Dans l’édito précédent, j’évoquais la problématique du pasteur et du manque de temps. Du pasteur trop « occupé » (c’est-à-dire vaniteux et paresseux !) pour être véritablement pasteur. J’aimerais pousser plus loin mes réflexions dans ce domaine.
Plus je réfléchis à cette question, moins je pense que l’alternative à l’agenda surbooké du pasteur soit l’agenda « à trous », cet emploi du temps maitrisé et aux limites bien posées qui laisse du temps libre. Je ne pense pas non plus que ce soit l’agenda qui sanctuarise des temps en famille, des nuits de repos de huit heures, ou des vacances suffisamment longues. Non. Pourtant, toutes ces manières de faire sont excellentes, importantes et recommandables. Elles sont même indispensables en vue d’un ministère stable, performant et durable. Mais ce ne sont pas elles, en elles-mêmes, qui règleront le problème évoqué plus haut. En effet, ne confondons pas tout : ce qui se trouve dans l’agenda trop chargé du pasteur n’est pas une maladie, mais un symptôme. Or, on ne guérit pas une maladie en retirant ses symptômes. On ne cesse pas d’être vaniteux et paresseux avec une gomme ou du blanco…
Vous l’aurez compris, l’alternative la plus juste, saine et sage, est donc d’aller se confronter à la maladie elle-même. Pour faire simple, je dirai que celle-ci est liée à « l’âme du pasteur ». C’est bien elle qui doit bénéficier de toute son attention.
Ainsi, prendre du temps à part pour nourrir sa vie de prière et pour se ressourcer spirituellement est une nécessité, voire une obligation. Je ne peux donc que recommander, à chaque pasteur, de prendre le temps quotidien de la méditation de la Parole et de la prière. En un sens, cela va de soi. Je ne peux également que recommander chaudement, aux pasteurs comme aux chrétiens engagés, des temps de retraites spirituelles. Ceux-ci sont toujours bénéfiques au ministère. Toujours surprenants, toujours occasions de ressourcement. Finalement, je peux témoigner du bienfait d’être soi-même accompagné spirituellement par une personne de confiance.
Mais, en même temps, j’aimerais aussi mettre le doigt sur le fait que, prendre soin de son âme, n’est pas nécessairement un temps de « confort » ponctuel. Ce que je veux dire, c’est que le temps occupé par le soin apporté à son âme ne doit pas toujours et nécessairement être un temps « à part », un temps lors duquel nous pouvons nous (re)centrer sur nous-mêmes, porter attention à nos besoins spirituels hors du tumulte du ministère et des demandes incessantes. Ce que j’essaie d’expérimenter dans mon propre ministère, c’est l’apprentissage d’une autre logique, complémentaire. L’apprentissage d’une communication continuelle entre mon âme et son berger. D’une réceptivité perpétuelle quant au soin de Dieu pour mon âme. De son accompagnement constant, lui, le seul vrai pasteur. Du coup, mon but (celui vers lequel je tends sans l’avoir encore atteint !) est d’être présent à Dieu et d’incliner mon âme vers lui à chaque instant, que ces temps soient mis spécifiquement à part ou qu’ils soient « occupés » par le travail, les visites, la prédication, les réunions, la famille et le repos…
Finalement, c’est quand j’oublie de vivre cela que le ministère devient oppressant et que je me sens « débordé ». Mais dans la présence de mon Dieu, à son écoute et à sa suite, combien le fardeau devient léger ! Et combien je suis disposé à être moi-même un véritable pasteur…