Lecture : Luc 22.7-20
« Le jour des pains sans levain, où l’on devait immoler la Pâque, arriva, et Jésus envoya Pierre et Jean, en disant : Allez nous préparer la Pâque, afin que nous la mangions.
Ils lui dirent : Où veux-tu que nous la préparions ?
Il leur répondit : Voici : quand vous serez entrés dans la ville, un homme portant une cruche d’eau vous rencontrera ; suivez-le dans la maison où il entrera, et vous direz au maître de la maison : "Le Maître te dit : Où est la salle où je mangerai la Pâque avec mes disciples ? Et il vous montrera une grande chambre haute, aménagée : c’est là que vous préparerez (la Pâque)".
Ils partirent, trouvèrent les choses comme il le leur avait dit et préparèrent la Pâque.
L’heure venue, il se mit à table, et les apôtres avec lui.
Il leur dit : J’ai désiré vivement manger cette Pâque avec vous, avant de souffrir, car, je vous le dis, je ne la mangerai plus, jusqu’à ce qu’elle soit accomplie dans le royaume de Dieu.
Il prit une coupe, rendit grâces et dit : Prenez cette coupe, et distribuez-la entre vous ; car, je vous le dis, je ne boirai plus désormais du fruit de la vigne, jusqu’à ce que le royaume de Dieu soit venu.
Ensuite, il prit du pain ; et après avoir rendu grâces, il le rompit et le leur donna en disant : Ceci est mon corps, qui est donné pour vous ; faites ceci en mémoire de moi.
De même il prit la coupe, après le repas, et la leur donna, en disant : Cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang, qui est répandu pour vous. »
Après cette lecture, vous vous dites sans doute que ce dimanche, le sujet du jour ne peut être autre que la Pâque. Vous avez bien raison.
Depuis quelques semaines déjà, les commerces, les supermarchés, les journaux, les programmes festifs et activités de maternelles nous ont gavés les yeux autant que l’estomac des inévitables lapins, œufs et autres gourmandises en chocolat. C’est tout juste si l’on se souvient encore des origines de cette fête, avant tout familiale. Du repas à la gauloise au recueillement spirituel, enfant ou adulte, chacun pourrait évoquer ses souvenirs de Pâques avec toutes les nuances propres aux traditions familiales.
Cela dit, j’aimerais évoquer avec vous ce matin le souvenir de la première et de la dernière Pâque. Du moins la dernière Pâque de Yéchoua’ (Jésus) avec ses disciples avant de souffrir sur la croix. Quatre, voire cinq questions auxquelles je souhaite apporter une réponse.
- Que s’est-il donc passé durant ces jours entourant la période de la Pâque où Jésus devait mourir ?...
- Au-delà des mots et des phrases, comment comprendre cet évènement capital dans le cadre duquel Jésus institue ce qu’on appelle communément la Sainte Cène, ces deux symboles de la nouvelle alliance qui est conclue non seulement avec les Juifs, mais avec tous les hommes ?...
- En quoi le souvenir de la sortie d’Égypte est-il encore d’actualité aujourd’hui, et pas seulement pour les Juifs ?
- Enfin, pour nous croyants, quelle attitude adopter en cette période de Pâque ?
- En conclusion, j’espère pouvoir donner une réponse à la question que tout enfant juif pose à l’occasion de la Pâque. En quoi cette nuit est-elle différente de toutes les autres nuits ?...
Depuis plusieurs semaines déjà de nombreux pèlerins s’étaient rassemblés à Jérusalem et dans les environs. À cette époque, la ville était assez modeste : à peine 6 à 10.000 résidents toute l’année. Cependant, pour la période de la Pâque, certains s’accordent à dire que le nombre de pèlerins pouvait atteindre 2 millions de personnes. Les hôtelleries affichaient « complet » et chaque famille de Jérusalem faisait un gros effort pour accueillir nombre de pèlerins souvent venus de loin. D’année en année, certains avaient pris des habitudes et la Pâque était l’occasion de retrouvailles joyeuses, de fêtes et de grandes réjouissances. Même ainsi, la place manquait et beaucoup de pèlerins dormaient dehors ou encore dans des tombes creusées, inoccupées bien sûr et très nombreuses dans la région.
La Pâque est aussi l’occasion pour beaucoup d’écoles rabbiniques de confronter leurs idées, leurs interprétations et enseignements sur des sujets très divers. Il est probable que Jésus se soit trouvé en présence de nombre de ces rabbins de la diaspora et qu’il a dû discuter ferme avec eux.
C’est donc le grand rassemblement annuel au cours duquel des dizaines de milliers d’agneaux vont être sacrifiés et mangés. Normalement, un agneau devait servir à un groupe de 10 à 20 personnes maximum. Ni plus ni moins.
Jésus envoie deux de ses disciples (Pierre et Jean) préparer la salle pour le repas. Celui-ci est organisé la veille de la Pâque « officielle ». Il semble en effet que le jour de la « préparation » des Juifs suit le soir où Yéchoua’ réunit ses disciples. Personne ne s’en offusque. Pourquoi cela ?... Certains pensent que Jésus, en tant que rabbin plutôt controversé, a préféré ne pas se mêler à la masse des pèlerins qui allaient se bousculer le lendemain. D’autres pensent qu’il y avait en fait à ce moment-là plusieurs courants dans le judaïsme et qu’il existait au moins deux traditions qui fixaient des dates différentes pour le repas de la Pâque.
Quoi qu’il en soit, pour les auteurs des Évangiles, pour les disciples, comme pour la plupart des historiens, le choix du mardi ou du mercredi pour le repas pascal ne pose pas particulièrement problème.
Notez quand même qu’il y a une discussion assez ouverte entre commentateurs sur le jour à retenir pour le repas et donc pour le jour de la crucifixion de Jésus. De toutes les manières, la tradition chrétienne qui a fixé au vendredi le jour de la crucifixion est tout à fait contestable. Mais poursuivons…
Ce repas de la Pâque, si important et si réjouissant pour les Juifs, est, pour les disciples, marqué par le drame qui se prépare et par une certaine tension.
Les disciples se réunissent le soir dans la salle où tout a été préparé avec soin. À cette époque, la cérémonie de la Pâque est déjà organisée et réglée par des ordonnances précises contenues dans ce qu’on appelle aujourd’hui encore un Seder (terme en hébreu qui signifie « ordre », dans le sens d’un déroulement ordonné).
Au temps de Jésus, le Seder était sensiblement identique à celui pratiqué aujourd’hui par les Juifs à quelques détails près. Voyons ce que nous rapportent d’un côté les Évangiles, de l’autre la tradition historique. ...