Quand les membres – et parfois les pasteurs – pensent à l’Église en terme de démocratie, ils s’en font généralement une idée assez superficielle. Ils rêvent – ou cauchemardent, c’est selon – de processus simples et directs où l’assemblée décide sans entrave du fonctionnement quasi-quotidien de l’association cultuelle, où chacun peut être candidat au conseil de l’Église et où le pasteur est soumis au bon vouloir du peuple.
Athènes a des limites
C’est assez proche de l’idéal démocratique auquel chacun pense spontanément, idéal qui doit ses lettres de noblesse à l’antique Athènes (VIe siècle av. J.-C.). Réunis en assemblée, les citoyens y décidaient des lois et nommaient les magistrats. Cette démocratie, qualifiée de directe, présente toutefois deux difficultés. Elle implique une grande disponibilité des citoyens pour débattre en assemblée et peine, pour cette raison même, à dépasser le stade strictement local. Ceci explique qu’elle ne soit que partiellement appliquée en Occident sous la forme de référendums d’initiative populaire – la Suisse en est un bel exemple – ou d’assemblées municipales en Nouvelle-Angleterre (États-Unis) au cours desquelles les habitants se prononcent par vote sur toutes les questions de gouvernement de leur cité(1).
Non à la « sondocratie »
À la démocratie directe, nos sociétés ont largement préféré la démocratie dite représentative où les citoyens élisent des représentants chargés d’établir les lois et d’autres de les faire respecter. Dans les deux cas, mais selon des modalités différentes, il s’agit bien d’organiser « le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple » selon l’expression d’Abraham Lincoln. Mais dans les deux cas aussi, ce gouvernement ne s’exerce pas en dehors de tout cadre préétabli. La démocratie représentative comme la démocratie directe se réfèrent à un texte fondateur (souvent appelé « Constitution »), respectent des règles de fonctionnement et précisent les critères que doit remplir un responsable local ou national pour être élu ou désigné. Pour le dire autrement, la démocratie n’est en rien une « sondocratie » qui, loin de défendre l’intérêt général, privilégie l’humeur du moment et encourage les égoïsmes. Or plusieurs indices (ou incidents !) montrent que trop de membres et pasteurs de nos Églises font correspondre à démocratie gouvernement de l’opinion. Ainsi en est-il quand les votes ne sont pas motivés et qu’une assemblée révoque un membre du conseil ou un pasteur sur un simple oui ou non.......