Voici, écrit par André Thobois, son grand biographe en France, une introduction à la vie de Paul Besson (1848-1932) fondateur d'églises en Argentine sous le nom de Don Pablo Besson (article publié dans "Croire et Servir", en août-septembre 1981)
« Pourquoi chercher quelqu’un d’autre, quand je pourrais moi-même répondre à l’appel ? » Au fil des jours, la question se faisait de plus en plus lancinante, et la volonté de Dieu plus claire. Il devait quitter la vieille Europe pour rejoindre les chrétiens qui, partis de Denain et de quelques autres villes du nord de la France, avaient émigré en Argentine.
C’est ainsi que le 25 juillet 1881, Paul Besson, en réponse à leur pressant appel, débarquait à Buenos-Aires. Il avait 33 ans. Il y mourra cinquante et un ans plus tard.
Né à Nods le 4 avril 1848. Formé aux pieds de maîtres illustres, tels Frédéric Godet ou Ferdinand Buisson, à Neuchâtel, en Suisse, le comte de Tischendorf à Leipzig, en Allemagne, il avait acquis une large érudition qu’il ne cessera d’accroître.
Il est reçu dans le ministère en 1870. Après un bref ministère pastoral à Lignières, en Suisse (1871-1873), P.Besson était venu en France (Lyon 1873-1878). La rencontre avec des chrétiens baptistes à Saint-Didier-de-Formans et Trévoux, dans la région lyonnaise où il évangélisait, l’avait amené à la même conviction que ces croyants. Il était, alors, devenu pasteur baptiste et, envoyé dans le nord de la France, il avait répandu l’Evangile avec le pasteur de Denain, François Vincent, à Denain et dans une dizaine de postes d’évangélisation de cette région, jusque dans le Pas-de-Calais (1878-1881)..
Pasteur à Santa Fe puis Buenos Aires (1881-1931).
A son arrivée en Argentine, les colonies françaises et suisses occupèrent, tout d’abord, l’essentiel de son activité. Constamment en route, sur son cheval, il allait à Esperanza, à San Carlos, Pujato, Las Tunas…organisant des réunions, visitant les malades et répandant la bonne semence de la foi.
Très vite, cependant, il se lança, parallèlement à la prédication de l’Evangile, dans une lutte persévérante pour les libertés civiles et religieuses. C’était le frêle David devant l’impressionnant Goliath. L’Eglise Romaine, toute-puissante, tenait elle-même, en effet, les registres de l‘état civil, aussi bien, ceux des naissances, des mariages que des décès. Besson, lui, se mit à réclamer la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Il le fera sans cesse, toujours sur la brèche ; il écrivait des articles dans toutes sortes de journaux, entreprenait des démarches, tenait des réunions… Le combat se poursuivit pendant sept longues années. En 1888, enfin, le Congrès argentin adopta une législation instituant l’état civil.
Besson ne fut pas désoeuvré pour autant. Son combat pour les libertés civiles et religieuses n’avait été qu’un aspect de son activité. Il avait, maintenant, le champ davantage libre pour l’annonce de l’Evangile, ce qui était sa vocation. Aussi se dépensait-il, sans compter, pour le faire pénétrer jusque dans les parties les plus atteintes, moralement et physiquement, de la société. Il ne se limitait plus aux immigrés français ou suisses. Bientôt, il fut amené à prêcher en espagnol afin de gagner quelques jeunes gens des faubourgs qu’il rencontrait souvent. Sans renoncer à annoncer l’Evangile en français, c’est à cette prédication en espagnol qu’il devait se donner, surtout, par la suite.
Missionnaire dans l’âme, tout en poursuivant l’œuvre à Buenos-Aires, il ne cessait de prospecter les villes et les villages de la province de Buenos-Aires, du moins pour commencer, organisant des réunions dans les salles publiques et les théâtres, souvent remplis d’un public avide. Parfois, il était invité pour des conférences sur les libertés civiles...Et Besson, gagnant les premières sympathies, préparait le terrain pour l’œuvre qu’il s’agissait d’établir. De fait, cette œuvre progressait. Déjà, parmi les premiers convertis de Besson, plusieurs s’étaient consacrés à l’annonce de l’Evangile, après avoir reçu une bonne formation auprès de lui. Quant à lui, tout en veillant sur le travail et s’y activant lui-même, il lui donnait une dimension nouvelle en utilisant la presse. Persuadé qu’elle est un canal étonnant pour faire connaître l’Evangile, il ne cessait d’écrire. Ses articles paraissaient dans des journaux religieux, mais, souvent aussi, dans la grande presse, portant toujours plus loin et plus largement, le message libérateur.
On demeure confondu par l’ampleur du ministère de cet homme. L’annonce de l’Evangile et l’action sociale, à toutes sortes de niveaux, étaient inséparables pour lui. Il n’est pas étonnant qu’à l’occasion du second congrès de l’Alliance Baptiste Mondiale, réuni à Philadelphie, aux Etats-Unis, en 1911, on l’ait présenté au président des Etats-Unis, à la Maison Blanche, où il était reçu avec quelques autres personnalités, comme le « Luther de l’Amérique latine ».
Décédé à dans la province de Buenos Aires (Argentine) le 30 décembre 1932
L’œuvre commencée par Paul Besson, il y a tout juste un siècle, a continué à se développer. La Convention Baptiste d’Argentine compte aujourd’hui, quelque 350 Eglises et près de 30 000 membres professants. Comment ne pas rendre grâces à Dieu, en cet anniversaire, avec ces frères d’Argentine, d’avoir envoyé de France, il y a cent ans, ce jeune pasteur pour être le témoin et le proclamateur de l’amour de Dieu ?
P.S. : Les lignes ci-dessus avaient été publiées dans le journal « Croire et Servir ». Elles datent, comme cela est précisé, d’août-septembre 1981. Une quinzaine d’années après les brèves indications qui y sont données, la Convention baptiste d’Argentine, en 1996, groupait 420 Eglises et le nombre de leurs membres - plus de 56 000 - avait presque doublé. Neuf ans plus tard, en 2005, la même Convention comprenait 530 Eglises, avec 90 000 membres, sur une population de 35 millions d’habitants (Pour une même proportion de population, en France (58 millions d’habitants), on dénombrerait 878 Eglises baptistes, avec 149 000 membres).
Don Pablo Besson