Lorsque nous arrivons dans un groupe de personnes que nous ne connaissons pas, nous allons instinctivement les observer et avoir tendance à nous rapprocher de celles qui nous ressemblent. Cela peut être celles dont les codes vestimentaires nous sont familiers et rassurants, ou dont l’âge est semblable au nôtre. Il arrive même que nous recherchions les personnes qui font environ la même taille que nous !
Des réactions naturelles à contrôler
Comme dit le proverbe : « Qui se ressemble s’assemble. » Cela nous rassure de trouver des personnes qui partagent les mêmes idées, les mêmes valeurs que nous, avec qui on se sent à l’aise. Ainsi, on forme un groupe, une entité, et on se sent plus fort ensemble.
Il suffit de regarder l’émission de télévision Koh-Lanta : les participants sont répartis au hasard dans des équipes. Après la réunification, ils vont rester fidèles à leur équipe d’origine !
Cette réaction naturelle présente aussi des inconvénients. De la même façon que nous allons nous rapprocher de ceux qui nous ressemblent, nous allons nous éloigner de ceux qui sont différents. Il faut faire un effort sur soi-même pour aller vers les autres.
La différence du handicap intellectuel
Cette rencontre peut être une belle surprise. J’ai été embauchée comme directrice d’un IME (Institut Médico-Éducatif) par une association. Les IME accueillent des enfants qui ont un handicap intellectuel, c’est-à-dire qui ont un QI inférieur à la moyenne. Ils bénéficient d’apprentissages adaptés et une bonne partie de ces enfants trouvent du travail une fois adultes.
J’y ai rencontré des enfants de toutes sortes. Selon les cas, ils sont, comme tous les enfants, adorables, casse-pieds, avec du caractère, de l’humour, des angoisses, des problèmes avec leurs frères et sœurs. Certains ont envie de devenir pompier, d’autres cuisinier… En réalité, ce sont avant tout des enfants, tellement attachants, comme tous les enfants.
Bon à savoir
Saviez-vous que les personnes déficientes intellectuelles peuvent avoir un parcours de formation avec un diplôme reconnu par l’Éducation Nationale ? Que des entreprises non spécialisées font le pari d’embaucher ces personnes différentes ? Que les pro¬grammes des candidats à la présidentielle ont été «traduits » en FAcile à Lire et à Comprendre (FALC) pour permettre à tous les citoyens, même déficients intellectuels, de décider pour qui voter ? Une multitude d’actions portent leurs fruits pour inclure les personnes déficientes dans notre société…
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Se rencontrer enrichit chacun
Les lieux de rencontre entre les personnes handicapées et les autres sont peu nombreux. C’est comme s’il existait des circuits parallèles. Il y a, d’une part, sur une route le circuit habituel que tout le monde connait : école, collège, lycée, études supérieures et travail. De l’autre, c’est IME, puis le travail en milieu adapté ou foyer de vie.
Ces chemins parallèles ont eu du sens autrefois, mais aujourd’hui ce système montre ses limites. Comment accueil¬lir les personnes déficientes intellectuelles correctement dans la vie de quartier si leurs bizarreries font peur ? Si leur façon de parler, parfois compliquée à comprendre, agace les gens ? Comment montrer que, malgré leurs difficultés, ils sont comme tout le monde ?
De nombreuses actions à l’IME ont eu pour objectif de créer des lieux de rencontre entre ces enfants avec une déficience et ceux des écoles ou des collèges, sans déficience. Des spectacles ont été montés. Un film a été tourné. Ils se sont affrontés lors de compétitions sportives… tout cela pour qu’en se connaissant mieux, les enfants considèrent normal de vivre les uns à côté des autres.
Rapprocher ces chemins parallèles pour qu’ils n’en fassent qu’un seul est une expérience toujours enrichissante pour tous !
« Les différences ne sont pas censées séparer, aliéner. Nous sommes justement différents afin de comprendre que nous avons besoin les uns des autres. »
Cette phrase de Desmond Tutu(1) doit nous permettre de réfléchir à ce qui nous sépare des autres, ceux qui sont différents de ce groupe vers qui je me tourne naturellement. Quelles sont ces différences auxquelles je suis sensible ? Est-ce une culture différente ? Un handicap visible ? La couleur de la peau ? L’âge de la personne ? La beauté de la personne ? Souvent, la peur de l’autre est ce qui va motiver la séparation de l’autre. De quoi ai-je vraiment peur lorsque je rejette l’autre ? D’un autre côté, il est difficile de reconnaître que l’on a besoin les uns des autres. Je veux bien qu’une personne que j’admire ait besoin de moi. Je peux difficilement imaginer qu’une personne déficiente intellectuelle puisse m’apporter ce dont j’ai besoin…
Est-il possible de reconnaître que chaque être humain peut m’apporter quelque chose ?
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