Le contexte
L’Église dont je suis devenu le pasteur en 2014 a une longue et riche histoire avec l’œcuménisme. Depuis les années 50, un membre éminent de l’Église organisait des temps de prières avec une grande figure catholique locale (et connue à l’international), ce qui avait lancé un mouvement de relations fortes entre nos Églises. À travers les années, les cultes en commun avec l’Église réformée (notamment à Pâques et à Noël), les célébrations lors des Semaines de l’unité des chrétiens, les concerts de chorales composées de musiciens des Églises chrétiennes de la ville, les conférences, etc., ont animé la vie religieuse de la cité. L’Église baptiste était fière d’être identifiée comme une Église « à vocation œcuménique ». Il est cependant important de nuancer : la réalité est que ceux qui s’y intéressaient vraiment étaient une minorité dans l’Église (pour preuve, le fait que les rencontres œcuméniques étaient globalement peu suivies par l’ensemble des membres et sympathisants de la communauté).
À partir de l’année 2015-2016, notre Église a connu une sorte de tournant. Elle a « décidé de grandir », pour reprendre le titre d’un livre de Christopher Short(1) qui nous a bousculés et encouragés à la croissance. Forcément, en mettant davantage l’accent sur l’évangélisation, sur une louange vivante et une prédication claire et adaptée à cette nouvelle orientation, l’Église a effectivement grandi. Dimanche après dimanche, nous accueillions de nouvelles personnes venant d’horizons beaucoup plus divers que ce que la « population locale » de l’Église avait connu jusque-là.
Or, pour certaines de ces nouvelles personnes – parfois chrétiennes de longues dates, parfois non – l’œcuménisme que vivait l’Église était un sujet d’incompréhension, de crainte parfois, voire un motif fort de colère vis-à-vis des instances de l’Église : « Ne savez-vous pas que les catholiques ne sont pas chrétiens ? » Autant dire que la croissance, sur le sujet précis de l’œcuménisme, mettait l’unité et la paix de l’Église à mal. Comment accueillir cette croissance tout en « restant nous-mêmes » ? Comment nous laisser interpeller par ces nouvelles personnes sans pour autant acquiescer à leurs demandes, par crainte de les perdre ?
Un temps de réflexion
Devant ces tensions, le conseil d’Église a pris une décision forte : mettre en pause les activités œcuméniques pendant quelques mois (individuellement, les personnes pouvaient tout à fait participer à des temps œcuméniques, mais l’Église n’y participait pas officiellement). L’idée était de donner du temps et de l’espace pour ...