J’ai le syndicalisme «dans les gènes»! Très vite, je m’engage. À la JOC (1) je découvre en Jésus un personnage révolutionnaire socialiste. Montée à Paris pour entreprendre mes études d’infirmière, un objectif m’anime: changer la société coûte que coûte. Ma décision est prise, je serai militante.
Dans le foyer de l’Armée du salut où je suis hébergée, des salutistes prêchent la Bible et parallèlement des étudiants prêchent le communisme. Je choisis de m’engager à l’OCI (2). Je vis toujours un terrible combat: attirance du monde extérieur contre dévotion aux autres. De ces années, je retiens beaucoup de révolte. Beaucoup de violence verbale aussi pouvant aller jusqu’à la haine.
J’obtiens mon diplôme et deviens infirmière dans un service de cardiologie néonatale. J’ai de la compassion pour les mamans, ressentant leur douleur, leur détresse d’être arrachées de leur enfant dès la naissance. Sensible à la misère sociale, je m’inscris comme bénévole à Emmaüs et vais la nuit à la rencontre des SDF.
Paris est une fête
Entre temps, je rencontre un homme juif de 12 ans mon aîné. Attirée par la culture juive plus que par l’homme, je tombe amoureuse et… enceinte: résultat un avortement. Je n’ai ni l’argent, ni la maturité nécessaire pour élever un enfant d’autant plus que le monsieur en question s’en va bien vite. Je m’en sors, soutenue par des amis, mais pas indemne – détresse, culpabilité…
Quelque temps plus tard, au cours d’une fête, nouvelle rencontre: un garçon athée, brillant polytechnicien; coup de foudre réciproque. Nous vivons ensemble. Lui ne veut pas d’enfant, moi si. Au bout d’un an, je suis enceinte; il fait sa valise. Une petite fille arrive. Le père voit sa fille au bout d’un mois et disparaît. Elle le retrouvera 17 ans plus tard. Je m’organise et mise tout sur ma fille.
À bas la classe dirigeante
Je m’engage de nouveau à fond sur le plan syndicaliste et milite à la CFDT (3). Je deviens manifestante acharnée, défile dans la rue, participe à tous les meetings et incite mes collègues à s’engager dans le parti. En révolte, je manifeste devant les ministères avec virulence, persuadée que notre société gangrenée doit changer. Je suis contre la classe dirigeante, contre le monde du travail, contre la société, contre, contre, contre tout.
Alors que ma révolte est à son comble, une amie infirmière et son mari rencontrent Dieu. Ils m’invitent à Bordeaux et m’emmènent à un culte. Je suis sensible au message et à la chaleur de l’auditoire, mais sans plus. Une autre collègue témoigne et me présente un pasteur anglais. Il prêche sur la culpabilité et là, je suis très émue. Quelque chose se passe, mais pas la grande révélation.
Changement de cap
En 1998, mes amis de Bordeaux décident de me conduire dans une église à Paris. Je ne se souviens plus du message, mais lorsque le pasteur appelle à donner sa vie à Dieu, je m’effondre à ma place, puis m’avance, entourée de mes amis et de ma fille. Le pasteur prie et j’ai l’impression d’un vase qui se brise et se vide complètement. Aussitôt un nouveau vase se remplit, accompagné d’une forme lumineuse et apaisante qui me bouleverse. À partir de ce moment-là, j’assiste régulièrement au culte.
Mais une fois encore un combat s’installe. Je pars en vacances et, à la rentrée, je fais marche arrière. Puis un samedi soir, je prie cette drôle de prière: «Seigneur, si tu veux que je retourne à l’église, je ne mets pas mon réveil, toi, tu me réveilleras.» Je suis debout bien avant l’heure et retourne à l’église. Mais malgré ma rencontre avec Jésus, ma priorité reste celle de l’engagement politique: à fond les manifs!
Bye bye les camarades
Pourtant, en 2002, lors d’une manifestation pour le pouvoir d’achat, je suis avec des milliers de gens rassemblés, attendant le signal du départ, scandant des chants révolutionnaires. C’est à ce moment-là qu’une voix intérieure me souffle: «Ce n’est plus ton combat, ton combat est ailleurs.»
C’est la première fois que Dieu me parle personnellement. Cette certitude s’imprime à tel point que je laisse tout sur place. Je quitte le cortège le cœur léger, libérée d’un fardeau, une conviction au cœur: devenir un disciple engagé pour la cause de l’Évangile. Au syndicat, certains ont compris, ils ont respecté, d’autre pas.
Dès lors, je témoigne dans mon service, libérée du même coup de ma timidité pour approcher les gens individuellement. Depuis le grand patron en passant par les médecins, chirurgiens, infirmières, aides-soignantes, patients, tous savent que je suis chrétienne.
Nouveau parti!
Plus de révolte. Je ne suis plus contre les hommes politiques. Je vois chacun comme une personne à sauver et je prie pour tous, qu’ils soient de gauche ou de droite. Je ne manifeste plus, je fais simplement grève de temps en temps non plus par révolte mais par solidarité avec mes collègues.
Toujours militante? Oui, mais… au quotidien, incitant mes collègues, non pas à intégrer un parti, mais à changer de vie. Depuis cette fameuse journée de 2002, j’ai la carte du plus beau parti qui existe: le SMPJ, «Sylviane Militante Pour Jésus».