Il y a une dizaine d'années, un groupe relativement informel de philosophes et scientifiques est apparu sur la scène publique. Pour certains, le « Nouvel Athéisme »i, comme on allait bientôt l'appeler, faisait figure de génération spontanée naissant dans un contexte paradoxal de retour du religieux, et de méfiance envers lui. Les écrits de Richard Dawkins, Sam Harris, Christopher Hitchens et Daniel Dennett, les ‘Quatre Cavaliers du Nouvel Athéisme’, allaient bientôt faire de l'athéisme militant une marque de fabrique de la culture occidentale de cette dernière décennieii. Avant que l'année 2007 ne soit terminée, un « canon » du Nouvel Athéisme semblait avoir été reconnu par les communautés d'Europe et des États-Unisiii. Même si l'intérêt pour le Nouvel Athéisme semble peu à peu s’atténuer, il n'en demeure pas moins une force argumentative en faveur de la non-existence de Dieu et contre la présence des religions sur la place publique. Bien sûr, les fidèles continueront à placer une certaine foi en Dawkins, Hitchens, et les autres, mais force est de constater que les médias parlent beaucoup moins du Nouvel Athéisme depuis environ un aniv.
Le Nouvel Athéisme, s'il est relativement difficile à définir avec précision, peut cependant être catégorisé en fonction des arguments utilisés par ses différents auteurs. Par exemple, la version « continentale » du Nouvel Athéisme, particulièrement en France, a pris une direction plus philosophique et existentialiste que sa contrepartie anglo-saxonne. Cette dernière, sous la houlette prophétique de Richard Dawkins, s'est concentrée sur une défense scientifique de l'athéisme – ainsi que sur une remise en cause radicale de toute religion par cette même « science ». Cependant, il ne faudrait pas rendre imperméables les frontières entre ces deux formes du Nouvel Athéisme. La tradition anglo-saxonne n'hésite pas à s'essayer à la philosophie, de même que la branche continentale s'appuie parfois sur des données scientifiques. Il faut quand même noter que la « science » utilisée par les anglo-saxons a tendance à relever des « sciences exactes » alors que les continentaux sont plus susceptibles d'invoquer les « sciences humaines »v.
Cependant, le recours à l'autorité scientifique est globalement évident dans l'argumentaire du Nouvel Athéisme. Je ne souhaite pas ici faire une présentation des arguments scientifiques eux-mêmes, mais plutôt évaluer la place et la nature de la science dans le militantisme athée. D'ailleurs, je ne parlerai pas des articles spécialisés des Nouveaux Athées publiés dans des journaux scientifiques. En effet la plupart de ces articles ne font pas partie de leur argumentaire et sont, pour certains, un peu datésvi. Il ne sera donc pas question, par exemple, des mèmes de Richard Dawkins.
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