L’ordre de « ne pas tuer » est-il compatible avec le métier militaire ?
À cette question directe, je réponds « oui » de manière directe et sincère. Oui, avec l’éclairage d’une carrière de 39 ans d’officier de l’armée française.
Cette interrogation m’avait tenaillé lorsque je préparais le concours de Saint-Cyr pour entrer dans ce métier des armes. Que faire de l’interdit du meurtre prescrit dans les dix commandements et de l’appel du Christ à aimer son prochain ?
Il est clair pour moi que ces deux commandements ne s’adressent qu’à des chrétiens, c’est-à-dire des personnes ayant accepté Jésus comme Sauveur, et cherchant depuis leur conversion personnelle à obéir à cette Parole de Dieu contenue dans la Bible.
La guerre est un des symptômes du péché qui règne sur le monde, conséquence directe de la rébellion de l’homme contre Dieu. Depuis le Paléolithique (12 000 avant J.-C), jamais l’humanité n’a connu la paix.
Face à cette réalité humaine, le chrétien ne peut se dérober. Deux choix sont possibles pour lui : le refus de porter les armes, voire l’objection de conscience que je respecte et que j’admets parfaitement. Le film de Mel Gibson en 2016, « Tu ne tueras point », raconte l’histoire vraie d’un jeune chrétien américain lors de la Seconde Guerre mondiale qui refuse de porter une arme mais soigne et sauve ses camarades en tant qu’infirmier, durant la bataille d’Okinawa face aux Japonais. Il faut ici souligner que ce jeune adventiste porte l’uniforme de l’armée américaine.
L’autre choix possible est de prendre les armes pour défendre ou libérer son pays lorsqu’il est attaqué, voire envahi, comme la France de 1940 ou l’Ukraine de 2022. Quand toutes les solutions diplomatiques ou politiques sont épuisées, face à un Hitler, au terrorisme islamiste ou à Poutine, je considère, qu’en tant que chrétiens, nous devons être solidaires de ce monde et de ses réalités, alors même que, par notre foi en Jésus-Christ, nous sommes déjà en route vers le royaume de Dieu.
Il faut comprendre que c’est le meurtre que Dieu interdit, à savoir ôter la vie d’un être humain par jalousie, haine ou intérêt personnel. Le mot utilisé pour « tuer », notamment en temps de guerre, est un autre mot.
Par ailleurs, le Nouveau Testament nous présente de nombreux centurions romains de façon positive, jamais comme mauvais ou violents. Ils sont plutôt des hommes sincères en recherche de Dieu. Nulle part, il n’y est prescrit à un chrétien de quitter l’état militaire.
Aussi, de ma lecture de la Bible, je retiens que tout chrétien engagé dans sa foi peut servir son pays en prenant les armes lorsque la situation l’exige. Il doit cependant prier et s’interroger sans cesse sur son comportement, en particulier lorsqu’il se trouve engagé au combat. Lorsqu’il est en position de commander, son style de commandement et ses décisions doivent refléter en toutes circonstances l’amour du Christ. En effet, c’est la Bible qui doit l’inspirer dans tous ses choix, décisions et actions.
Un militaire peut-il être en même temps pacifiste ?
Il est manifeste que dans tout pays, certains militaires ne sont guère pacifistes. Bien au contraire parfois, comme l’Histoire nous le montre et comme il m’est arrivé de l’observer, notamment parmi les plus jeunes qui brûlent d’envie de faire leurs preuves auprès des plus anciens.
La discipline militaire est indispensable, d’abord en temps de paix, dans la préparation opérationnelle, mais surtout au combat : elle vise l’obéissance et la loyauté dans les situations extrêmes qui peuvent conduire au sacrifice de sa propre vie ...