patrimoine très ancien. Avec cruches et seaux sous les bras, les riverains d’autrefois venaient tirer une eau précieuse pour l’entretien de la vie, pour cuisiner, se laver...
Les habitants du quartier et les puisatiers avaient choisi un emplacement accessible au plus grand nombre, et validé par la baguette du sourcier qui avait détecté l’eau. Le puits était alors creusé à la force des bras à une profondeur plus ou moins importante, selon la nappe phréatique à atteindre.
À partir des années 1850, de graves épidémies de choléra ont provoqué des hécatombes dans la population. Les médecins ont pointé alors du doigt l’insalubrité des rues et des puits. En effet, les eaux que l’on y puisait étaient contaminées par les fosses d’aisance des maisons ! Elles n’apportaient plus la vie mais la mort. En attendant l’arrivée de l’eau courante dans les maisons, les pouvoirs publics ont fait raser tous les puits dans de nombreuses villes. Ils ont laissé la place à des fontaines modernes qui drainent une eau de source vive.
L’évocation de ces fontaines ne peut se faire en France sans évoquer les fameuses « Fontaines Wallace », du nom de ce philanthrope britannique et francophile convaincu. Sensible à la souffrance due au manque d’eau qui touchait les Parisiens après la période de la Commune, il avait utilisé une partie de sa fortune en offrant « 50 fontaines à boire ». Ces élégants ouvrages en fonte font aujourd’hui la joie des touristes.
Aujourd’hui, l’eau coule potable, et à volonté, de nos robinets. Ceci n’empêche pas les magasins de vendre à tour de bras des eaux minérales de toutes sortes, réputées bonnes pour l’organisme.
SOURCES GUÉRISSEUSES ET CULTES
Le culte des eaux existe depuis des temps immémoriaux. Les sources étaient aux yeux de nos ancêtres, esprits ou génies, dieux ou déesses. De ce fait, leur eau était souvent dite miraculeuse : on considérait qu’elle purifiait et guérissait. De nombreux pèlerins et malades s’y rendaient pour chercher la guérison de leurs maux comme le montrent les ex-voto gaulois et gallo-romains des sources de la Seine.
Pas étonnant donc que les noms des divinités païennes se retrouvent dans ceux des villes thermales d’aujourd’hui comme Bourbonne-les-Bains, Bourbon-Lancy, Bourbon-l’Archambault, du nom du dieu Borvo ou Bormo ; Néris-les-Bains du dieu Nerius, Vichy du dieu Vorocius, etc. Les Romains ont repris ensuite à des fins politiques ce culte des eaux. Mais, en fait, les Romains étaient très pragmatiques dans ce domaine : leur respect de l’eau était déjà basé sur ses vertus minérales et chimiques. Ainsi les sources ferrugineuses belges de Spa (de spargere : asperger, jaillir) étaient reconnues par les Romains pour leurs qualités curatives. De même les eaux de Baden en Allemagne et celles de Bath en Angleterre.
DES CULTES PAÏENS REBAPTISÉS ?
Les premiers évangélisateurs chrétiens ont essayé de détruire ce culte en comblant les sources ou en démolissant les petits monuments païens élevés dessus. Puis, le clergé s’est efforcé de donner un vernis chrétien aux fontaines en leur substituant des noms chrétiens : apôtres de la Gaule, saints locaux... sans oublier la Vierge devenue très populaire pour remplacer les anciennes déesses.
La Bretagne est sans conteste la région d’élection des sources miraculeuses, avec une moyenne de deux fontaines sacrées par village. On les trouve également dans beaucoup d’autres régions, même si elles y sont moins nombreuses. Ainsi dans le Quercy, le Béarn, les Landes, le Berry, la Savoie, la Lorraine, les Vosges, le Morvan, etc.
Dans ces cas, ce n’est pas l’eau qui guérit, mais le saint.
Aujourd’hui encore, des cérémonies de pardon aux fontaines ont toujours lieu. Ces processions font partie des traditions ancestrales qui unissent les hommes d’un territoire, avec des cérémonies religieuses hautes en couleurs. On a parfois bien de la peine à faire la part entre le folklore que le tourisme impose et la croyance qui reste attachée aux saints des fontaines.
THERMALISME
Le thermalisme est l’utilisation de l’eau minérale à des fins thérapeutiques. Il a connu un engouement exceptionnel au 19ème siècle, porté par la vague du romantisme. Très rapidement, l’extension des liaisons ferroviaires a rendu accessibles, aux Parisiens et aux étrangers, ces stations isolées. La croissance de la fréquentation s’est alors emballée. On est passé de 22.000 curistes en 1822 à 120.000 en 1855.
En Savoie, à Aix-les-Bains, des personnalités du monde politique, des arts mais aussi des écrivains sont venus profiter des sources chaudes. Aux confins de la Lorraine, une demi-douzaine de stations se sont développées comme Plombières-les-Bains, la ville aux mille balcons, Vittel, Contrexéville, Bains-les-Bains, etc. Dans la chaîne pyrénéenne, pas moins de 31 stations thermales ont été ouvertes, portées par le goût impérial pour les villes d’eaux. L’Auvergne n’a pas échappé à ce mouvement : le Mont-Dore, Royat, La Bourboule, Saint-Nectaire et surtout Vichy devenue l’archétype de la ville thermale par excellence.
Il faut mentionner aussi l’eau qui sort de terre, chaude ou même bouillante. Ainsi à Chaudes-Aigues dans le Cantal où elle surgit à 85° C. N’oublions pas les sources thermales donnant, comme à Dax, non de l’eau, mais des boues dont on recouvre tout ou partie du corps du patient. On connaît mal les raisons de leur action sur l’organisme.
Aujourd’hui on respecte encore les vertus minérales de l’eau et on améliore son utilisation. Dans les stations thermales, rhumatismes, ennuis digestifs et troubles reinaux sont combattus avec douceur.