Pieter Bruegel l'Ancien résidait à Bruxelles quand, en août 1567, le duc d'Albe arriva à la tête de ses troupes. Il était envoyé par le roi d'Espagne Philippe II dont l'empire comprenait aussi les provinces des Pays-Bas. Le capitaine général, chargé de convertir les protestants par la force, fit condamner à mort plusieurs milliers de personnes durant les années qui suivirent. Cette dureté exceptionnelle conduisit à la révolte, puis à la guerre. Celle-ci devait durer 80 ans et se terminer par la division des provinces en deux blocs : la (future) Belgique catholique au Sud et les Pays-Bas protestants au Nord.
Bruegel mourut le 5 septembre 1569, deux ans après l'entrée du duc d'Albe dans Bruxelles. Il disparut l'année où la résistance des Pays-Bas tourna à l'insurrection.
La pie sur le gibet 1568
Au sujet de l'un de ses derniers tableaux, La pie sur le gibet (1568) Van Mander remarque : "il lui laissa (à sa femme) par testament une toile avec une pie sur le gibet. La pie représentait les mauvaises langues, bonnes pour le gibet"… Il est possible aussi que Bruegel ait pensé aux dénonciateurs. C'est en effet sur la délation que le duc d'Albe avait édifié son régime de terreur.
Le gibet lui aussi suggère une interprétation politique. En 1566, les autorités espagnoles avaient ordonné la pendaison des prédicateurs qui répandaient les enseignements du protestantisme. La mort sur le gibet considérée comme particulièrement déshonorante fut associée dès lors au régime d’oppression espagnol..
Le Massacre des innocents 1566
Le second tableau dépeint l'assassinat de tous les enfants mâles de Bethléem, la ville où Jésus est né. Lieutenant général des forces d'occupation romaines, Hérode avait ordonné le massacre des enfants, se croyant menacé par ce "roi des juifs" inconnu qui venait de naître.
Bruegel transpose l'épisode biblique dans son époque et son pays : dans un village enseveli sous la neige les soldats font irruption dans les maisons et arrachent les enfants des bras de leurs mères. Un groupe menaçant de cavaliers en cuirasse grise observe la scène. Ils sont commandés par un officier vêtu de noir. A l'instar du duc d'Albe, il porte une longue barbe blanche. Philippe II fait partie de la dynastie des Habsbourg.
La Prédication de Saint Jean-Baptiste 1566
Cette même année où l'on saccagea les images saintes, Bruegel peignit La Prédication de Saint Jean-Baptiste (1566). La Bible raconte que le prophète avait annoncé la venue du Christ sur terre. Bruegel montre Jean-Baptiste prêchant dans un bois. A l'arrière plan, on distingue une rivière, des montagnes et une église. Parmi la foule des spectateurs, on peut voir au premier plan des personnages vêtus d'étoffes à rayures qui les désignent comme des orientaux. Pourtant le paysage et les habits des autres personnages indiquent bien que la scène se déroule aux Pays-Bas à l'époque de Bruegel.
Dans ce tableau Breughel rend un hommage pictural aux assemblées religieuses secrètes des protestants.
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