Dans une chanson qu’il interprétait en duo avec Johnny Hallyday, Eddy Mitchell disait : « On veut des légendes, des légendes/ À consommer toutes prêtes sur commande. » Or, le gros problème dont souffrent plusieurs d’entre nous, c’est d’avoir été bercés dans une éducation religieuse, dans la légende – étymologiquement : « ce qu’il faut lire ». Pour beaucoup, Jésus est le Fils de Dieu, gentil avec tout le monde, aimant les handicapés, les pauvres, les enfants, se laissant maltraiter et crucifier sans protester, l’être le plus parfait qui ait existé, l’homme qui, finalement, sera resté toute sa vie le « petit Jésus » de la crèche.
Cette image sirupeuse attachée au nom même de « Jésus » dans sa consonance française me parasite (à tel point que je préfère le « Djîseusse » anglais, le rude « Rréssoús » espagnol ou l’exotique « Yeshoua » hébreu). Elle me gêne plus qu’elle ne m’aide.
LOIN DES IMAGES PIEUSES
Certes, il y avait de la douceur en Jésus. Mais quelle rudesse aussi ! À commencer par ses rapports avec sa mère, qu’il appelle peu tendrement « femme » pour lui signifier qu’elle n’a pas encore très bien compris le sens de sa mission ; avec les marchands du temple dont il renverse violemment les tables parce qu’ils font du commerce sur le « dos » de Dieu ; avec les religieux hypocrites qu’il traite de « race de vipères » et à qui il promet une éternité catastrophique. Et même avec ses disciples, dont l’apôtre Pierre qu’il traite de « Satan » !
À l’âge de 16 ans, j’ai eu l’occasion de regarder, seul, L’Évangile selon Saint Matthieu, de Pier Paolo Pasolini. Ce film a laissé en moi une empreinte indélébile. Sur un dialogue...