Que voyons-nous ?
Une forme torturée, nue, clouée et ensanglantée. Notre regard, tiré vers le haut, vient buter sur la poutre horizontale située juste sous le bord supérieur du tableau. La croix aux lignes vigoureuses et droites est très haute. De la fumée et une poussière rougeâtre tournoient à l’arrière-plan comme des flammes prises dans une bourrasque. Le corps distendu est baigné par une lumière qui semble repousser les nuées devant elle, dévoilant un bout de ciel bleu. Un halo pâle entoure la tête.
Notre regard s’attarde...
Il n’a pas encore rendu son dernier soupir ; sa tête n’est pas tombée sur sa poitrine mais s’incline jusqu’au niveau de ses bras étendus. Ses cheveux, striés de sang, s’entremêlent avec une couronne d’épines dont la torsion imite celle de l’arbre dénudé et difforme au bas du tableau. Pareils à des lassos, les branches de cet arbre participent à la violence de la scène. Des chiens hurlants, dressés sur leurs longues pattes maigres, entourent la croix vers laquelle ils tendent leurs horribles gueules béantes et sanguinolentes. Ils ne peuvent toutefois pas atteindre leur proie. La bouche du supplicié est ouverte aussi, tendue, incapable d’atteindre la cruche remplie d’eau, au pied de la croix. Les silhouettes contorsionnées des flammes et de l’arbre sur le point de céder nous disent que la mort est proche.
Qui est donc ce supplicié ?
La scène est clairement inspirée des évangiles.
Elle montre celui que la Bible présente comme le Fils de Dieu, celui par qui furent créés océans, lacs et rivières. Le voici réduit à endurer les affres de la soif. Il avait dit : « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et qu’il boive » et là, il ne peut pas prendre...
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