La plupart des jeunes que je rencontre en intervention sur l’amour et la sexualité dans les milieux protestants évangéliques ont entendu qu’ils ne devaient pas se masturber.
UN INTERDIT QUI POSE QUESTIONS
Comment et au nom de quoi interdire la masturbation ? Quels fruits cela produit-il ?
Si je leur garantis le secret, leur demandant de fermer les yeux et de lever la main s’ils le font quand même, de timides mais nombreuses mains se lèvent. Un peu plus loin dans mon intervention, je constate que certains n’ont pas envie de se masturber.
Ils expriment aussi parfois de la colère quand ils se rendent compte que ceux qui leur parlent d’interdit n’ont pas été capables de le respecter eux-mêmes à leur âge. Je les entends aussi capables de distinguer la pornographie de la masturbation.
DES CONSÉQUENCES
Si je n’ai jamais rencontré de jeunes qui ont arrêté parce qu’on le leur a dit, j’en vois beaucoup qui se culpabilisent. Leur secret les empêche d’échanger librement sur leur sexualité avec des adultes de confiance. Ils sont ainsi privés d’un soutien nécessaire pour se mettre en chemin.
Pour ces raisons, interdire la masturbation en elle-même ne me semble pas justifié. La sexualité est un apprentissage. C’est difficile, en effet, de devenir maître de son désir et d’être capable d’attendre pour le satisfaire. C’est d’ailleurs la source de nombreux conflits de couple, si le sujet n’a pas été réfléchi avant.
PLAIDOYER POUR UN DISCOURS JUSTE
La masturbation n’est pas du tout la même chose selon qu’elle est accompagnée ou pas de pornographie. C’est cette dernière qui altère nos émotions, la connexion à notre corps, l’estime de soi ainsi que la construction de notre imaginaire érotique et de liberté. Pas forcément la masturbation. Il est utile d’en parler librement.
Si la pornographie conduit à la masturbation, l’inverse n’est pas automatique comme en témoignent l’histoire des individus et celle de l’humanité. À nous d’avoir cette approche pour nous-même et d’être capable de l’exprimer avec bienveillance à ceux qui ont besoin de l’entendre.
Pornographie et masturbation
Un corps qui procure du plaisir
Les enfants commencent l’exploration de leur corps dès le ventre maternel, d’abord involontairement, puis sciemment quand ils ont compris que c’était agréable. Le phénomène s’amplifie à la puberté lorsque les sensations deviennent plus intenses. La plupart des personnes (90 % des hommes et 70 % des femmes) découvrent la sexualité par la masturbation et aucun lien n’a pu être fait à cette heure avec des difficultés sexuelles futures.
Soyons clairs
Onan est un personnage de la Bible qui a donné son nom à l’onanisme, synonyme de masturbation. La Bible rapporte qu’il répandait sa semence au sol à chaque fois qu’il s’accouplait. Contrairement à l’usage de l’époque, il refusait ainsi d’assurer une descendance à son frère défunt. C’est son égoïsme que la Bible juge et non son acte en lui-même.