Victor Hugo a écrit, que « c'est grâce au coup de lance de Montgomery que la place des Vosges a été créée ».
30 juin 1559. Tournoi du Palais des Tournelles
Le roi Henri II avait fait arrêter le conseiller Anne du Bourg pour avoir osé tenir propos : « Ce n’est pas une chose de petite importance, que de condamner ceux qui, au milieu des flammes invoquent le nom de Jésus-Christ ». Empoigné aussitôt, enfermé à la Bastille, Anne du Bourg fut brûlé l’avant veille de Noël 1559.
Mais son persécuteur, à ce moment, avait déjà péri lui-même. Le 30 juin 1559, le roi de France Henri II organise un tournoi (jeu qui permet de s'entraîner), devant l'hôtel des Tournelles (près de l'actuelle place des Vosges), en l’honneur de deux mariages - celui de la sœur du roi Henri II, Marguerite avec Emmanuel-Philibert - duc de Savoie -, et celui d'Élisabeth sa fille avec Philippe II d'Espagne - conclus quelques semaines plus tôt au Traité de Cateau-Cambrésis (3 avril 1559).
Henri II, bien que de constitution très robuste et habituellement fort adroit aux exercices des armes, est grièvement blessé à la tête, le 30 juin 1559, par la lance du comte Gabriel de Montgomery qui pénètre à travers la visière du casque du roi : "Un gros éclat frappa le front au-dessous du sourcil droit et déchirant la chair, vient s'enfoncer dans un coin de l'œil gauche; plusieurs fragments percèrent l'œil même; l'os frontal ne fut pas touché…". Après avoir lavé la plaie au blanc d'œuf, les médecins administrent au roi une potion faite de rhubarbe et de camomille
Paré et Vésale au chevet du roi
Ambroise Paré, André Vésale, les meilleurs chirurgiens sont requis pour soigner le souverain. Ambroise Paré (1510-1590) qui fit faire des progrès fondamentaux à la chirurgie et à la médecine bénéficia de la confiance de Catherine de Médicis et des 4 derniers Valois, soignant Anne de Montmorency, Henri II et Coligny blessés. Ses convictions religieuses étaient connues, mais il était discret. Son second mariage et le baptême de ses enfants à l’Eglise permit à sa famille d’être préservée.
La dépouille mortelle du roi fut étendue sur un lit de parade, orné d’une tenture singulièrement appropriée : elle représentait la conversion de l’apôtre Paul sur le chemin de Damas, avec ces paroles du Christ : « Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? »
La nouvelle place, la Place Royale, fut commandée à l’architecte protestant Androuet du Cerceau par Henri IV, qui eut l’excellente idée de remplacer par une place l’ancienne maison royale des Tournelles, une énorme propriété, détruite sur l’ordre de Catherine de Médicis. Celle-ci ne pouvait plus supporter cet endroit après la mort de son mari Henri II dans un tournoi à proximité. Puis un marché de chevaux avait occupé les lieux. Le nom de place des Vosges a remplacé celui de place Royale après la Révolution. Les Vosges ont été le premier département qui ait payé ses impôts à la République.
On dit que certains propriétaires, pas assez fortunés, utilisèrent de l’enduit imitant la brique. Henri IV ne vit pas sa place achevée. Ce fut Louis XIII qui l’inaugura en 1612. Il y organisa de nombreuses fêtes. Elle devint bientôt une adresse très recherchée par l’aristocratie et la roture fortunée.
Statue Louis XIII
Sur son emplacement, on ouvrit un marché aux chevaux, marché qui devint très important, n'oublions pas qu'à cette époque le cheval était par excellence le moyen de se déplacer. Tous les samedis, le marché avait lieu et près de 2000 chevaux faisaient l'objet de transactions. Ce lieu était devenu l'endroit privilégié de duels sanglants, comme celui qui eut lieu en 1578, entre trois mignons d'Henri III contre trois partisans d'Henri de Guise et qui se solda par autant de morts ou de blessés graves que de participants.
Nous sommes en pleins dans les romans d'Alexandre Dumas... A ce propos évoquons : Portos (De Porthau) et Aramis (Aramitz) gentilshommes du Béarn et protestants !
Rue Birague
Pavillon du roi qui n’a jamais été occupé par un roi. Ce fut le premier des 36 pavillons à être bâti, du vivant d’Henri IV. Il surplombe l’entrée sud de la rue Birague (1506-1583), un cardinal et homme d’Etat, conseiller d’Henri III, dont on prétend qu’il a été l’un des instigateurs de la Saint-Barthélemy.
Plusieurs huguenots vinrent y habiter
Au 2, De Ruvigny, gouverneur de la Bastille, De Beringhen, secrétaire du roi, et Sully, qui n'occupa que tardivement l'hôtel, tout près de là, qui porte son nom.
Au 6, Isaac Arnauld jusqu’en 1612), puis le duc de Rohan (ici Musée Victor Hugo).
Isaac Arnaud était intendant des finances de Henri IV. Frère d’Antoine Arnaud (1560-1616), secrétaire de Sully. Ce dernier engendra : Catherine Arnauld, Antoine (le « grand Arnauld » ), Robert Arnaud d’Andilly, Angélique et Agnès, supérieures de Port-Royal)… Elle était petite-fille d'Arnauld, seigneur de Corbeville, qui avait embrassé la réforme et épousé une sœur de l'illustre Anne du Bourg. Elle avait épousé en 1606, Isaac Lemaistre (mort en 1640), qui était redevenu protestant. Ce célèbre avocat à la cour de Paris, avait été dès lors séparé de corps et de biens, envoyé à la Bastille. Sa femme obtenant la garde des enfants (1616). Leur fils : Isaac Lemaistre de Sacy (, le traducteur de la Bible avec son frère Antoine )
Tout en regrettant que la traduction de de Sacy ne soit pas nôtre, on ne peut que noter avec intérêt cette origine protestante d'une traduction catholique de la Bible.
Au 14, Nicolas chevalier, cousin de Mme de Sully. Puis les Dangeau (Synagogue).
Au 20, Nicolas d’Argennes de Rambouillet.
Au 22, Laffemas : collaborateur de Sully comme contrôleur du Commerce et de l'Industrie,
A la fin de sa vie, Sully résida rue St Antoine, dans l’hôtel Sully (magnifique bâtiment que l’on doit à Androuet du Cerceau, encore lui).qui a gardé son nom. Un des plus anciens compagnons d’Henri IV, et un remarquable homme d’Etat. Il a su assainir les finances de la France. Il a encouragé l’agriculture. Il améliore les voies de communication, il abolit certains péages. Il avait aussi des vues très larges sur l’Europe, qui pourraient encore servir.