Argent, l’envers de la médaille

Complet Réflexion

Beaucoup de dictons populaires abordent le thème de l’argent. La Bible en parle également mais ne propose pas de modèle économique, préférant placer l’homme face à ses responsabilités. Gérer ses biens en fait partie.

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Argent, l’envers de la médaille

Les récits bibliques attestent de l’adaptation permanente du peuple de Dieu à l’évolution des systèmes. Ils critiquent aussi les dérives de chacun d’eux.

Pas de système idéal

La Bible n’encourage ni l’autarcie ni le troc. Contrairement à ce que nous imaginons trop facilement, ceux-ci ne constituent pas une vraie solution aux problèmes posés par l’argent. En effet, l’autarcie nie la solidarité humaine et le besoin que nous avons les uns des autres. Quant au troc, il se heurte tout de suite à ses propres limites: «j’ai besoin de ce que tu as, mais tu n’as aucun besoin de ce que j’ai.» Les limites de l’autarcie et du troc engendrent de la frustration et donc de la violence: «je prends de force ce que tu as et que nous ne pouvons échanger».

Du bon usage de la monnaie

Alors, l’homme «invente la monnaie»; elle permet un troc indirect. À la base, elle est un bien non consommable permettant des échanges complexes, différenciés dans le temps et dans l’espace. La monnaie va entraîner l’invention du travail dans le but de faire commerce. Dans une perspective résolument optimiste, elle facilite et apaise les relations humaines. L’évangile de Jean précise paisiblement que Jésus se reposait pendant que les disciples étaient partis à la ville acheter des vivres. Un peu plus loin, Jésus interroge Philippe: « Où achèterons-nous des pains pour que ces gens aient à manger? » C’est la démarche normale! Quant à l’apôtre Paul, il considère comme légitime l’activité économique du marché de Corinthe (1).

La Bible reconnaît la fonction «facilitante» de la monnaie. Elle est même encouragée dans le livre du Deutéronome (2). En effet, les fêtes annuelles d’Israël se concentraient toutes au sanctuaire, où on apportait à Dieu ses offrandes et où avaient lieu les sacrifices. Comme ce lieu pouvait être situé très loin du domicile, la loi prévoyait qu’on pouvait convertir les animaux et les denrées en monnaie. Arrivé au sanctuaire avec son argent, le pèlerin n’avait plus qu’à acheter les biens dont il avait besoin (animaux, végétaux, vin...) pour célébrer la fête. Cette disposition suppose aussi l’installation d’un commerce: il fallait qu’il y ait des vendeurs potentiels au sanctuaire.

Dérives possibles

Hélas, cette législation va dériver vers des excès que Jésus dénoncera violemment en s’en prenant aux marchands du temple (3). Son attaque met en évidence que le système n’est pas aussi beau qu’une vision optimiste le souhaiterait. Le péché, comme puissance de destruction de la vie, s’est aussi largement insinué dans le rapport des hommes à l’argent. Il l’a perverti; la Bible le souligne.

Nous avons pris soin de distinguer le terme de «monnaie» quand il s’agit d’évoquer la fonction indispensable aux échanges, et celui d’«argent » pour signifier ses ambiguïtés et ses dangers. L’apôtre Paul résume fort bien la situation en écrivant: « L’amour de l’argent est la racine de tous les maux. » (4)

Le commerce engendre l’enrichissement de quelques-uns uns par la possession de monnaie ou la capacité à en mobiliser. L’argent, c’est-à-dire la puissance économique, devient alors un symbole de pouvoir, de réussite et de sécurité. Nous sommes sur la voie de l’idolâtrie, donc de souffrances et d’injustices. Le prophétisme biblique va constamment dénoncer ces perversions.

Parmi les critiques classiques, notons celle de l’exploitation des ouvriers et le refus de leur juste rémunération (5). Pour sa part, Jésus dénonce aussi ceux qui s’emparent des maisons des plus faibles (6).

Un très mauvais maître

L’argent est présenté comme une puissance qui cherche à exercer son action destructrice sur chaque humain. Jésus ira jusqu’à le personnaliser en lui donnant un nom: Mammon. Cette personnalisation montre que nous sommes face à l’un des masques souriants du mal, à l’une de ces «puissances» spirituelles mauvaises. Celui qui possède de l’argent peut se retrouver possédé par lui! Le croyant est appelé à combattre cette puissance pour que la vérité du Christ soit vraiment effective en lui.

Et pourtant!

L’or était intimement associé au culte rendu à Dieu dans la construction du sanctuaire d’autrefois ainsi que dans l’hommage des mages à Jésus enfant (7). Il est présent également dans la Cité Nouvelle de l’Apocalypse. Cette profusion d’or n’est pas une ultime victoire de la puissance mauvaise. Car ce n’est pas sa puissance qui est mise en avant dans ces cas mais son inaltérabilité et son «inoxydabilité». Il est ici un symbole du Dieu qui ne change pas.

Si la «monnaie» permet la vie solidaire et ses échanges, et si «l’argent» constitue une tentation pernicieuse, sournoise et destructrice, l’Évangile de Jésus-Christ est la puissance de Dieu capable de nous rétablir et de nous maintenir dans un rapport juste à cette puissance. Un exemple? Zachée. Après avoir rencontré Jésus, il propose de donner la moitié de ses biens aux pauvres et de rendre au quadruple ce qu’il avait volé.

Malheureusement, tout n’est pas aussi simple: c’est parce qu’ils ont été séduits par l’argent qu’Ananias et Saphira, pourtant chrétiens, ont un jour menti à Dieu, et sans doute à eux-mêmes (8). Le combat n’est jamais gagné d’avance.

Au lieu de mépriser l’argent, Paul nous invite à l’utiliser pour être solidaire et aider (9). Par sa générosité, le chrétien montre que c’est Jésus-Christ qui est le maître de sa vie. Il atteste ainsi également de la liberté qu’il a reçue de Christ.

Auteurs
Richard GELIN

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