- En principe, le détenu est quelqu’un qui est puni par la société pour une faute qu’il a commise. Il n’est pas question de pardon. Or, vous lui dites que Dieu, lui, pardonne. Comment ce détenu peut-il s’y retrouver ?
- Le détenu purge sa peine, mais Dieu ne l’en aime pas moins, et tel qu’il est. Il a une possibilité de changer, parce que Dieu a le pouvoir de transformer son cœur. Dieu est là, dans la solitude de sa cellule, dans sa solitude morale. Il l’aime : la meilleure preuve, c’est qu’il envoie un homme qui n’est pas meilleur que lui pour l’assurer de sa présence. Si je ne m’étais pas converti, et si Dieu n’avait pas conduit et inspiré ce groupe de l’Armée du Salut que j’ai rencontré un 1er novembre, j’aurais vraisemblablement fini moi aussi reclus dans une cellule de prison.
La Bible dit vrai quand elle nous met en garde en ces termes sous la plume de l’apôtre Paul : « Que celui qui est debout prenne garde de tomber »(1). Bien des gens n’ont pas tué ni volé parce qu’ils n’ont jamais eu le courage d’aller jusqu’au bout de leur pensée, ou parce que leurs actes n’ont pas toujours été mis en lumière ! La Bible nous dit que tout homme est pécheur et privé de la gloire de Dieu(2), c’est une vérité fondamentale. On a l’habitude de véhiculer une vision trop simpliste du péché. Le péché consiste à ne plus être en communion avec Dieu, c’est clair et net, mais la Bible nous apprend aussi que le Christ est mort pour le péché des hommes, quelque nom que l’on donne à ce péché. Je reste le même, mais je suis couvert par la grâce de Dieu, et ce que j’ai pu faire, dire, ou être en bien, je n’ai pu le réaliser qu’en raison de ces moments matinaux pendant lesquels je remets ma journée entre les mains de Dieu.
Ce que je demande à Dieu - chacun peut aussi le lui demander pour soi-même - c’est d’être gardé et préservé de tout mal, parce que personne n’est à l’abri des tentations et des chutes. Ce retour aux sources, à l’Évangile, autrement dit à la grâce de Dieu, me permet jour après jour d’être ce que je suis aujourd’hui. C’est ce message que je transmets, même à des personnalités !
J’ai eu l’insigne honneur d’être distingué de la République, puisque j’ai été décoré deux fois, en tant que Chevalier et comme Officier dans l’Ordre National du Mérite en raison du travail social que j’accomplis. La première fois, c’était à Lyon - j’étais décoré par Monsieur Raymond Barre, premier ministre à l’époque. Il y avait quelque six cents personnes, et je leur ai tenu à peu près le même discours que je viens de vous laisser. J’ai précisé que la personne qui méritait la décoration que je portais, c’était cette petite officière qui avait été à l’origine de ma conversion, et qui avait su m’accepter tel que j’étais, me comprendre, sans me faire des prêchi-prêcha, alors que je puais le pastis. Ses paroles se résumaient à ces simples mots : « Le Seigneur t’aime et il peut changer ta vie. » Personne ne peut savoir ce que je serais devenu si je ne l’avais pas rencontrée.