L'âne est traditionnellement considéré comme un cheval au rabais. Prêt à endurer de longues journées de travail, nourri de ronces desséchées ou de pelures de pomme de terre, il est l'humble monture des «gens de peu». Encore aujourd'hui, du Moyen-Orient au Maghreb, il accompagne les tâches des travailleurs agricoles et des paysans burinés par le soleil de plomb. Il lui arrive aussi de croiser sans broncher, sur les routes cabossées et empoussiérées, les 4x4 des riches et puissants de la nomenklatura.
C'est à partir de ces représentations bien ancrées que Shrek 2(1), film d'animation des studios Dreamworks, nous propose une réjouissante inversion des rôles. Le personnage de l'âne, présenté dans le premier opus de Shrek comme le compagnon têtu du héros, apparaît ici sous un autre jour.
Mieux que les apparences
Après avoir bu l'élixir «Heureux pour toujours» concocté par le personnage sulfureux de Marraine, Shrek se voit transformé en bel athlète, tandis que l'âne... se retrouve métamorphosé en un magnifique étalon élancé et musclé, au poil étincelant. L'âne devient pur sang, monture royale! Ses compagnons de fortune le regardent alors, stupéfaits.... Où est donc passé l'âne? Sa nature n'a pas disparu, puisqu'on la reconnaît à la voix, à la dentition et surtout au caractère. Mais l'apparence est désormais celle d'un «noble destrier». C'est sous cette forme qu'il poursuit, avec Shrek, des aventures destinées à déjouer les plans maléfiques de Marraine.
Au terme des aventures rocambolesques de nos héros, la mission est accomplie! Le détestable «Prince charmant» a échoué dans sa tentative de ravir le cœur de Fiona (la princesse de cœur de Shrek)... Nos deux héros, du coup, retrouvent leur apparence première. L'âne redevient âne. Et se trouve fort déçu! Mais son ami Shrek, moins bougon que d'habitude, lui fait alors une confidence de prix: à ses yeux, l'âne restera toujours un «noble destrier».
Par des voies détournées, ne retrouve t-on pas ici une belle leçon de l'Évangile? Jésus-Christ, Roi céleste, aurait pu prétendre au plus beau cheval pour entrer à Jérusalem. Mais il a fait d'un petit âne son «noble destrier». Une manière de nous donner espoir!
Au fond, nous sommes des ânes, mais le regard de Dieu nous métamorphose en «nobles destriers» en marche pour le Royaume.