En 2011, en vue de l’élection présidentielle de l’année suivante, la candidate Éva Joly a publié un vidéoclip intitulé « La France résonne de tous les accents du monde(1) » que j’invite à visionner. Je précise que je n’ai pas nécessairement voté pour Éva Joly lors du premier tour de cette élection.
On y découvre un bel exemple d’intégration : des accents différents sont compatibles avec une langue commune, le français en l’occurrence. En théorie, tous les accents sont acceptés en France, même si, dans les faits, des personnes ayant tel ou tel accent peuvent être victimes de discrimination. Pourquoi ? Parce que l’accent des autres semble étrange, voire étranger, parce que l’on pense souvent ne pas avoir soi-même d’accent !
I. Qu'est-ce que l'intégration ?
Le mot « intégration » est utilisé dans les domaines de la sociologie et de la politique. En voici une définition :
« L'intégration consiste à susciter la participation active à la société tout entière de l'ensemble des femmes et des hommes appelés à vivre durablement sur notre sol en acceptant sans arrière-pensée que subsistent des spécificités notamment culturelles, mais en mettant l'accent sur les ressemblances et les convergences dans l'égalité des droits et des devoirs, afin d'assurer la cohésion de notre tissu social(2). »
De cette définition, je souligne trois aspects. D’abord, l'intégration, c'est l'affaire de tous, pas seulement des nouveaux venus ou des immigrés. Ensuite, l’intégration implique une tension entre, d'une part, une égalité légale de droits et de devoirs et, d’autre part, des différences culturelles. Enfin, l'intégration a pour but la cohésion sociale.
L'intégration constitue un modèle de société, une manière de vivre ensemble, parmi d’autres. Il s'oppose à deux autres modèles : l'assimilation d'une part (au sens d’une uniformisation culturelle), le communautarisme d'autre part (au sens de revendications de groupes culturels ou politiques particuliers remettant en cause l'égalité de droits et de devoirs).
Le concept d'intégration est porteur d’une originalité, absente des deux autres modèles : il s'agit d'un processus bilatéral. Un processus implique des paliers ou des degrés dans l’intégration, qui ne se fait donc pas du jour au lendemain, mais demande du temps. Un processus bilatéral, c’est-à-dire que si les nouveaux venus doivent faire leur part pour s'intégrer dans un pays, la société et les autochtones doivent également faire leur part pour intégrer les nouveaux. Selon le modèle de l'assimilation, les nouveaux venus seuls doivent s'adapter au groupe ; selon le modèle communautariste, la société dans son ensemble doit accepter des groupes particuliers, voire très particuliers…
Ces réflexions sur les modèles d’« intégration », d’« assimilation » ou de « communautarisme » dans un pays invitent à s’interroger sur les Églises : fonctionnent-elles, en théorie ou de fait, plutôt selon le modèle de l'assimilation, du communautarisme ou de l'intégration ?
II. Fondements bibliques de l'intégration+
Le mot « intégration » n'est pas présent en grec ou en hébreu dans les Écritures. Mais le Nouveau Testament a beaucoup à dire sur le vivre-ensemble au sein de l'Église. En fait, la vocation et la nature de l'Église surpassent le modèle de l'intégration, et j’en parlerai comme une ...