Placer l’étude de la Bible au cœur de la vie de l’Église locale
Faut-il supprimer l’étude biblique du programme de l’Église ?
Réunion du conseil. À l’ordre du jour : « Faut-il supprimer l’étude biblique du programme de l’Église ? » La question est légitime. L’étude biblique du mardi soir réunit en moyenne cinq ou six fidèles. Or, sa préparation demande beaucoup de temps ; et le temps est précieux ! Ne serait-ce pas dans l’intérêt de tous que le pasteur se consacre plutôt à des activités plus « rentables » ?
Une réponse pragmatique à ces interrogations a conduit un certain nombre d’Églises évangéliques — dont la mienne — à abandonner la traditionnelle étude biblique. Non pas que nous serions convaincus de l’aridité de celle-ci, mais bien parce que nous ne pouvons que constater sa désertification. Mais plutôt que de se faire à cette idée, nous pourrions essayer d’en comprendre les raisons. Nos membres d’Églises sont-ils si peu intéressés par l’étude de la Bible ? Est-ce là réellement le cœur du problème ? N’y aurait-il pas d’autres formes ou d’autres lieux possibles pour l’étude de la Bible en groupe ?
1°) Principes bibliques pour une étude de la Bible dans l’Église
Avant de voir comment replacer l’étude de la Bible au cœur de la vie d’Église, posons-nous la question du pourquoi. Est-il si important de se réunir entre chrétiens pour étudier la Bible ensemble ? L’étude personnelle ne suffit-elle pas ?
La Bible n’aborde pas directement la question qui nous intéresse. En fait, le rapport entre lecture personnelle et lecture communautaire de la Bible est une problématique moderne. Nous oublions bien souvent que pouvoir lire la Bible à la maison est un privilège récent dans l’histoire. Avant la démocratisation de l’imprimerie, posséder sa propre copie de l’Écriture Sainte était un luxe réservé aux très riches. De plus, si aujourd’hui la plupart des Français savent lire(2) , l’illettrisme a plus souvent été la norme et il est encore très fréquent dans certains pays moins privilégiés. Par conséquent, on comprendra facilement qu’aux temps bibliques, la lecture de l’Écriture était avant tout une pratique communautaire(3).
Au-delà des raisons pratiques qui restreignaient de fait la lecture biblique au contexte du Temple ou de la synagogue, plusieurs données suggèrent l’importance d’une lecture communautaire.
Seule une lecture communautaire peut produire une réponse communautaire : la place de la lecture publique dans le cadre de l’alliance
Deutéronome 31.10-13 prévoit une lecture publique de l’ensemble de la Loi « devant tout Israël » tous les sept ans, à l’occasion de la fête des cabanes(4). Cette lecture solennelle devait avoir pour effet d’encourager les israélites à « mettre en pratique toutes les paroles de cette loi », génération après génération (Dt 31.12-13) et ainsi garantir le maintien de l’alliance (cf. Dt 31.24-27). Quatre épisodes de l’Ancien Testament nous présentent une lecture publique de la Loi « devant tout le peuple » :
- Lorsque Dieu veut conclure une alliance avec Israël au Sinaï et que Moïse lit au peuple le « livre de l’alliance » (Ex 24.7).
- Juste après l’entrée en Canaan, sur le Mont Ébal, lorsque Josué lit le livre de la Loi afin de rappeler au peuple ses obligations liées à l’alliance du Sinaï(5) (Jos 8.34-35).
- Lorsque le roi Josias « redécouvre » le livre de la loi et en fait lecture au Temple devant « tout le peuple » (2 R 23.1-3).
- Après le retour d’exil, lorsque la muraille a été reconstruite et que « tout le peuple » se rassemble pour écouter la lecture du livre de la Loi, sous la conduite d’Esdras et des prêtres (Né 8-9).
Dans trois de ces cas, la lecture publique de l’Écriture est suivie d’une réponse collective de la part de ses auditeurs :
- Au Sinaï, le peuple s’engage à « faire tout ce que le Seigneur a dit » et accepte donc l’alliance qui lui est proposée (Ex 24.7).
- Le roi Josias conclut une alliance avec le Seigneur, et « tout le peuple y adhère » (2 R 23.3).
- Dans les chapitres 8 et 9 de Néhémie, les lectures publiques de la Loi produisent une véritable repentance collective (cf. 2 Ch 7.14).
Dans le cadre de l’alliance avec Israël, la Loi (appelée « livre de l’alliance » dans Ex 24.7 et 2 R 23.2) sert de « témoin » (Dt 31.26) puisqu’elle rappelle les stipulations de l’alliance. Or, l’alliance conclue au Sinaï est une alliance conclue avec un peuple : elle a donc une forte dimension collective. C’est ensemble que les israélites doivent s’engager à obéir à ses principes, ou se repentir d’y avoir désobéi. On comprend alors la nécessité d’une lecture publique des termes de l’alliance : seule une lecture communautaire peut produire une réponse communautaire.
La nouvelle alliance dont nous sommes bénéficiaires a certes une dimension plus personnelle, puisque la Loi est désormais « écrite dans le cœur » de chaque individu (Jr 31.33-34). Cependant, la dimension collective n’est pas absente de l’alliance scellée par le sang du Christ : celle-ci fait de nous les membres d’un seul corps. Il n’est pas anodin que la Cène par laquelle nous rappelons « la nouvelle alliance » soit une réponse communautaire à la Parole de Dieu (cf. 1 Co 11.17-34). Cela suggère que notre Seigneur ne désire pas seulement une adhésion personnelle à sa Parole, mais qu’il prend plaisir à voir son peuple s’unir pour accueillir ensemble cette Parole et lui répondre ensemble.
L’Église comme lieu d’enseignement
Un autre aspect important est à noter quant à l’étude de l’Écriture dans l’Église : la Bible réserve la fonction d’enseignant à certains membres du peuple de Dieu. Dès l’époque de Moïse, Dieu prévoit des hommes pour transmettre sa Loi : les lévites reçoivent la responsabilité « d’enseigner la Loi à Israël » (Lv 10.11 ; Dt 33.10 ; cf. Dt 31.9 ; Né 8.7). Il semble même que cette tâche soit un aspect important de « l’alliance » que Dieu a faite « avec les lévites » (Ml 2.4-8)(6).
Le ministère d’enseignant s’est largement développé au sein du judaïsme intertestamentaire, dépassant le cadre du sacerdoce lévitique pour occuper une place de choix au sein de la synagogue. Les Évangiles présentent largement Jésus comme un enseignant qui s’entoure de « disciples » et le maître ne refuse pas le titre de « rabbi » ou de « didascalos » (par ex. Jn 3.2 ; 13.13). En tant que chrétiens, nous avons en Jésus notre enseignant suprême, celui qui est « parole faite chair » (Jn 1.14).
On pourrait penser que le ministère d’enseignant n’a plus lieu d’être après la Pentecôte, puisque le Saint-Esprit est celui qui « vient enseigner toutes choses » (Jn 14.26) et nous donner « la pensée du Christ » (1 Co 2.16). Pourtant, c’est plutôt l’inverse : dans l’Église du Nouveau Testament, le ministère « d’enseignant » a toute sa place(7) ! L’enseignement du Saint-Esprit ne s’effectue pas seulement en « ligne directe », mais aussi par le biais d’autres croyants qui reçoivent la charge particulière de l’enseignement. Ceux-ci doivent y consacrer du temps et de l’énergie (Ac 6.4 ; 1 Tm 4.13 ; 5.17 ; 2 Tm 2.1-7) car la fonction d’enseignant est une lourde responsabilité (1 Tm 4.6, Jc 3.1) : il en va même du salut de ses auditeurs (1 Tm 4.16) ! Si donc le Saint-Esprit vient « illuminer » notre intelligence pour nous permettre de comprendre l’Écriture (2 Co 3.13-18), il le fait aussi à travers certains de ses serviteurs, comme Paul et Timothée qui se désignent eux-mêmes « ministres d’une nouvelle alliance » (2 Co 3.1-6).
Si notre Dieu a choisi d’utiliser des enseignants pour instruire, affermir et éviter aux croyants d’être « ballottés par tout vent de doctrine » (Ép 4.14), c’est bien parce que l’enseignement a toute son importance dans la vie de l’Église ! Dans la liste d’Actes 2.42-47, se mettre à l’école de « l’enseignement des apôtres » est la première activité régulière de l’Église d’après-Pentecôte. L’étude des Écritures occupait certainement une place de choix dans l’enseignement apostolique. Lorsque Paul écrit à des Églises composées en grande partie de chrétiens d’origine païenne, il cite largement les Écritures juives et n’hésite pas à développer des interprétations bibliques parfois complexes (cf. par ex. Ga 4.21-31). Or, ces croyants n’étaient pas tous allés à l’école et ne connaissaient rien à l’Écriture avant leur conversion. Ils devaient donc avoir reçu un enseignement scripturaire assez poussé au sein de l’Église(8). Ne devrions-nous pas avoir le désir de mettre la barre au moins aussi haute dans nos objectifs de formation biblique au sein de nos Églises qui sont composées de personnes bien plus éduquées que la plupart des premiers chrétiens ?
Tous enseignants ?
Si seuls certains sont appelés au ministère d’enseignant, il faut tout de même noter que plusieurs passages suggèrent que, dans l’idéal, tous les croyants devraient devenir à leurs tours capables d’enseigner leurs frères et sœurs. C’est ce que l’auteur de l’épître aux Hébreux reproche à ses lecteurs : « Vous devriez depuis longtemps être des enseignants (gr. didaskaloi), pourtant vous en êtes encore à avoir besoin qu’on vous enseigne le B.A.-BA des paroles de Dieu » (Hé 5.12 ; cf. Rm 15.14 ; Col 3.16) ! C’est aussi, me semble-t-il, la perspective de l’Évangile de Matthieu qui se termine avec l’ordre donné aux « disciples » de « faire des disciples », « en leur enseignant » la loi du Christ (Mt 28.16-20) : les disciples sont appelés à devenir à leur tour « enseignants » pour d’autres disciples, et ainsi de suite. Avons-nous, en tant qu’enseignants, l’objectif de faire de tous ceux qui composent notre Église, des hommes et des femmes capables de transmettre à leur tour un enseignement (cf. aussi 2 Tm 2.2) ?
Mais, plus que cela, sommes-nous capables de nous laisser enseigner par notre frère ou notre sœur ? Le Saint-Esprit est celui qui produit en nous la capacité de « contempler la gloire du Seigneur » à travers les Écritures que nous lisons à « visage dévoilé » (2 Co 3.14-18). Mais, cette « illumination » — pour reprendre le langage des réformateurs — n’est pas réservée aux seuls enseignants en titre : elle est le privilège de « nous tous » (v. 18) ! L’Église est le lieu où l’Écriture peut être discutée entre des croyants qui sont tous habités par le même Esprit. L’érudition n’est pas un gage d’une juste interprétation de l’Écriture : les disciples du Christ furent des hommes assez simples, alors que bien des « maîtres de la Loi » n’ont pas reçu la Parole de Dieu faite chair. L’eunuque éthiopien, bien éduqué, et heureux propriétaire d’un rouleau d’Ésaïe, a eu besoin de l’assistance de Philippe — poussé par l’Esprit — pour y découvrir « la bonne nouvelle de Jésus » (Ac 8.34-35). Une interprétation « voilée » de l’Écriture conduisit même un pharisien prometteur à persécuter les chrétiens. L’aveuglement de ce juif nommé Saul ne prit fin que lorsque le Saint-Esprit lui (r)ouvrit les yeux à Damas (Ac 9.17-18). Ce n’est qu’à partir de cet instant que son intelligence de l’Écriture, renouvelée par l’Esprit de Dieu, a pu être mise au service de la « vie » et non plus de la mort (cf. 2 Co 3.6-7). Prenons donc garde de juger l’exégète uniquement d’après l’étendue — ou l’étroitesse — de sa science : bien d’illustres savants se sont égarés en échafaudant de complexes interprétations de l’Écriture alors même que la plupart des « simples » croyants ont été préservés de tels errements exégétiques. Que nos Églises puissent être des lieux d’échange où chaque croyant a l’opportunité d’enseigner son frère et de se laisser enseigner par lui.
Résumé et perspectives
Les données que nous avons évoquées ont soulevé plusieurs problématiques. Nous avons vu que seule une lecture de l’Écriture dans l’Église pouvait engendrer une réponse de l’Église et pas uniquement du croyant comme individu. Peut-être devrions-nous réfléchir un peu plus à la manière dont nous suscitons une telle réponse collective à la Parole de Dieu. Dans certaines de nos Églises, les prédications sont facilement suivies d’un appel auquel chacun peut répondre individuellement. Mais, donnons-nous aussi la possibilité à l’Église de s’engager ensemble ? La Bible n’est pas que la Parole de Dieu pour moi, elle est aussi le livre de l’alliance de Dieu avec son peuple.
L’Église est le lieu de l’enseignement de la Parole de Dieu. Il s’agit là d’une activité vitale pour la bonne santé de chacun des membres du corps de Christ. Ceux que Dieu a mis à part pour l’enseignement doivent pouvoir y jouer pleinement leur rôle. Nous devons donc inclure dans nos programmes d’Église une véritable dynamique d’enseignement et de formation autour de la Parole de Dieu. L’objectif est que chaque croyant de notre communauté puisse s’enraciner dans de solides fondements bibliques.
La valorisation du ministère d’enseignant doit s’accompagner de la possibilité pour chacun de « s’enseigner » mutuellement. L’Église est un lieu d’échange où les croyants habités d’un même Esprit peuvent s’encourager réciproquement par la Parole de Dieu.
Enfin, n’oublions pas que l’intelligence des Écritures doit être mise au service de la foi, et qu’elle ne le peut que par l’action du Saint-Esprit. Dans notre étude communautaire de la Bible, la prière ou le silence devant Dieu peuvent être de bons moyens de confesser notre besoin de l’aide du Saint-Esprit. Pour que notre lecture de l’Écriture soit source de vie et non de mort.
Si on devait associer les différents éléments évoqués, l’étude de la Bible dans l’Église devrait donc avoir les caractéristiques suivantes : il s’agit d’un enseignement placé sous la conduite du Saint-Esprit, sous la responsabilité d’un enseignant, laissant la place à chacun pour s’exprimer, et donnant la possibilité d’une réponse communautaire à la Parole de Dieu.
2°) Comment ranimer l’étude de la Bible dans l’Église ?
Après avoir rappelé quelques principes bibliques, venons-en à notre contexte actuel : comment, concrètement, faire de nos Églises des lieux d’étude de la Parole de Dieu ?
Là où le problème n’est pas
Avant toute chose, posons-nous la question de savoir si la situation est si terrible que cela ? Le peu de succès que rencontrent les études bibliques dans nos Églises est-il le signe d’une décadence scripturaire ? Je n’en suis pas si sûr.
Comme je l’ai déjà souligné, la grande majorité des membres de nos Églises lisent leur Bible régulièrement à la maison. Or, le simple fait de lire un passage de la Bible est déjà un acte communautaire. Nous oublions vite que lorsque nous ouvrons notre Bible en français, nous sommes au bénéfice du travail de croyants qui, au fil des siècles, ont regroupé les différents écrits inspirés, les ont copiés, transmis, et enfin traduits dans notre langue. De plus, la plupart de nos membres d’Église ont une Bible d’étude dont les notes les aident à comprendre le texte. Ils lisent aussi des livres sur la Bible, suivent des calendriers ou livrets de méditations quotidiennes, consultent des sites d’enseignement et discutent même parfois de la Bible sur des forums en ligne. En faisant cela, ils entrent en interaction avec bon nombre d’enseignants, biblistes ou simples croyants. Bref, s’ils n’étudient pas la Bible dans votre Église, ils le font tout de même dans l’Église. En tant que pasteurs ou responsables, il est bon de se rappeler que ceux dont nous avons la charge lisent déjà leur Bible avec d’autres. Et c’est tant mieux ! Veillons tout de même à les orienter au sein de la jungle de ressources et d’outils disponibles, d’autant plus que par le biais d’Internet leur nombre et leur facilité d’accès ont été démultipliés.
D’autre part, je ne suis pas persuadé que nos membres ne sont pas intéressés par l’étude de la Bible, du fait que nous serions dans une société de consommation, habituée au « prémâché » ou au zapping. Je suis étonné par l’importance donnée à la formation dans notre pays. Une enquête de 2008 sur la formation continue montrait que 89% des Français estiment qu’il est indispensable de se former tout au long de sa vie(9). De même, il est de plus en plus fréquent de reprendre les études, même parfois à l’âge de la retraite ! En fait, nous n’avons jamais été autant habitués à étudier, et étudier encore. Et cette propension à la formation n’épargne pas nos Églises : il suffit de constater la multiplication ces dernières années des instituts bibliques, formations en tout genre ou cours bibliques en ligne. J’ai été moi-même surpris de l’intérêt et de la motivation d’une proportion importante des membres de mon Église locale lorsque nous avons lancé « Aventure Formation »(10). Il s’agit pourtant d’une formation qui requiert plusieurs heures d’étude hebdomadaire sur une période de trois ans. Si donc nos études bibliques sont désertées, ce n’est pas parce que nos frères et sœurs n’aiment pas étudier(11).
Où réside le cœur du problème ? Comment y remédier ? Il n’y a pas de réponse unique à ces questions. J’essaierai cependant d’en proposer quelques-unes dans les lignes qui suivent.
Expliquer l’importance de l’étude de la Bible dans l’Église
Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi les membres de nos Églises lisent la Bible chez eux ? Certainement parce que nous leur avons enseigné que leur relation avec Dieu passe par là. En tant qu’évangéliques, nous rappelons fréquemment dans nos prédications la nécessité de lire la Parole de Dieu, d’avoir un culte personnel, de se mettre à l’écoute de Dieu à travers la Bible. Cela fait partie des fondamentaux, c’est une des premières choses que nous inculquons aux nouveaux convertis.
Mais avons-nous le même zèle pour expliquer l’importance d’étudier la Bible ensemble ? Peut-être vos membres se demandent-ils : si je peux étudier la Bible chez moi, à partir d’ouvrages écrits par des enseignants bien plus compétents que mon pasteur, à quoi bon me déplacer pour l’étude biblique ? Ne soyons donc pas surpris s’ils ne viennent pas aux études bibliques ! Nous avons besoin de savoir pourquoi nous faisons les choses. Nous avons besoin de voir l’objectif, de comprendre le but. Avant de tester toutes les formules à la mode, commençons par prêcher l’importance de se réunir pour étudier la Bible ensemble !
Peu importe le format, pourvu qu’il y ait formation
L’étude biblique du mardi soir n’est pas une prescription biblique. Ce qui importe, ce n’est pas de « faire des études bibliques », mais que la Bible soit étudiée et vécue dans l’Église. Peu importe l’horaire, peu importe le format. Pourvu qu’il y ait formation.
Avant d’établir des programmes, prenons le temps de réfléchir à qui s’adressent ces programmes. Comment ceux qui composent notre Église aimeraient-ils étudier la Bible ensemble ? Autour d’un repas ? (pensez à la formule des Parcours Alpha). Dans le cadre d’une formation sérieuse avec des examens et un certificat à la fin ? (pensez aux nombreuses formations bibliques qui se développent). À partir d’un enseignement biblique sur vidéo ? (pensez à toutes les prédications ou enseignements qui sont visionnés des milliers de fois sur le Top Chrétien). Demandez-leur !
De même, demandez-vous quel est le meilleur moment pour réunir le plus de monde. Une solution peut être d’organiser plusieurs groupes d’études bibliques à différents horaires : les retraités ou parents au foyer sont souvent plus disponibles en semaine l’après-midi ; d’autres se déplaceront plus facilement pour un temps de formation le samedi matin. Et pourquoi ne pas revenir à la pratique de « l’école du dimanche » pour tous ? Puisque c’est le dimanche que nous réunissons le plus de monde, prévoyons un temps d’étude biblique adapté à l’âge de chacun, avant ou même au sein du culte dominical. Il s’agit bien entendu d’un temps en plus à la prédication. Il faut donc prévoir de prolonger la rencontre dominicale, soit en commençant plus tôt ou en finissant plus tard. Cela en fera peut-être râler certains, mais ils viendront tout de même au culte, et donc aux études bibliques ! Personnellement, je pense qu’il ne faut pas avoir peur d’appeler ce temps « école » et de le présenter comme un vrai temps de formation, avec un programme et des objectifs(12). Rappelons-le : les Français aiment faire des études, surtout ceux qui ne sont plus à l’école(13) !
Développer une stratégie de formation
Au-delà de la manière dont nous amenons les membres de nos Églises à étudier la Bible ensemble, il peut être bon de réfléchir à une vraie stratégie pour la formation de chacun. On parle beaucoup de la croissance de l’Église : la construction de l’édifice ne consiste pas seulement à y ajouter de nouvelles pierres vivantes, mais à consolider les pierres entre elles autour de la « pierre angulaire ». Cette édification/consolidation repose en grande partie sur notre capacité à développer une formation solide pour l’ensemble de l’Église. C’est une bonne chose de pouvoir étudier la Parole pour étudier la Parole. Mais, l’idée de progrès ou de croissance en maturité n’est pas absente de la Bible (par ex. Hé 5.11-14). Avons-nous dans nos Églises un véritable programme de formation biblique qui permet à chacun de sans cesse grandir en Christ ?
Pour cela, il est nécessaire d’envisager divers niveaux de formation. On n’étudie pas la Bible avec un nouveau converti de la même manière qu’avec un chrétien engagé depuis trente ans avec Christ. Et n’oublions pas que l’objectif est de faire de chaque personne enseignée, un enseignant à son tour. C’est souvent en transmettant ce que nous avons reçu que nous étudions le plus. La préparation d’une prédication, d’un partage de groupe de maison, d’une leçon pour les enfants ou d’un débat pour les ados, tout cela oblige à se plonger dans la Parole de Dieu et à étudier soi-même afin d’avoir quelque chose à transmettre. N’hésitons pas à demander à ceux qui ont été formés de communiquer ce qu’ils ont reçu ! Et si certains pensent ne pas avoir besoin de se former, mettons-les au service, ils se rendront vite compte de leur besoin ! J’ai toujours trouvé surprenant que l’envoi en mission des disciples se situe peu de temps après leur appel (Mt 10 ; Mc 6.7-13 ; Lc 9.1-6) : ce n’est qu’après leur retour que Jésus va vraiment commencer la formation.
Prenons donc le temps d’élaborer une vraie stratégie de formation. Cela nous permettra également de planifier l’étude de la Bible dans sa totalité. Je ne parle pas ici d’étudier chaque verset en détail, mais au moins de savoir de quoi parle chaque livre de la Bible. Certes, il convient de s’arrêter plus longuement sur certains passages clés. Mais ne nous arrêtons pas à Genèse 1 à 3, les dix commandements, le Psaume 23 et le Sermon sur la Montagne ! Comme le dit si bien Dietrich Bonhoeffer :
C’est dans sa totalité que l’Écriture est la Parole de la révélation de Dieu. Ce n’est que dans l’infinie richesse de ses correspondances internes, manifestant le rapport entre l’Ancien et le Nouveau Testament, entre la promesse et l’accomplissement, le sacrifice et la Loi, la Loi et l’Évangile, la croix et la résurrection, la foi et l’obéissance, le don et l’attente, que le témoignage de Jésus-Christ, le Seigneur, devient entièrement intelligible. C’est pourquoi le recueillement en commun doit comporter, outre la prière empruntée aux Psaumes, une assez longue lecture de l’Ancien et du Nouveau Testament(14).
Replacer la Parole de Dieu au cœur de la vie de l’Église
Réunion du conseil. À l’ordre du jour : « Comment développer l’étude de la Bible au sein de notre vie d’Église ? » La question est légitime. L’étude biblique du mardi soir réunit en moyenne cinq ou six fidèles. Ce qui est trop peu !
Qu’allons-nous faire pour rappeler l’importance d’étudier la Bible ensemble ? Comment allons-nous développer une stratégie de formation biblique qui puisse concerner chaque membre de l’Église ? Comment allons-nous valoriser le rôle de ceux qui sont mis à part pour le ministère d’enseignant ? Comment allons-nous promouvoir l’importance de s’enseigner les uns les autres ? Comment allons-nous laisser le Saint-Esprit enseigner notre Église, par les Écritures qu’il a inspirées ? Bref, comment allons-nous replacer la Parole de Dieu au cœur de la vie de l’Église ?
Voilà ce qui pourrait être l’ordre du jour de votre prochain conseil.