29 avril 1692. Vauban (1633-1707) adresse à Madame de Maintenon son mémoire sur le « Rappel des huguenots ».
Il fut une des rares personnalités de son époque à oser affronter Louis XIV et à critiquer la persécution des protestants et la Révocation de l'Édit de Nantes.
Il adressa à Louvois (25 décembre 1689) et à madame de Maintenon (29 avril 1692) un Mémoire pour le Rappel du Huguenots il lui semble plus efficace de convaincre les conseillers que convaincre le roi. Mais ni l’un ni l’autre n’osèrent se compromettre auprès du roi sur ce sujet, lequel n’eut jamais connaissance du mémoire de Vauban ; il est peut probable que cela ait changé les choses…
Le texte de Vauban est plein de bon sens et de clairvoyance. En voici un extrait :
« La Révocation de l'Édit de Nantes), si pieux, si saint et si juste, dont l'exécution paraissait si possible, loin de produire l'effet qu'on en devait attendre, a causé et peut encore causer une infinité de maux très dommageables à l'État. Ceux qu'il a causés sont :
- La désertion de quatre-vingts ou cent mille personnes, de toutes conditions, sorties hors du Royaume, qui ont emporté avec elles plus de trente millions de livres d'argent le plus comptant.
- [Appauvri] nos arts et manufactures particulières, la plupart inconnus aux étrangers, qui attiraient en France un argent très considérable de toutes les contrées de l'Europe.
- Causé la ruine de la plus considérable partie du commerce;
- Grossi les flottes ennemies de huit à neuf mille matelots, des meilleurs du royaume.
- [Grossi] leurs armées, de cinq à six cents officiers et de dix à douze mille soldats, beaucoup plus aguerris que les leurs, comme ils ne l'ont que trop fait voir dans les occasions qui se sont présentées de s'employer contre nous.
A l'égard des restés dans le Royaume, on ne saurait dire s'il y en a un seul de véritablement converti, puisque très souvent ceux que l'on a cru l'être le mieux ont déserté et s'en sont allés ».