16 décembre 1775. Jane Austen et ses pasteurs

publié le 16 December 2023 à 01h01 par José LONCKE

16 décembre. Jane Austen et les pasteurs
Six romans ont suffi pour faire de Jane Austen (16 décembre 1775-18 juillet 1817), qui mourut au faîte de son talent, l’un des plus grands écrivains britanniques.

16 décembre 1775. Jane Austen et ses pasteurs
Fille d’un pasteur de province, aux prises sa vie durant avec des conditions matérielles difficiles, elle s’attacha à décrire le milieu même dans lequel elle vécut, la gentry du sud-est de l’Angleterre et porta un regard nouveau sur la vie quotidienne des gens ordinaires.
Dans les romans Sense and Sensibility (1811, Raison et sentiments), Pride and Prejudice (1813, Orgueil et préjugés), Mansfield Park (1814), Emma (1815), Northanger Abbey (1817, L'Abbaye de Northanger) et Persuasion (1817), elle dépeint en effet avec une vive ironie et d’un génie comique certain les mœurs de la bourgeoisie anglaise de son temps.

Les pasteurs dans l’œuvre de Jane Austen
Les romans de Jane Austen offrent de nombreux portraits de pasteurs : Mr Collins dans Pride and Prejudice, Edward Ferrars dans Sense and Sensibility, Henry Tilney et le père de Catherine Morland dans Northanger Abbey, ou encore Edmund Bertram et le Dr Grant.

Les pasteurs n’ont pas échappé à sa plume acerbe malgré l'attachement de Jane Austen pour son père.

Les pasteurs y sont représentés comme vivant dans une certaine aisance, ayant des demeures plus enviables que celles qu’on s’attend à les voir posséder. Edmund et Elionor Ferrars jouissent même de promenades ombragées... Ce ne sera donc pas une déchéance pour les cadets de familles de grands propriétaires terriens que d’y venir habiter.
Les revenus d’Edmund Bertram (700 livres) ne sont pas négligeables.

Cependant le mépris que certains personnages de Jane Austen conçoivent à l’égard des pasteurs ne tient pas essentiellement à leur pauvreté.
On leur reproche une rente de situation assurée sans faire beaucoup d'efforts. C’était commun de représenter un pasteur comme un homme sans ambition et sans énergie, uniquement préoccupé de bonne chère.
Le docteur Grant de Mansfield Park  illustre et légitime ces accusations.
Ainsi que le personnage de Mr Collins qui donne dans Pride and Prejudice l'exemple de ce qu'un pasteur ne doit pas être : égoïste, mesquin, vaniteux, obséquieux avec les puissants, arrogant avec les faibles, moralisateur et borné. Le rire que ses défauts provoquent ajoute encore au mépris dont souffre sa fonction.

La romancière ne nie pas qu’il existe des hommes indignes de leur ministère ; elle se contente de dédaigner la généralisation hâtive. Tous les pasteurs ne sont pas de saints et elle les critique indirectement. Mais la présence parmi eux d’hommes sans valeur n’oblige pas à croire à la médiocrité des chacun !

Aussi essaie-t-elle de susciter de la considération pour la fonction : responsable de la bonne conduite de ses paroissiens, le pasteur doit promouvoir la vertu en prêchant par l’exemple. Il peut le faire pleinement dans une paroisse rurale. A la condition de résider dans cette paroisse. C’est alors qu’il peut imposer la valeur de son rôle.

A cet égard, malgré ses défauts, Mr Collins apparaît plus impliqué dans sa fonction qu'un Henry Tilney. De fait, Henry Tilney, absent de sa paroisse la moitié de son temps, témoigne malgré ses qualités intellectuelles et morales, du manque d'engagement de certains pasteurs à l'égard de leurs paroissiens.

Edward Ferrars fait preuve, quant à lui, d'une vocation plus affirmée dans Sense and Sensibility, quand il affirme

« avoir toujours préféré l'Église »

pour le choix d'une profession, bien que sa famille considère une carrière dans l'armée ou dans la Royal Navy comme « plus appropriée », ou le droit plus digne d'un gentleman.

Seul sans doute, Edmund Bertram témoigne dans Mansfield Park d'une inébranlable vocation, que rien ne parvient jamais à entamer. La solidité de ses principes, la profondeur de ses convictions, lui permettant de ne jamais douter.

Quoiqu'il en soit, nous avons là un état des pasteurs de l'église anglicane, qui nous permet de comprendre à quel point le réveil religieux méthodiste apporté par John Wesley était nécessaire...
 

Source :

Pierre Goubert, Jane Austen : étude psychologique de la romancière, PUF, 1975.

Le Clergé dans les romans de Jane Austen

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