3 juillet 1892. Inauguration à Cahors, sa ville natale d’une fontaine monumentale en hommage au poète Clément Marot.
Clément Marot est un méridional né en 1496. Rien ne le prédisposait, au départ, à être touché, comme Calvin le noyonnais, par l‘appel de la Réforme. Jusqu‘en 1530, Clément Marot, menait une existence sans histoire, une belle carrière d‘artiste et de poète, sans trop se soucier des grandes questions de la vie, son succès à la cour du Roi de France, suffisait à son bonheur. Mais au contact de Lefèbvre d‘Etaples et de Marguerite de Navarre, il s‘est intéressé peu à peu, pour son propre compte, aux enseignements des premiers réformateurs.
Il se met à fréquenter des cercles de lecture de la Bible, il se pose des questions. Et vers 1530, il semble vraiment sous l‘influence de la Réforme. Il parle du sentiment de péché et recourt à Jésus-Christ pour obtenir le pardon. Plus tard, il souligne l‘importance, toute protestante de la foi et de la grâce,, comme on peut le lire dans ce texte :
„Peuple séduit, endormi en ténèbres,
Tant de longs jours par la doctrine d‘homme…
Prie à Dieu seul que par la grâce te donne
La vive foi, dont saint Paul tant écrit…“
Marot, poète léger, était donc devenu protestant de conviction. Il a eu des hauts et des bas, des revirements, mais plus d‘une fois, il fit preuve d‘un grand courage dans l‘affirmation de sa foi. Il adressa ainsi au roi François Ier, un „Sermon du bon pasteur et du mauvais“. C‘était une sorte de sommaire versifié ds doctrines évangéliques, où il se montrait clairement disciple des réformateurs. Dans ce texte, il n‘hésite pas à opposer le bon pasteur qui fait paître son troupeau „de l‘Écriture Sainte“, au mauvais qui nourrit le sien „de songes et de mensonges“. Et le poète défendait avec force, dans cette pièce, les deux grands principes de la Réforme, la justification par la foi et l‘autorité suprême de l‘Écriture sainte. Bref, Marot a changé, sa vie a pris un tour nouveau, sa foi chrétienne, grâce au mouvement de la Réforme, s‘est approfondi.
Cela lui a valu bien des déboires. Au XVIème siècle, contrairement à aujourd‘hui, la tolérance n‘était pas très acceptable. On ne tolérait guère la différence religieuse, et Marot, comme Calvin le picard, en a beaucoup souffert. Il a fait de la prison pour avoir mangé du lard un jour de carême, ce qui était un grave signe d‘hérésie à l‘époque ( imaginons le nombre de prisons qu‘il faudrait construire aujourd‘hui s‘il s‘agissait toujours d‘un délit!).
Il a été obligé de connaître l‘exil, de se renier, de fuir à Genève où il a passé un an aux cotés de Calvin. Bref, une cascade d‘ennuis, tout cela parce qu‘il était devenu protestant. Mais dans toutes ses difficultés, il a continué à travailler sa poèsie, à rendre honneur à la Bible et aux Psaumes en particulier. En les traduisant en vers, il créa un authentique chef d‘œuvre qui allait être chanté dans toutes les provinces de France. En ce sens, comme Calvin, Marot a rendu à la Réforme un immense service, en offrant tout entier son talent au service de Dieu, de sa foi. Clément Marot a donc une trajectoire un peu parallèle à celle de Calvin le picard. Les deux hommes se retrouvent d‘ailleurs ensemble en exil à Genève, où Calvin renonça à ses propres traductions en vers des Psaumes au profit de celles de Marot. Cette proximité avec Calvin constitue le premier élément qui rapproche Marot de notre Picardie. Comme Jean Calvin le picard, Marot a connu, pour sa foi, l‘exil et la renommée au XVIème siècle, contribuant à l‘essor du protestantisme.
Source: conférence de S. Fath (1996).