Le débat sur les racines chrétiennes de l’Europe montre bien que l’histoire du christianisme n’a cessé de fasciner l’Occident. Comment une religion, au départ minoritaire, est-elle parvenue à s’imposer en devenant majoritaire aujourd’hui dans le monde entier ? Comment notre monde est-il devenu chrétien ? La question est d’actualité. Historiens, sociologues et philosophes s’y intéressent de près.
Les recherches récentes sur l’histoire du christianisme renouvellent les problématiques et nous éclairent sur plusieurs aspects, ce qui oblige à revoir nos présupposés sur le sujet.
Citons deux ouvrages éclairants, celui de l’historien Paul Veyne « Quand notre monde est devenu chrétien » qui insiste sur l’arrivée au pouvoir de l’empereur Constantin et la protection qu’il a accordée au christianisme. Quant à l’historienne Marie-Françoise Baslez, son livre « Comment notre monde est devenu chrétien » se propose d’étudier l’histoire du christianisme durant les trois premiers siècles en cherchant à rendre compte de la visibilité du christianisme.
Même si l’empereur Constantin a joué un rôle important dans la diffusion du christianisme, on ne saurait associer la christianisation du monde à la conversion de cet empereur comme on a pu le penser pendant longtemps. Le christianisme se développe dans le terreau du pluralisme et du polythéisme religieux du monde gréco-romain dominé par le « faire » (qui est visible) et indirectement par le « croire » qui relève du domaine de l’intériorité.
Le paganisme était une religion du rite et non du livre, tandis que le judaïsme, par exemple, fonde sa croyance sur la révélation de Dieu consignée dans l’Écriture, la Torah.
Le christianisme apparaît donc comme une religion du « croire » fondée sur la foi personnelle du croyant, de la Bible hébraïque et de la compilation d’écrits d’auteurs dits « inspirés » connus sous le nom d’Évangile ou Nouveau Testament.
Le christianisme est une religion de salut à vocation universelle qui repose sur deux éléments fondamentaux : le retour de Jésus et la vie éternelle réservée aux élus dans le royaume de Dieu.
Selon les historiens, on comptait, en l'an 250, 44.000 chrétiens dans la ville de Rome pour une population estimée à environ 1,5 millions d’habitants
(1). Au 4e siècle, la population de l’Empire romain s’élevait à 70 millions. On pense que cinq à dix pour cent d’entre eux étaient chrétiens
(2)Une histoire sociologique des trois premiers siècles du christianisme est utile pour comprendre sa diffusion. Elle est rendue possible grâce aux ressources dont nous disposons, mais également par la correspondance abondante et exceptionnelle des chrétiens qui constitue une mine d'or pour l’historien. Il existe forcément des zones d’ombre dans l’histoire du christianisme. Cette religion s’est épanouie en Asie Mineure. Il était alors demandé aux religions de l’Empire de « créer du lien social ». La religion « était donc la principale composante de l’identité collective, admise comme telle, et c’est ce qui donnait son contenu au principe de tolérance dans l’Empire romain
(3)». Les Romains étaient favorables à ce que nous appelons aujourd’hui le multiculturalisme et s’opposaient résolument au « communautarisme », créateur de divisions.