Qu’est-ce qui t’a conduit à choisir l’agriculture bio ?
Ma femme et moi sommes partis au Québec pendant un an. Nous y avons assisté à des congrès écologistes dans lesquels nous avons rencontré des AMAP (Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne). Ceci nous a amenés à nous questionner sur notre alimentation.
En revenant en France, c’était important pour moi de passer du temps avec notre premier enfant. J’ai d’abord travaillé en chèques emploi services dans l’entretien des haies. Puis je n’ai plus trouvé de sens à ce que je faisais. J’ai contacté alors le directeur de la ferme où je travaille actuellement et il m’a embauché.
Et aujourd’hui ?
J’ai repris en 2011 la gérance de la ferme où j’étais salarié. Je travaille en collaboration avec une école, trois AMAP et un magasin bio. Au total, la ferme emploie deux saisonniers, un permanent et moi. Pour améliorer les cultures, j’utilise seulement un peu de cuivre, des bactéries, des décoctions de plantes et des prépa- rations biodynamiques.
Comment définis-tu l’agriculture biologique ?
C’est une agriculture en interaction avec ce qu’il peut y avoir autour de nous et sous nos pieds.
Quelle différence fais-tu entre un agriculteur « classique » et un « bio » ?
On peut utiliser des produits chimiques et être un bon paysan. Mais recourir à leur emploi systématique peut nuire au bon diagnostic. Le cycle de la vie est rapide. La vie moderne ne nous laisse pas le temps d’y penser. On fait confiance à un système de manière aveugle alors que parfois, prendre en compte les causes naturelles permet de retrouver l’équilibre. Je ne viens pas du milieu agricole. Alors peut-être que de ne pas avoir été formé par le système existant me permet plus facilement d’inventer le mien et de me connecter à la terre.
Qu’entends-tu par « te connecter à la terre » ?
Le lien à la terre permet de trouver l’équilibre avec notre planète. La terre est le meilleur exemple des liens qu’on entretient avec les autres. J’y trouve du sens et de l’énergie pour avancer.
As-tu rencontré des joies ou des difficultés particulières ?
Les premières années c’était difficile d’être à la hauteur, mais j’ai pu relever le défi. C’est beaucoup de travail et de stress parce que je suis perfectionniste. Finalement, la ferme tourne bien et se développe. L’équipe réussit à satisfaire les gens. C’est bien.
Comment perçois-tu la crise agricole ?
Elle ne se résoudra pas tant que les industriels et les financiers feront pression sur les dirigeants. C’est une problématique internationale. Certaines personnes aimeraient cesser de fonctionner ainsi, mais on ne peut pas tout changer du jour au lendemain. La transition exige un accompagnement.
Est-ce que la foi apporte quelque chose à ton métier ?
Je ne serais pas ce que je suis sans elle. Je vis ma foi dans ma manière d’appréhender mes relations avec les autres. Je prie avant de faire mes mélanges pour laisser plus de part à l’énergie de la vie qu’à l’intelligence. L’Évangile me parle plus aujourd’hui parce que je nourris les gens. C’est important de prendre soin des autres.