L'histoire d'un rêve inachevé

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Le 28 août 1963, Martin Luther King prononce son fameux discours. C’est lui que l’Histoire a retenu même s’il n’était pour lui qu’une étape dans son long combat. Fait Prix Nobel de la Paix en 1964, ce Pasteur apôtre de la non-violence a accentué sa lute contre les injustices, les inégalités, la haine… Il l’a payé de sa vie.

Honorer sa mémoire, c’est chercher à prolonger aujourd’hui son discours et son action. Notre monde a plus que jamais besoin d’hommes et de femmes prêts à se battre pour les autres. 

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L'histoire d'un rêve inachevé

Martin Luther King s’inscrit dans une longue tradition de leaders noirs américains. Cependant il a été l’un des premiers à prêcher la résistance non-violente dans les marches de protestations. 

La ségrégation aux États-Unis

En 1896, la Cour Suprême des États-Unis avait rendu un jugement dans lequel elle reconnaissait le principe « séparés mais égaux » : c’est le début de la ségrégation qui durera près d’un siècle. Ainsi, du berceau à la tombe, deux entités se voient interdire de se mélanger, l’une blanche et l’autre noire. Lorsque les Noirs transgressent le principe, une corde suspendue à un arbre est toujours prête à les accueillir. Ils sont de fait des citoyens de seconde zone. 

Au début du 20ème siècle quelques organisations noires apparaissent telles que la NAACP.  Elles espèrent améliorer progressivement la situation sociale et politique des Noirs par des moyens juridiques.

D’autres mouvements plus radicaux s’expriment aussi comme celui animé par Marcus Garvey dans les années vingt qui prône le retour des Noirs américains en Afrique, leur terre d’origine. 

Quant aux Black Muslims , ils prêchent un nationalisme qui se double d’un séparatisme radical. Le Blanc est considéré comme un démon qu’il faut exterminer pour laisser la place aux Musulmans noirs, les élus de Dieu. Malcom X en devient le numéro 2 dans les années cinquante, puis, dès mars 1964, il s’en éloigne pour fonder son propre mouvement, l’Organisation de l’unité afro-américaine , peu avant son assassinat le 21 février 1965. 

La Seconde Guerre mondiale entraîne quelques évolutions. Les soldats noirs ont été accueillis comme des libérateurs partout en Europe. Aussi, lorsqu’ils rentrent aux États-Unis, ils protestent contre la ségrégation. 

Prémices

1949 : Harry Truman impose la déségrégation totale de l’armée américaine. 

1954 : la Cour Suprême ordonne la déségrégation des écoles publiques.

C’est aussi l’année où le pasteur King et sa jeune épouse Coretta déposent leurs valises à Montgomery pour y desservir l’Église baptiste de Dexter Avenue.

1955 : L’affaire Rosa Parks va propulser le jeune pasteur baptiste à la tête du mouvement des droits civiques. 

1957 -1960 : King fonde sa propre organisation (SCLC), voyage, notamment en Inde (sur les traces de Gandhi), poursuit son engagement contre la ségrégation et quitte Montgomery pour devenir co-pasteur  de l’Église baptiste d’Ebenezer aux côtés de son père. Il dit à ses paroissiens en les quittant : « J’en suis venu à la conclusion que je ne peux plus m’arrêter maintenant. L’histoire m’a imposé une responsabilité dont je ne peux me détourner. Je n’ai pas le choix. Il faut que je vous quitte ».

1960 : création d’une nouvelle organisation, composée principalement de jeunes étudiants noirs et blancs et jouant la carte d’un sérieux militantisme. Elle commence par s’attaquer à la ségrégation dans les lieux publics.

1961 : le Congrès pour l’Égalité Raciale (CORE) lance des groupes de « Voyageurs de la liberté », bien décidés à « déségréger » les transports inter-États.

1962 : King mène une campagne d’intégration sur divers plans à Albany dont les résultats seront mitigés, mais dont King et les siens tireront les leçons avant de s‘engager à Birmingham.

1963 : une année particulièrement riche.

King se lance contre Birmingham considérée comme le bastion de la ségrégation et fief de Bull Connor qui se félicite de maintenir les Noirs à leur place. Le gouverneur de l’État d’Alabama, Georges Wallace, le jour de son investiture, a clairement exprimé ses convictions en proclamant ceci : « Ségrégation maintenant, ségrégation demain, ségrégation toujours». King le décrit comme un démagogue, « un marchand de racisme, un démarcheur de la haine déguisée sous le couvert des « droits des États». 

Dans la ville de Birmingham, la ségrégation était appliquée dans toute sa rigueur et sa brutalité, même les églises toutes confessions confondues n’échappaient pas à ce système.

Dans Révolution non violente, King livre une description de la ville : « Si vous aviez séjourné à Birmingham avant le 3 avril 1963, qui marqua le centenaire de l’émancipation des Noirs, vous auriez fait des constatations surprenantes… Les autorités n’avaient apparemment jamais entendu parler d’Abraham Lincoln, de Thomas Jefferson, des droits civiques, du préambule de la Constitution, des treizième, quatorzième et quinzième amendements, ou de la décision de la Cour Suprême des États-Unis condamnant la ségrégation dans les écoles publiques ». En fait, la loi était connue mais jamais appliquée.

La NAACP y était interdite, jugée illégale, sous prétexte qu’il s’agissait d’un mouvement étranger et subversif. Sur 80.000 votants, 10.000 Noirs étaient inscrits.

Le discours de Washington

C’est la campagne de Birmingham qui a posé les bases de la Marche sur Washington. En effet, les Noirs ont voulu profiter du centenaire de l’acte de l’émancipation des Noirs par Abraham Lincoln  pour faire pression sur le gouvernement américain et l’inciter à proclamer le Civil Rights Act.

C’est un succès éclatant : tout le monde se souvient du discours légendaire que prononce M.L.K. à cette occasion : « I have a dream ».

Au terme de cette journée mémorable, les leaders du mouvement sont reçus à la Maison Blanche pour y être félicités par le président John Fitzgerald Kennedy. King voyait en lui un progressiste qui s’attaquerait au cancer de la ségrégation.

Désillusions

Hélas, ce discours ne met pas fin au racisme ni à la pauvreté ; il n’empêche pas non plus les ghettos d’exploser et les partisans de la ségrégation de dynamiter les églises et de brûler des croix. Mais il transforme une manifestation en un événement historique par le rappel des idéaux de justice et d’égalité, par la demande que la couleur de peau ne soit pas un handicap ou un malheur aux États-Unis.

Les mentalités évoluent lentement. Les oppositions sont énormes. Quelques semaines après ce discours, une bombe explose dans une église de Birmingham et tue quatre petites filles noires qui enfilaient leur robe de chœur.

Par ailleurs  le 22 novembre 1963, John F. Kennedy lui-même est assassiné.

En 1964, le président L.B Jonhson signe le Civil Rights Act en présence de King et de quelques autres leaders noirs. C’est l’aboutissement de près de dix ans de combat.

Le monde entier reconnaît et approuve la lutte des Noirs aux États-Unis. Aussi, en décembre King obtient le Prix Nobel de la Paix qui lui confère une stature internationale. Il accepte cette récompense au nom du Mouvement des droits civiques : « J’accepte ce prix au nom de tous les hommes épris de paix et de fraternité.  » À Oslo, il déclare s’être rendu au sommet de la montagne, mais il est conscient qu’il ne peut y rester indéfiniment, il lui faut redescendre dans la vallée « une vallée où des milliers de Noirs sont brutalisés, intimidés, et parfois tués dès qu’ils tentent de s’inscrire sur les listes électorales pour exercer leur droit de vote .» En effet, malgré les avancées obtenues, les Noirs connaissent une extrême pauvreté dans les ghettos du pays. King écrit : ils périssent sur une île solitaire de pauvreté, au milieu d’un vaste océan de prospérité matérielle.

Succès et disgrâce

Consacré « homme de l’année », King fait en janvier 1965 la couverture de l’hebdomadaire Time.

King poursuit inlassablement son combat. Il s’attaque à la ségrégation à St Augustine en Floride, il est arrêté et incarcéré dans la ville qui n’est autre que le bastion du Ku Klux Klan.

1965 : aux côtés d’autres organisations, le jeune Prix Nobel s’engage pour la revalorisation du droit de vote des Noirs. À cette occasion, il conduit notamment une marche baptisée « Marche pour la liberté » (voir encadré) de Selma à Montgomery sur une distance de 110 km. C’est une réussite : 3.000 personnes partent sous la protection de l’armée. Ils sont 30.000 à l’arrivée.

M.L.K prend position contre la guerre du Vietnam. À partir de là, il devient persona non grata à la Maison Blanche.

1968 King dirige une marche de 6.000 personnes en soutien aux éboueurs en grève à Memphis.

Il meurt le 4 avril assassiné sur le balcon du Motel Lorraine à Memphis dans le Tennessee. Ses funérailles ont lieu à Atlanta devant 100.000 personnes.

Auteurs
Eddy NISUS

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Commentaires

Eric Tourneur

19 January 2016, à 14:19

Je pense qu'aujourd'hui, dans un nombre non négligeable de pays (dont la France), le rêve du pasteur Martin Luther King s'est réalisé. En ce qui concerne les Etats-Unis, du chemin reste encore à parcourir (même si le président Obama a été élu) ...

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