On m’a enseigné très jeune la notion de Dieu mais je dois dire qu’on m’avait plus appris à avoir peur de lui qu’à l’aimer.
À 16 ans, des réactions méningées m’ont conduit à l’hôpital. J’ai cru que j’allais mourir. Comme je tenais à vivre, j’ai crié à Dieu: «Si tu existes, sors-moi de là!». C’est le premier marché que j’ai fait avec Dieu. Dieu l’a entendu puisqu’il m’a permis de sortir de l’hôpital sans aucune séquelle. Malheureusement, je n’ai pas tenu ma parole; j’ai continué à vivre une existence mouvementée, à courir les jupons, à entretenir des sentiments impurs.
Trois mois plus tard, j’ai fichu en l’air une voiture que j’avais conduite sans permis. J’aurais pu y laisser ma vie. J’ai alors réalisé que c’était le Seigneur qui m’attendait au tournant. Quand on fait un vœu, il faut l’accomplir. J’ai vécu une espèce de conversion à cette époque, mais avec le recul, je me rends compte qu’elle était plutôt cérébrale.
Aujourd’hui, je constate que dans son amour pour moi, Dieu m’a préservé en me faisant très vite connaître Annick, celle qui allait devenir ma femme quatre années plus tard. Chose incroyable quand je vois mon comportement de l’époque: je lui ai été fidèle depuis notre mariage, malgré les hauts et les bas. Pourtant, tout est loin d’avoir été rose.
Et de un
Comme je n’avais pas bien travaillé à l’école, je me suis retrouvé avec un seul diplôme: celui de dessinateur projecteur. Je n’avais aucune possibilité d’évoluer dans mon travail et je m’en plaignais. Quelqu’un m’a dit un jour de confier cela à Dieu. Moi, je pensais que ce n’était pas la peine puisque je récoltais ce que j’avais semé. J’ai quand même fini par accepter de prier et j’en ai vu très vite les conséquences. Figurez-vous que je suis devenu chef de service dans mon entreprise. Je me souviendrai toujours de la parole de mon patron d’alors: «Aux autres, j’aurais dit non, mais à vous je dis oui». Contre toute attente, Dieu m’avait répondu.
Hélas, le travail a fini par prendre toute la place dans ma vie. Je rentrais très tard chez moi pour manger devant la télévision et ensuite aller me coucher; j’étais rarement là le week-end. Je n’ai pas vu grandir nos trois premiers enfants. Mon épouse était en colère et a «disjoncté». Nous avons vécu là une première crise très sérieuse dans notre vie de couple. J’ai dû prendre conscience de mes égarements et de mes manquements. J’ai pleuré sur mon état et j’ai décidé, avec l’aide de Dieu, de consacrer plus de temps à ma famille.
Aussi étrange que cela puisse paraître, je dis que Dieu m’a aidé à tenir cet engagement par le fait que l’entreprise dans laquelle je travaillais a déposé le bilan. Je pouvais donc plus facilement repartir à zéro. De façon providentielle, Dieu m’a alors conduit à créer ma propre entreprise. Nous n’étions pas riches et pourtant, nous avons pu rassembler l’argent nécessaire. C’était la main de Dieu. Au fur et à mesure, le Seigneur m’a montré par plusieurs signes sa volonté. Cela a été pour moi une école de foi. J’ai compris que Dieu s’intéressait à tous les aspects de ma vie, y compris professionnels.
Et de deux
Hélas, des montagnes d’incompréhension se sont progressivement interposées entre mon épouse et moi. Nous avions mis notre maison à disposition pour permettre à une église de s’y rassembler, mais voilà que quelques années plus tard, cette église était en train de se diviser par notre faute à tous les deux. Nous avons dû confier cette église à quelqu’un d’autre et la quitter pendant plusieurs années.
Annick avait de son côté besoin de guérir de blessures de son passé. Il lui fallait renoncer à projeter sur moi les frustrations que son père alcoolique avait générées en elle depuis son enfance. Elle a vécu une demande de pardon qui l’a libérée. De mon côté, il m’a fallu admettre que j’avais un caractère autoritaire. Je n’étais pas au service du bien de mon épouse. J’ai compris que la femme n’est pas inférieure à l’homme mais en quelque sorte son intérieur comme je l’avais entendu dire. Si je voulais vraiment exercer mes responsabilités, ce devait être pour la protéger, pas pour la dominer.
À nous trois!
Depuis cette crise, nous prions désormais à deux pour l’entreprise. Nous partageons beaucoup ensemble. Dieu nous a montré qu’il était impliqué dans cette affaire. Nous sommes à son écoute et je sais que Dieu me parle aussi à travers ma femme. J’ai également repris des responsabilités dans mon église.
Cerise sur le gâteau: alors que je m’étais fâché avec plusieurs de nos enfants, nous avons pu nous réconcilier. J’ai la joie de les voir marcher chacun avec Dieu.
Je ne sais pas quel est mon avenir personnel ni celui de mon entreprise. Tout est entre les mains de Dieu
----------------------------------------------------------------
++ Trois questions à Jean-Pierre Cauhapé ++
Quel est votre regard sur la crise économique?
Je pense qu’elle peut déboucher sur une prise de conscience salutaire. Grâce à elle, les hommes vont se rendre compte qu’ils font fausse route.
J’aime tout particulièrement ce texte de la Bible (Hébreux 12.26-28): «Autrefois, la voix de Dieu a fait trembler la terre. Aujourd’hui, Dieu nous fait cette promesse: “Encore une fois, je ferai trembler non seulement la terre mais aussi le ciel.” Les mots “encore une fois” annoncent ceci: les choses créées, qui peuvent être bouleversées, disparaîtront. Ainsi, les choses qui ne peuvent pas être bouleversées continueront à exister. Nous, nous recevons un royaume que personne ne peut faire bouger. Alors remercions Dieu et servons–le d’une façon qui lui plaise, avec confiance et respect.»
Pensez-vous qu’une entreprise gérée par un chrétien devrait échapper aux conséquences de la crise?
Tout d’abord, je dirai qu’ici comme ailleurs, il faut veiller aux fondations. Il ne suffit pas non plus de se dire chrétien pour être conduit par Dieu.
Ensuite, je ne peux que témoigner de ce que j’ai vécu. En fait, j’ai beaucoup appris de mes échecs. Ils font partie de ma réussite. Aujourd’hui, je devrais être normalement très inquiet puisque je n’ai plus de commande au-delà de quelques mois. Si rien ne change, je n’aurai donc bientôt plus de travail à donner à mes ouvriers. Comme je sais que c’est l’affaire de Dieu, je ne m’inquiète pas. Si mon entreprise doit cesser ou être confiée à quelqu’un d’autre, c’est que Dieu a quelque chose d’autre en vue. J’essaie d’être à son écoute.
Une telle entreprise a-t-elle quelque chose de plus qu’une autre?
Je parlerai ici de «valeur ajoutée». Plusieurs fois, j’ai été amené à réaliser des choses que je n’ai pas toujours comprises au moment même. Il m’est arrivé aussi de partager mes soucis avec mes employés et d’inviter ceux qui le souhaitaient à prier avec moi. Certains l’ont fait, à leur manière. Et le plus beau de tout, c’est que Dieu a répondu. Je pourrais aussi citer le cas de ce SDF accueilli et logé par une famille de l’Église et à qui j’ai pu donner du travail. J’avoue qu’aimer ses employés alors qu’on les paie pour un travail est très difficile. Pour moi, c’est clair, il n’y a pas de distinction à faire entre le monde spirituel et celui du travail. Notre vie spirituelle doit aller beaucoup plus loin que le dimanche; il faut aimer son travail et le confier à Dieu quand ça ne va pas. Il peut changer les situations.
----------------------------------------------------------------
Jean-Pierre Cauhapé est également vice-président pour la France de l’ICCC la «Chambre de Commerce Chrétienne Internationale» qui veut être une référence dans les domaines de l’économie et la politique. Sa vocation est d'établir des bases bibliques dans l’économie et la politique du pays, par un changement de comportement dans les relations d’affaires et les promesses politiques des leaders du pays. Pour plus de renseignements: www.iccc-france.org
----------------------------------------------------------------