Dans le petit monde des réalisateurs français de cinéma, Danièle Thomson fait assurément partie des plus talentueux, à la fois par son choix de scénarios, la sûreté de son regard et sa direction d'acteurs. La bûche(1) n'est pas son meilleur film, mais il apparaît représentatif des qualités de la réalisatrice: on entre dans l'histoire, on s'intéresse aux personnages, on rit (jaune, parfois)... Bref, «c'est du cinoche», du vrai !
Servie par la formidable interprétation des acteurs, l'histoire se déroule au gré de la vie de trois soeurs. Sonia la bourgeoise (Emmanuelle Béart), Louba la chanteuse (Sabine Azéma) et Milla la rebelle (Charlotte Gainsbourg) sont toutes engagées dans des histoires personnelles compliquées, d'autant que les parents s'en mêlent! La vie d'Yvette, veuve explosive, et celle de Stanislas, violoniste tzigane, sont un parcours du combattant semé de ressentiment, de tromperies, de séparations, de silences. Les relations de tout ce petit monde sont devenues si complexes, fausses et ambiguës qu'on ne sait plus très bien qui peut faire confiance à qui.
Et voilà Noël qui approche...
Bien que l'hypothèse de boycotter l'événement effleure certains personnages, il faut bien se faire à l'idée de ces retrouvailles. Mais pour se dire quoi ? Jouer quel rôle ? Chaque personnage apporte ses lourdes valises, son lot de drames et de mensonges, du comique au tragique. Entre Sonia, soucieuse des convenances, et Milla (en pleine dépression hostile), toute une gamme de sentiments s'exprime au gré des péripéties qui scandent l'approche de Noël. Le ton de ce récit aux allures de vaudeville est plutôt léger. Mais au-delà du méli-mélo des états d'âme de ces bobos parisiens, il pose une question fondamentale: et si Noël était un temps de réconciliation ?
Pour des millions de familles, cette fête d'origine chrétienne est l'occasion de retrouvailles. Mais pour se dire quoi ? Et que partager ensemble ? La question de la bûche, qui sert de prétexte pour dérouler l'histoire du film de Danièle Thomson, ouvre ainsi sur un enjeu bien plus large: le défi d'un temps privilégié qui fonctionne comme notre «heure de vérité». Une rencontre où l'on va tomber les masques et décider si le pardon et l'amour doivent l'emporter, ou non, sur la rancune et la haine.
Pour parvenir à trouver l'issue, La bûche ne fait qu'effleurer des pistes. Rien n'interdit, à partir du coeur de Noël (qui fête l'incarnation de Jésus le Christ, venu apporter le pardon et la vie), d'aller plus loin. Et de retrouver, au-delà du fatras de superficialités commerciales des Noëls d'aujourd'hui, l'écho de cette très ancienne parole qui n'a rien perdu de son actualité: «Dieu était en Christ, réconciliant les hommes avec lui–même, sans tenir compte de leurs fautes, et il a fait de nous les dépositaires du message de la réconciliation»(2)