Introduction : la rédemption a une histoire
Dans l’évangile de Jean, Simon Pierre entre en scène au 1er chapitre. Il le fait comme quelqu’un qui se met en route, à la suite du Christ, sous l’influence de Jean-Baptiste, par l’intermédiaire de son frère André (Jn 1.40-41). L’exclamation d’André, qui va convaincre Pierre – « Nous avons trouvé le Messie » (1.38) – fait apparaître Pierre dès le début de l’évangile comme un « chercheur de Messie » (1.38). En Jésus, il trouve ce qu’il cherchait. Le regard de Jésus se pose immédiatement sur Simon Pierre (1.42). Jésus « le regarde attentivement » (1.42), lui parle. Pierre est désormais un disciple du Christ.
Si Pierre a trouvé ce qu’il cherchait, il n’est pas pour autant au bout de sa quête. On sait les chemins sur lesquels Jésus va conduire ses disciples. Ce sont des chemins de cailloux et de poussière. Mais ce sont aussi des chemins d’éclaircissement dans lesquels l’image de celui qu’ils ont choisi de suivre va se préciser de plus en plus.
Le démarrage est beau. Un beau témoignage dirions-nous à la sortie d’un culte. Mais les beaux commencements ne garantissent pas la suite du parcours. La réalité, c’est que la vie de disciple n’est pas un simple commencement. Pour Pierre, comme pour ceux qui viendront après lui, la vie de disciple est faite de joies et de déceptions, d’avancées significatives et de régressions, et surtout d’ajustements dans l’image que l’on s’est fait du maître et Seigneur.
L’ajustement est particulièrement frappant au chapitre 6 (vv. 66-69). Jésus vient de donner un enseignement difficile, disant entre autres : « Celui qui me mange vivra par moi » (6.57) ; « Si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’homme et si vous ne buvez pas son sang, vous n’aurez pas la vie en vous » (6.53).
« Dès lors, beaucoup de ses disciples s’en retournèrent ; ils ne marchaient plus avec lui. Jésus dit donc aux Douze : et vous, voulez-vous aussi vous en aller ? Simon Pierre lui répondit : Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as des paroles de vie éternelle. Nous, nous sommes convaincus, nous savons que c’est toi qui es le Saint de Dieu. » (6.66-69)
Comme dans les évangiles synoptiques, Pierre fait ici une avancée. Son attachement se renforce, car le portrait de celui qu’il suit se précise. Mais, comme dans les synoptiques, à ce moment-là, l’adversaire n’est pas loin :
« Jésus leur répondit : N’est-ce pas moi qui vous ai choisis, vous, les Douze ? Pourtant l’un de vous est un diable ! Il parlait de Judas [et non pas de Pierre, ici, mais bien de Judas], fils de Simon Iscariote ; car c’était lui qui allait le livrer, lui, l’un des Douze ! » (6.70-71)
Il est intéressant de comparer cet épisode de révélation à celui des synoptiques où ce n’est pas Judas, mais Pierre lui-même qui devient un adversaire, un Satan, pour Jésus. Oui, le chemin du disciple est fait de passages lumineux et de détours plus sombres. Non loin de cet instant de lumière, éclairé, on peut le suggérer, par l’Écriture : « Tu es le Saint de Dieu », c’est ce que dit Pierre, eh bien il y a des zones d’ombre.
Le dernier repas de Pierre
Mais il faut nous rapprocher rapidement de la fin de l’évangile de Jean, de la Passion et de la résurrection. L’approche de la Passion ne touche pas que Jésus, même s’il est au cœur des événements. Les disciples qui le suivent en direction de la croix marchent de plus en plus, eux aussi, sur un chemin d’épreuve, d’incertitude, de perplexité. C’est autour d’un repas, dans l’évangile de Jean, que vont se nouer tous ces fils.
Lors de ce repas, Jésus lave les pieds de ses disciples. Que fait-il ? Il met en scène sa mort ; il illustre son abaissement de serviteur ; il montre une voie à suivre. Mais Pierre ne rentre pas dans le « jeu ». Vous connaissez l’histoire : il refuse que Jésus lui lave les pieds ; avant de proposer : « Non seulement les pieds, mais encore les mains et la tête » (13.8-9).
À l’approche de l’épreuve, Pierre résiste à Jésus. Pourtant, l’enjeu est essentiel, la question est vitale : ...