Introduction
Si le manque de dynamique et de mouvement est un danger qui guette particulièrement les Églises dites « historiques », chaque communauté locale risque de perdre son élan dès lors que l’enthousiasme initial cède la place à la routine. Ce n’est pas que la structuration d’une Église locale soit mauvaise : loin de là ! Jean Calvin parlait justement de l’importance de passer d’une Église plantée à une Église dressée, c’est-à-dire une communauté de foi organisée, capable de se tenir debout, solide dans la foi. Mais ce n’est pas pour rester immobile que l’Église se met debout, c’est pour marcher. Pas pour regarder derrière elle, mais pour tendre vers l’avant. Et le bâtiment en construction n’est pas un musée, mais une maison, un lieu de promesse et de vie.
Comment faire alors, lorsqu’une Église manque de dynamique ? Lorsqu’elle est plus tournée vers le passé que l’avenir, plus marquée par le découragement que la confiance, le formalisme que la joie ? Doit-on partir ailleurs à la recherche d’une autre communauté, ou une telle Église locale peut-elle revivre ?
Posée de cette manière, noir sur blanc, la réponse nous vient spontanément : « Oui, bien sûr ! Aucun lieu n’est condamné au fatalisme. Tout lieu peut retrouver la vie. » Mais attention ! Pas trop vite ! Regardons plutôt une vision prophétique de l’Ancien Testament qui nous présente cette même question sous une forme déroutante, même choquante. Il s’agit de la vision d’Ézéchiel de la vallée des ossements desséchés (Ézéchiel 37).
Ces ossements pourront-ils revivre ?
Ézéchiel est prophète au moment de l’exil, une période où le peuple est plus tourné vers le passé que l’avenir. Selon le texte, les gens sont même persuadés qu’il n’y a plus d’avenir, tellement leur découragement est grand. Ils sont la dernière génération avant la fin : « Nos ossements sont desséchés, notre espoir s’est évanoui, nous sommes perdus ! » (v.11). La vision démarre avec un premier déplacement : le prophète se trouve au milieu d’une vallée remplie d’ossements humains, les restes désolants d’une défaite militaire terrible. Mais ce n’est pas par hasard que le prophète se trouve là, ou parce qu’il s’est trompé de chemin — c’est bien le Seigneur qui a placé le prophète dans ce lieu difficile. Et c’est là où le Seigneur lui parle pour opérer un deuxième déplacement, intérieur cette fois-ci : « Humain, ces ossements pourront-ils revivre ? » (v.3). Le prophète doit laisser résonner en lui deux réalités apparemment contradictoires : l’absence de vie autour de lui (les ossements sont complètement secs), et la présence de Dieu dans ce lieu (c’est le Seigneur qui l’a déposé dans ce lieu aride et qui lui parle). De cette confrontation va germer sa réponse : « Seigneur Dieu, c’est toi qui le sais ! » (v.3). En reconnaissant l’impossibilité de vie d’un point de vue humain, le prophète s’ouvre à la possibilité d’une résurrection de la part de Dieu.
La radicalité de cette vision nous frappe dès lors que nous essayons de faire un parallèle avec la vie de nos Églises. Car nous voulons surtout résister à l’affirmation qu’il n’y a plus de vie, plus d’espoir ! Nos Églises peuvent manquer de vitalité, certes, mais elles ne sont pas mortes ! Et d’une certaine façon, nous avons raison. Nous sommes même appelés à résister aux formes de mort que sont le désespoir, le découragement, le fatalisme, la résignation… qui peuvent envahir l’Église. Ce sont des attitudes qui ne se conjuguent pas avec un Évangile d’espérance, de courage, de croissance, de confiance. Il faut leur résister.
Mais notre résistance démarre réellement lorsque......