— Vous avez vécu de très beaux moments autour du pardon. Notamment, vous êtes reçu par le premier gendarme qui vous avait arrêté et qui lui-même était chrétien…
— Un jour, il m’écrit en me demandant comment on pouvait être voyou et chrétien en même temps. Il ignorait que j’étais chrétien et non plus voyou ! Moi, ne sachant pas que c’est un gendarme, je l’invite à manger. Au restaurant il vient avec son fils et nous nous disons des vérités très dures (mais la vérité guérit le mal qu’elle fait). Lui, il parle de loi et moi je parle d’humanité. Pour finir il m’emmène chez lui, et là j’ai été complètement bouleversé. Il m’a présenté à sa femme, qui s’est levée, m’a congratulé, m’a offert un verre d’eau, m’a demandé comment ma famille allait alors que moi j’avais mis sa famille en péril. Un autre de ses fils était présent. J’ai beaucoup d’admiration pour cet homme parce qu’il a su conjuguer la loi, qu’il représente, avec la miséricorde. Il ne faut pas oublier que je lui avais tiré une balle dans la jambe ! C’est quand même pas banal ! Par son attitude, ce monsieur m’a réhabilité. Il y a donc le pardon que l’on donne et celui que l’on reçoit. Moi aussi j’ai dû pardonner au frère gitan qui m’avait trahi, comme j’ai pardonné à mon père.
C’est important, le pardon. Un jour, une femme est venue me voir et elle m’a dit :
« Je veux une foi comme la vôtre.
— Vous savez, au début, je n’ai rien fait pour ça.
— Pourtant, je vais à Lourdes, j’assiste aux vêpres, je me confesse.
— Alors, qu’est-ce qui se passe dans votre vie ?
— Je n’ai plus personne.
— Pas de père, pas de mère, pas de sœur ?
— Si, j’ai une sœur.
— Et comment ça va avec votre sœur ?
— Ah ! je ne lui parle plus parce qu’elle a pris tous les meubles à la mort de maman ! »
Il faut prendre à la lettre les injonctions du Christ sur le pardon. Pas d’offrande sans réconciliation préalable.(1) Le pardon c’est de l’autonettoyant.
— Oui, c’est vrai, et le non-pardon bloque des tas de choses dans la vie.
— Toute votre vie ! Vous ne pouvez pas être libre si vous ne pardonnez pas, puisque vous accumulez. Vous savez, le mal ce n’est pas que la violence. Une fois, on m’a demandé : « C’est quoi, le pire ? ». Il n’y a pas de pire, le mal c’est le mal ! Attaquer une grand-mère ou attaquer une banque, c’est pareil. Je me suis fait casser la tête en prison parce que j’ai dit cela. Le mal c’est tout ce qui est fébrilité, anxiété, peur, négation, contradiction. Aujourd’hui je suis axé sur l’harmonie avec les gens, je suis en osmose avec eux, avec l’univers, je prêche la patience, la longanimité.