(Ci-contre, photo de Rosa Parks)
Elles s’appellent Jo Ann Gibson Robinson, Septima Clarke, Ella Jo Baker, Fannie Lou Hamer, ou Rosa Parks… Leurs grands-parents ont été esclaves dans ce grand pays du Nouveau Monde qu’on appelle les États-Unis d’Amérique. Depuis toujours, elles vivent les affres d’une ségrégation qui les empêche, elles et leurs pareils, de vivre libres alors que leur pays a inscrit dans sa constitution le respect des droits de l’être humain. Sa Déclaration des Droits du citoyen (« The Bill of Rights ») le proclame, le serment d’allégeance au drapeau américain (« The Pledge of Allegiance ») le précise : « Je prête allégeance au drapeau des États-Unis d’Amérique et à la République qu’il représente, une nation unie sous l’autorité de Dieu, indivisible, avec la liberté et la justice pour tous. » Et pourtant, leur réalité est toute autre.
Une passion commune
Certaines de ces femmes ont fait des études universitaires, d’autres n’ont pour tout bagage qu’une passion pour la liberté et l’égalité assortie d’une foi chrétienne sans faille et d’un solide bon sens. Mais toutes n’ont qu’un seul but : permettre aux Noirs américains de sortir du statut de sous-hommes auquel les Blancs de leur pays les ont confinés depuis tant d’années.
C’est ainsi que ces femmes seront quelques-unes des chevilles ouvrières du « Mouvement des droits civiques », lorsqu’il surgira aux États-Unis. De presque confidentiel, celui-ci va grandir en quelques décennies et déferler sur le pays comme un tsunami irrépressible.
Un objectif
Regroupées en associations de défense des droits des Noirs américains, elles réfléchissent aux meilleurs moyens de faire pression sur le pouvoir blanc qui les opprime. Leur but avoué est d’obtenir la suppression d’une ségrégation infamante qui les humilie au quotidien, le droit de vote pour les noirs, l’égalité dans l’emploi, un libre accès aux transports en commun et aux lieux publics...
Dans la discrétion
À Montgomery, ville du Sud des États-Unis, elles se sont formées à la non-violence. En 1955, elles préparent avec soin et dans le plus grand secret un boycott des transports en commun. Elles écrivent et ronéotypent des tracts qu’elles donnent à distribuer dans la nuit à des dizaines de jeunes qu’elles ont motivés et formés. Pendant ce temps, les leaders des Églises noires de la ville se réunissent pour trouver un point d’accord et choisir un porte-parole qui se fasse le héraut des revendications de la communauté noire de la ville. Ils choisiront un certain Martin Luther King, jeune pasteur de 26 ans nouvellement arrivé dans les parages. Le boycott va le propulser sur le devant de la scène.
Trop vite oubliées
Ce boycott aura le succès que l’on sait à tel point que l’on en oubliera les femmes qui l’avaient suscité. Et pendant que les hommes se presseront aux tribunes pour faire de grands discours qui électriseront les foules, ces femmes continueront leur lutte contre vents et marées, et militeront au quotidien pour que le mouvement des droits civiques ne fléchisse pas. Elles seront sur tous les fronts, en préparant les manifestations, en participant aux comités d’organisation, en donnant des milliers de coups de téléphone, en tapant des convocations à la machine, en confectionnant des affiches, en distribuant des tracts de porte en porte, en discutant, en persuadant, et en s’activant au maximum pour qu’aucun grain de sable ne grippe la machine.
Sans elles, rien n’aurait pu aboutir !