Dans la mouvance de « l’ Évangile des mots positifs » ,
communion et
amour se partagent la place d’honneur. Ces mots-là résonnent agréablement aux oreilles. Les entendre fait déjà du bien. Personne n’est contre, pas même ceux qui ne croient pas en Dieu. Ce sont en quelque sorte des mots-remèdes, qui peuvent être prescrits sans limite, sans contre-indication.
Dans les années 80 et 90, c’est le désir de se distinguer des sectes qui a conduit bon nombre de chrétiens à adopter une attitude conciliante, raisonnable, policée. On a mis sur le côté tout ce qui aurait pu donner l’impression qu’on avait des références et une espérance nettement différentes des autres. Certains mots ont disparu dans la bouche des prédicateurs et même dans les traductions de la Bible. On s’y est peu à peu habitué. Aujourd’hui, c’est le désir de se démarquer de tout ce qui pourrait rappeler de près ou de loin l’extrémisme religieux qui mobilise les esprits. On prend le contre-pied, on parle du vivre-ensemble et de la préservation de la planète. On est sûr, ainsi, de n’être pas persécuté. Il est évident que pour beaucoup, dans ce contexte, il n’y a pas plus de limites à apporter à la notion de communion qu’il n’ y en aurait pour la notion d’amour ou encore pour l’air à respirer.
La notion de « fraternité » , qui n’est pas très éloignée de celle de communion, est couramment évoquée elle aussi, à des niveaux forts divers : fraternité en humanité de par notre filiation à Adam, fraternité dans la République de par notre citoyenneté, fraternité interreligieuse, fraternité chrétienne en référence à Jésus-Christ… Nous avons parfois vu le mot « frère » utilisé dans ces différents sens… dans un même paragraphe. Est-ce sérieux ? Cette manière de faire, il faut l’admettre, s’accommode de beaucoup d’imprécisions, et on peut se demander si quelques belles formules positives suffisent à donner le sens nécessaire pour s’accorder véritablement sur ce que l’on veut dire.
Lors de son a ssemblée générale, au début de 2016, le Conseil de la Fédération protestante de France a proposé une résolution où on peut lire ceci : « Ce mot communion a des sens variés. Il peut recouvrir des réalités bien différentes. Chacun peut lui donner des accents et des nuances diverses, sans se rendre compte que d’autres en ont une compréhension différente. La Fédération protestante de France n’est pas une grande Église et n’a pas vocation à le devenir. Elle n’est pas non plus une simple plateforme de collaboration sans convictions communes, sans âme » .
À lire cela, on est fondé à se demander si, en p rotestantisme, on peut avoir d’autres convictions que celle qui affirme la pluralité des convictions. Comme cela, on est tranquille. Mais cet arrangement est-il compatible avec la notion de communion ? En fait, de quelle communion parlons-nous ? Avec ces questions subsidiaires : Demander cela est-il inconvenant, déplacé ? La notion de communion est-elle d’emblée abîmée si on tente d’en définir la nature et le sens ? Est-il permis d’utiliser l’expression : « La notion biblique de communion » ?
Si nous parlons de la communion dont il est question dans la Bible, c’est bien celle-ci qui doit nous donner les éléments de référence. Dire ni trop ni trop peu , il me semble que c’est la discipline qui convient pour ce sujet. Je propose sept pistes de réflexion (ou hypothèses de travail) susceptibles de nous aider, volontairement présentées de manière lapidaire.
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