John Howard (1726-1790), est mort le 20 janvier 1790 à Kherson (Ukraine). C'est un philanthrope britannique qui a publié de nombreux témoignages sur l'état des prisons à la fin du 18ème siècle et milité pour une réforme des conditions de vie des prisonniers
John Howard, orphelin de mère à l'âge de cinq ans, est élevé dans la foi calviniste de son père, artisan tapissier garnisseur. À la sortie de l'école, il est placé comme apprenti chez un épicier, mais le métier ne lui plaît pas. Ayant hérité d'une petite fortune à la mort de son père, il entreprend le « Grand Tour », puis retourne à Londres où il épouse une femme de trente ans son aînée qui l'avait soigné avec dévouement. Elle meurt à peine trois ans plus tard et Howard s'embarque alors cette fois pour le Portugal (1756), pouir visiter Lisbonne ravagée par le tremblement de terre du 1er novembre 1755.
Son navire, le « Hanovre » est capturé par un corsaire français. Sous prétexte qu’il a traité le capitaine avec « hauteur », « à l’Anglois », il est traité avec cruauté ainsi que l'équipage et les passagers.
Ils sont maintenus pendant quarante heures dans la câle sans pain ni eau. Ils sont ensuite transportés à Brest, et confinés dans le château comme prisonniers de guerre. Là, leurs souffrances vont aller en s'accroissant. Après après avoir croupi pendant de nombreuses heures dans le donjon sans la moindre nourriture, ils ont droit à une articulation de mouton jetée au milieu d'eux. Mais n'ayant rien pour couper cette viande, ils sont obligés de la déchirer avec les mains, pour la ronger ensuite comme font les chiens.
Antoine Dupuy (1835-1891), a décrit de la façon suivante l'état de la prison de Brest à cette époque :
"En général, les prisons sont mal placées, mal bâties, humides et malsaines. Ce sont presque toujours de vieilles constructions féodales transformées en prisons parce qu'on ne savait à quoi les employer... A Brest, ce sont deux tours à l'entrée de la porte du Château. L'une de ces tours sert de prison militaire, l'autre est réservée aux prisonniers civils et aux criminels. Les appartements pratiqués dans ces tours sont obscurs, étroits, incommodes, à peine aérés (Archives d'Ille-et-Vilaine, C. 107). « Il n'existe pas de cachots plus horribles et plus meurtriers que ceux de Brest », écrit en 1786 l'évêque de Léon (Archives d'Ille-et-Vilaine, C. 118)...Dans la prison de Brest « règne une infection qui met à une cruelle épreuve la charité la plus courageuse » (Archives d'Ille-et-Vilaine, C. 118).
Assigné à résidence à Morlaix, puis à Carhaix, Howard correspond de cette ville avec des prisonniers de Brest, Morlaix et Dinan (1).
"Voici comment il relatera lui-même plus tard son expérience pénitentiaire (State of Prisons, p 11) :
"I must not be understood here to mean a compliment to the French. How they then treated English prisoners of war I knew by experience in 1756, when a Lisbon packet in which I went passenger, in order to make the tour of Portugal, was taken by a French privateer. Before we reached Brest, I suffered the extremity of thirst, not having, for above forty hours, one drop of water, nor hardly a morsel of food. In the castle of Brest I lay for six nights upon straw; and observing how cruelly my countrymen were used there and at Morlaix, whither I was carried next, during the two months I was at Carhaix upon parole I corresponded with the English prisoners at Brest, Morlaix, and Dinan. At the last of these towns were several of our ship's crew and my servant. I had sufficient evidence of their being treated with such barbarity, that many hundreds had perished, and that thirty-six were buried in a hole at Dinnan in one day. When I came to England, still on parole, I made known to the Commissioner of Sick and Wounded Seamen the sun dry particulars, which gained their attention and thanks. Remonstrance was made to the French court; our sailors had redress; and those who were in the three prisons mentioned above were brought home in the first cartel-ships. Perhaps what I suffered on this occasion increased my sympathy with the unhappy people whose case is the subject of this book."
Il sera bientôt échangé contre un prisonnier de guerre français. Il retourne alors en Angleterre, s'installe dans une propriété héritée de ses grands-parents où il commence son œuvre de philanthrope en finançant les études d'une vingtaine d'enfants. En 1773, il est nommé High sheriff (shérif) de Bedfordshire, et commence par inspecter la prison du comté.
Ayant l'expérience de la prison, il est particulièrement affecté par la misère qu'il y découvre et entreprend une inspection systématique des prisons anglaises qui le convainc de saisir le Parlement ; il dénonce notamment la situation désastreuse des plus démunis, incapables de subvenir à leurs besoins les plus élémentaires en prison. En 1777, paraît la première édition de son rapport d'inspection et des solutions qu'il propose sous le titre
"The State of the Prisons" (L'État des prisons).
Il y écrit qu’en ce qui concerne les aumôniers de prison, il ne faudrait pas prendre le premier clergyman qui se présente :
« They should choose one who is un principle a Christian: who will not content himself with officiating in public; but will converse with profligate; exhort the thoughtless; comfort the sick; and make known to the condemned, that mercy which is revealed in the Gospel” (2).
Il continue ses visites des prisons britanniques mais aussi européennes, visitant notamment la nouvelle prison parisienne de la Force en 1783.
En 1789, il publie
"The State of the Prisons in England, and An Account of the Principal Lazarettos of Europe".
Il meurt du typhus en Ukraine où il s'était rendu pour se rendre compte sur place des conditions des détenus dans l'Europe orientale.
(1) John Howard, État des prisons, et des maisons de force en Europe au 18ème siècle, Traduction et édition critique par Christiaan Carlier et Jean-Guy Petit, Champs Pénitentiaires, Éditions de l’Atelier, 1994, p 46.
(2) Martin Southwood, John Howard: Prison Reformer, Independent Press ; London, 1958, p 69.
(3) antoine Dupuy, Le Régime Pénitentiaire en Bretagne au XVIIIème siècle.