La vie d’Abraham se situe vraisemblablement à cheval sur le XXème et XIXème siècle avant J.-C.(1). Il naît en Mésopotamie, dans la ville d’Ur (aujourd’hui en Iraq). Quelques décennies auparavant, c’était encore le centre d’un impressionnant empire. Mais en 2004 avant J.-C., ce royaume s’effondre et sa capitale avec lui. Un poème de l’époque, la «Lamentation sur la destruction d’Ur», montre combien cet évènement a frappé les esprits. Dans la cité à peine reconstruite, les habitants adorent une multitude de dieux, surtout la Lune. On voit encore aujourd’hui, sur le site archéologique, les restes imposants d’une pyramide(2) ayant servi de temple.
Une époque charnière
L’empire s’étant désagrégé, Abraham vit dans une période où réapparaissent de petits royaumes indépendants. Plus tard, vers 1750, le roi Hammourabi unifiera à nouveau la région. La Bible est donc historiquement cohérente en montrant Abraham, vivant entre ces deux empires, affronter une coalition de rois indépendants(3). Plusieurs d’entre eux portent des noms typiques de régions orientales anciennes, ce qui donne du crédit au récit.
Mais Dieu appelle Abraham à s’installer en Canaan (actuels Israël et Cisjordanie). Il s’y enrichit, possède de grands troupeaux et des chameaux. Certains affirment que ces animaux n’étaient pas encore domestiqués. En réalité, une tablette de l’époque mentionne déjà leur utilisation.
Par temps de famine, il se réfugie en Égypte et rencontre le Pharaon (Genèse 12). Ici encore le récit biblique colle bien aux données historiques. En effet, c’est précisément dans la «tranche» 1970-1540 av. J.-C. que les Pharaons auront une résidence à l’est du delta égyptien.
Des problèmes familiaux
Les découvertes archéologiques éclairent même certains aspects de la vie privée d’Abraham. Son épouse Saraï, stérile, lui a proposé d’avoir un enfant avec sa servante Agar pour l’adopter ensuite(4). Comme la mère biologique prend Saraï de haut, on la maltraite, au point qu’Agar s’enfuit. Finalement revenue, elle sera chassée avec son fils quand ses maîtres auront un fils naturel…
Or au siècle d'après, suite à un cas identique(5) un décret royal sera publié, stipulant que:
1• La « mère porteuse » ne devait pas profiter de la situation pour humilier sa maîtresse
2• Les maîtres n’avaient pas le droit de se débarrasser de cette pauvre femme après l’avoir «utilisée».
En optant pour une méthode douteuse, Abraham et son épouse avaient commis une erreur douloureuse sur le plan éthique.
Les découvertes archéologiques nous permettent donc de mieux saisir les réalités de l’époque et de la vie d’Abraham. Un homme de son temps? Oui, indubitablement. Mais sa vie fut aussi unique, grâce au Dieu qui l’avait appelé. Unique, mais aussi un exemple que la Bible donne à tous ceux qui croient dans le même Dieu. Elle les invite à vivre avec leur temps, dans leurs difficultés, mais accompagnés par un Seigneur qui est avec eux tous les jours(6).
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Abraham renvoyant Hagar
On pourrait s’attendre à ce que le texte biblique rejette en bloc les acteurs de cette situation puisqu’elle fait défier complètement le plan divin. Il n’en est rien. Si le Dieu de la Bible est loin d’approuver la méthode et les comportements individuels, il prend néanmoins soin de chacun. Jusque dans la situation trouble où ils se sont empêtrés. Les deux fois où Hagar part, brisée, il se révèle à elle pour la rassurer. Il donne aussi un fils naturel au couple malheureux...
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