3 janvier 1927. Walter Montaño
En 1938, lorsque le président mexicain Lázaro Cárdenas accueille chaleureusement l’évangéliste protestant Walter Montaño (1903-1981), deux hommes aux antécédents improbables se rencontrent. Cárdenas a surmonté une éducation limitée et des préjugés à son encontre en raison de son héritage indien pour devenir général. Il a travaillé sans relâche pour bâtir une coalition permettant de remporter la présidence du Mexique. Par conséquent, il est disposé à tendre la main à la communauté protestante en progression au Mexique, même si elle comptait moins de 100 000 personnes. (En 1946, grâce en partie à Montaño, ce nombre dépassera le quart de million.) Les récentes révolutions au Mexique ont desserré l’emprise de l’Église catholique romaine et réduit les répercussions négatives pour Cárdenas racceptant de rencontrer un prétendu « hérétique ».
Pour sa part, douze ans plus tôt, Walter Montaño est Fray Luis, un dominicain fiable dans un monastère péruvien. Spirituellement affamé, il est de plus en plus désenchanté par sa communauté religieuse. Nommé secrétaire d'un inquisiteur dominicain, il doit dactylographier les confessions des prêtres du monastère de Lima. Il s'est dit horrifié de découvrir que la majorité reconnait avoir séduit les paroissiennes, commis des vols et même participé à des meurtres. Les prêtres se régalent de révélations honteuses entendues au confessionnal. Il est également inquiet de l'ordre qui lui est donné d'écrire une biographie d'un humble serviteur, Martin Porres, qui devait inclure de nombreuses inventions et miracles fabriqués pour garantir que le pape béatifierait l'Indien. Par-dessus tout, Fray Luis aspire à être sûr qu'il posséde la vie éternelle, mais on lui a dit qu'une telle connaissance n'était pas possible avant la mort.
Chargé de la bibliothèque du couvent, il lit des ouvrages protestants. En les lisant, ceux-ci travaillent sur son âme. Finalement, Fray Luis ne peut plus supporter la tension. Tôt le matin du 3 janvier 1927, il fuit le monastère et se rend à l'Union évangélique des travailleurs sud-américains. Là, il décharge son âme. Le missionnaire Charles A. Patton lui montre la voie du salut. Après cinq heures à genoux, Montaño se lève comme un homme nouveau en Jésus-Christ. Presque immédiatement, il commence un travail d’évangélisation. Il sera surnommé « le moine qui revit ».
Sa famille le reniée les autorités le harcèlent, Rome l'excommunie et des assassins tentent de lut ôter la vie. Lorsque son père l’exclue de sa famille, Montaño répond : « Si vous me reniez, j'ai quand même un Père qui est aux cieux. Puis-je nier l’expérience de paix et de salut qu’il m’a donnée et la joie qui est la mienne”.
Il passe un temps dans le « trou » infect et sombre de la prison de Puno, près du lac Titicaca, en raison de son témoignage de conversion. Finalement, il est transféré dans une cellule où des criminels violents, des mendiants et des fous l'entourent. Il parle du Christ aux gardes. Quelques jours plus tard, il est transféré à Cuzco pour y être jugé et expulsé vers la Bolivie. Montaño y prêche jusqu'à ce que la persécution l'oblige à partir.
À l'invitation du célèbre pionnier missionnaire Harry Strachen, il accepte un poste à l'Institut biblique du Costa Rica où il rencontre Esther Piper qui est devenue son épouse. Quelques années plus tard, Montaño revient prêcher au Pérou. Il est à nouveau emprisonné, cette fois à Huancayo – accusé d’être communiste – mais il a produit une lettre du président péruvien qui lui permet d’obtenir sa liberté. En 1938, il prêche dans toute l’Amérique latine et aux États-Unis.
Des milliers de personnes assistent aux réunions mexicaines de Montaño. A Vera Cruz, les personnes en recherche sont si nombreux dans la salle qu’on implore une autre réunion. Montaño suggère en plaisantant 4h30 le lendemain matin et cela est accepté. La salle ne peut pas contenir les milliers de personnes qui se présentent à cette heure matinale et remplissent les rues à l'extérieur.
Avant sa mort en 1981, Walter Montaño prêche à des centaines de milliers de Latino-Américains. De 1951 à 1960, il dirige “Christ’s Mission”, une organisation évangélique auprès des catholiques basée à New York, dirigée par d’anciens prêtres catholiques, et il édite le magazine “Converted Catholic” (renommé ensuite “Christian Heritage”). En 1960, il démissionne de ces postes pour devenir président de l’Union évangélique de l’hémisphère occidental. Il est l'auteur de “Behind the Purple Curtain”, décrivant les ténèbres spirituelles de l'Amérique latine et documentant de nombreux cas de persécution catholique des protestants en Amérique du Sud et en Amérique centrale. Sa pierre tombale le décrit comme un théologien, diplomate et humanitaire, le « Martin Luther des Américains ».
Source: Le moine qui revit (ou plus exactement «le moine revenu à la vie») par B.H. Pearson, RDF, 1983 .