Je me revois il y a quelques années, à la fin de mes études en théologie à la Faculté de théologie de Vaux-sur-Seine. Je piaffais d’impatience. D’ailleurs, cela faisait quelques mois que je piaffais… L’horizon du stage pastoral de fin d’études, et surtout des responsabilités futures attachées au ministère, donnaient une autre tournure aux cours : telle doctrine, comment allais-je pouvoir l’enseigner ? Telles connaissances bibliques, quand pourrais-je les transmettre ? Et concrètement, sur le plan pastoral, quelles orientations prendre ? Comment vivre le culte ? Les connaissances reçues pendant ces années d’études se bousculaient en moi comme autant de trésors que j’avais hâte de transmettre.
Bien sûr, j’étais consciente de ne pas tout savoir ni d’avoir tout approfondi. Après tout, les cours n’avaient pas eu la prétention de l’exhaustivité – certains étaient même simplement des introductions à des livres bibliques, des thèmes ou encore des problématiques. Et bien sûr, on nous disait régulièrement : « Continuez d’étudier ! On vous a donné des outils, maintenant, continuez de creuser, de chercher, de lire… » La fameuse formation continue !
Malgré tout, en quittant les études, j’étais prise dans une certaine tension. D’un côté, j’étais convaincue de l’importance de se former continuellement, de creuser, de garder cette posture d’étudiant toute sa vie pour se laisser enseigner et pour progresser. D’un autre côté, il y avait les quatre années de cours, de lectures, de révisions, l’impression d’avoir fait le tour des questions essentielles, ainsi que le fait de m’être forgé un avis sur un certain nombre de points – toutes choses qui me laissaient dans l’interrogation suivante : aurais-je assez d’une vie pour transmettre tout ce que j’avais appris ? Il me faut aussi confesser que même si j’avais apprécié les études théoriques, j’avais envie de passer à d’autres choses, plus concrètes.
Qu’en est-il six ans après ? Comment la dimension d’apprentissage se retrouve-t-elle dans ces premières années de ministère ? Ce qui suit relève essentiellement de mon parcours personnel : j’ai commencé les études assez jeune, sans avoir eu auparavant de responsabilité particulière dans l’Église, et je suis entrée dans le ministère à la fin d’un cursus assez classique. J’espère toutefois que certains points évoqués rejoindront l’expérience d’autres pasteurs débutants.
La formation universitaire : des bases pour aller plus loin
Il est évident que la formation universitaire donne des bases et des outils pour permettre d’aller plus loin par la suite. Alors dans un premier temps, il y a évidemment l’approfondissement des connaissances acquises aux études. D’ailleurs, c’est aussi une appropriation : le plan de tel prophète prend soudain un sens nouveau lorsque l’on doit prêcher sur un extrait de son livre. Les choix d’un évangéliste dans la rédaction de son Évangile paraissent plus concrets lorsqu’une étude biblique est en préparation. Les grands thèmes de spiritualité ou d’éthique revêtent un relief nouveau lorsqu'elles surgissent en entretien pastoral.
Mais il y a aussi nécessité d’approfondir. Si, lors d’un cours, j’ai reçu une introduction au contexte, aux enjeux et à la structure d’un livre biblique, si j’ai pu étudier aussi en détail un passage donné en cours d’exégèse, restent tous les textes que j’ai simplement parcourus et que j’ai maintenant la tâche de comprendre à l’aide des outils donnés. Ainsi, au gré des prédications, des études ou des débats organisés, le besoin se fait pressant de relire ses cours, et de consulter commentaires et dictionnaires pour comprendre ce qui n’a pas été étudié en détail.
Lors de ma deuxième année de ministère, un collègue plus expérimenté m’avait dit : on apprend toute sa vie ! C’est sûrement vrai… Sans avoir le recul nécessaire, je veux bien croire que le texte biblique est suffisamment riche pour nous étonner sans cesse. Je veux bien croire que les doctrines et les positionnements dans la foi ou la vie chrétienne se raffinent ou prennent un autre relief avec l’expérience humaine.
Cependant, il y a cette impression du débutant que tout ...