Quelques mois après ma "guérison", un journaliste de la radio chrétienne La voix de l'Espérance de Florence m'interviewe et me pose la question : "S'agit-il donc, selon toi, d'un miracle ?"
"Non."
Je le sais, ma réponse a choqué, surtout les personnes qui ont prié assidûment pour moi. Non, je ne peux parler de "miracle" au sens propre du terme. Ce que j'ai ressenti était plutôt (et est toujours) une présence discrète de Dieu ; sa main tendue est à l'œuvre, mais aux contours difficiles à définir. Je ne saisis pas clairement la manière dont Dieu s'est manifesté dans ma guérison et y a participé. Je ne peux pas non plus affirmer que mon expérience soit la manifestation éclatante du fait que le Seigneur veut montrer qu'il opère encore avec puissance au sein de son peuple. Je n'arrive pas à concevoir ma guérison comme une "preuve" de son amour et de son intérêt pour moi. Il se peut que je ne sois pas encore tout à fait mûr spirituellement ; il est certain que je n'ai pas tout compris. Mais c'est là ce que je ressens aujourd'hui.
Que le lecteur soit rassuré : je n'ai que trop conscience des deux limites entre lesquelles je me situe. Tout d'abord, il s'agit bien de mon expérience, donc soumise à mon interprétation qui n'aspire pas à être universelle. Deuxièmement, il s'agit bien d'une expérience, c'est-à-dire d'un vécu linéaire, et non pas ponctuel, qui se situe dans le temps : ce vécu est inévitablement interprété et réinterprété a posteriori, car on y entre d'une certaine manière et on en sort changé. Il est toujours difficile d'exprimer avec des mots un processus qui est encore en devenir. Mon effort se veut une tentative de véhiculer ce que je ressens au niveau cognitif, émotionnel et spirituel, tout en étant conscient des limites de ce témoignage.
Silence de Dieu
En tant que chrétien, je crois que le premier écueil sur lequel on pourrait faire naufrage est celui du silence de Dieu. Bien évidemment, ma femme et moi nous sommes posés des questions. Mais ce "silence" n'a pas été vécu de la même manière par nous deux. Cette différence dans la manière de vivre "l'absence" de Dieu a sans doute été le lieu où nous avons pu grandir et dialoguer. Ce vide demandait à être rempli par des émotions, des paroles, des invocations. Ma femme a, bien sûr, réagi comme je l'aurais fait à sa place : un drame total. En ce qui me concerne, je me sentais plus calme. Je ressentais la nécessité et la responsabilité de rassurer mes proches, ce qui m'amenait à minimiser la gravité de la situation. Je ne voulais pas couler émotionnellement pour ne pas entraîner avec moi ceux qui m'entouraient. La sérénité dont je jouissais n'était pas feinte ni artificielle. Elle était plutôt ancrée dans une foi précise : Dieu m'aime et il n'est pas responsable.
Mais aujourd'hui je peux avouer qu'il s'agissait d'une foi fataliste. Mon Dieu était bon, bien sûr ; il n'était pas responsable du mal ; il n'avait pas à produire de "preuves" pour manifester son amour ; mais il était aussi et inévitablement lointain.......