29 décembre 1894. Christina Georgina Rossetti

publié le 29 December 2021 à 01h01 par José LONCKE

29 décembre 1894. Christina Georgina Rossetti

29 décembre 1894. Christina Georgina Rossetti
Christina Rossetti (5 décembre 1830 - 29 décembre 1894) est une poétesse anglaise, sœur du poète et peintre Gabriel Rossetti.
Christina naît à Londres et est éduquée par sa mère à la maison.

Par la suite, elle dut faire face à des choix difficiles : elle n'épouse ni James Collinson ni Charles Cayley, en raison de motifs religieux. Elle était une fervente anglicane. Or, Collinson s'était converti au catholicisme, et Cayley était agnostique.

Les Rossetti ont été élevés dans l’aile évangélique de l’Eglise Anglicane. Et elle n’a jamais perdu un certain sérieux évangélique : elle refusa par exemple d’aller voir le « Parsifal » de Wagner parce que qu’il célébrait la mythologie païenne.

Son recueil qui obtient le plus de succès lors de sa publication demeure « Marché Gobelin » (Goblin Market, 1862), où sont évoqués les gobelins, personnages fantastiques de la mythologie féerique anglo-saxonne qui symbolisent dans les poèmes de Christina Rossetti la tentation du Mal.


Elle est connue pour ses positions engagées et avant-gardistes : pacifiste, opposée à la cruauté envers les animaux, à l'esclavage et à la prostitution des mineures, en faveur du suffrage des femmes.
Elle est morte d'un cancer à Bloomsbury en 1894. Tant que ses forces le lui ont permises, elle a travaillé dans une institution chrétienne accueillant et protégeant d'anciennes prostituées.

Elle est actuellement considérée comme une grande poétesse de l'époque victorienne.

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Une résurrection meilleure

-Je n'ai plus de pensée , pas de mots, pas de larmes ;

Mon cœur est en moi comme une pierre

Il est trop engourdi pour les espoirs ou les peurs.

Regarde à droite, regarde à gauche, j'habite seul ;

Je lève les yeux, mais aveuglé par le chagrin

Je ne distingue pas de collines éternelles ;

Ma vie est dans la feuille qui tombe :

Jésus, fais-moi vivre.

-Ma vie est comme une feuille flétrie

Ma récolte s'est réduite à une cosse:

Vraiment ma vie est vide et brève

Et ennuyeuse dans le crépuscule stérile;

Ma vie est comme une chose congelée,

Je ne vois ni bourgeon ni verdeur :

Pourtant elle s'élèvera, la sève du printemps ;

Jésus, lève-toi en moi.

-Ma vie est comme un bol cassé,

Un bol cassé qui ne peut pas retenir

Une goutte d'eau pour mon âme

Ou une liqueur dans le froid pénétrant ;

Jetez au feu la chose qui périt ;

Faites fondre et remodelez, jusqu'à ce qu'elle soit

Une coupe royale pour Lui, mon Roi :

Jésus, bois de moi.

Commentaires:

« Mon cœur est en moi comme une pierre »  (My heart within me like a stone) .
L’auteur trouve son cœur insensible et endurci après une expérience pénible…

En décrivant son cœur comme une pierre, Rossetti pourrait évoquer deux citations bibliques:
-Ézéchiel 36. 26 : «  
je vous donnerai un cœur nouveau, et je mettrai en vous un esprit nouveau ; j’ôterai de votre chair un cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair ».
-En 2 Corinthiens 3.3 (Paul y encourage les croyants en leur rappelant qu’ils sont nés de nouveau) :
« 
Vous êtes manifestement une lettre de Christ, écrite par notre ministère, non avec de l’encre, mais par l’Esprit du Dieu vivant, non sur des tables de pierre, mais sur des tables de chair, sur vos cœurs ».
Il est implicite que l’espérance est permise (même s’il n’y a pas encore accomplissement) et que Dieu seul peut transformer son cœur endurci et l’ouvrir.

"Je ne distingue pas les montagnes éternelles » (No everlasting hills I see). Elle exprime sa cécité et du coup son incapacité à percevoir « les montagnes éternelles ». il faut se rappeler que dans l’AT, le Psaume 121  parle de l’encouragement qu’apporte la vue des montagnes. : “Je lève les yeux vers les montagnes, d’où me viendra le secours. Le secours me vient du Seigneur qui a fait les cieux et la terre » (Psaume 121. 1).


Ma vie est comme une feuille flétrie (My life is like a faded leaf ). Cette image est utilisée par le prophète Esaïe lorsqu’il compare les bonnes œuvres humaines et la gloire de Dieu :
« 
Et tous nos actes de justice sont comme un vêtement souillé. Nous sommes tous flétris comme une feuille » (Esaïe 64. 5).
Ce qui peut suggérer qu’une barrière existe entre Dieu et elle et qu’elle s’est éloignée de l’espérance chrétienne que la Bible propose. Toutefois, si on considère le refrain « O Jesus, quicken me », on peut considérer qu’elle veut bien abandonner son corps flétri par le temps et s’ouvrir à la vie nouvelle que le Christ offre.

Ma vie est comme une chose congelée (My life is like a frozen thing). Elle suggère qu’elle trouve difficile de regarder au Christ dans l’état dans lequel elle se trouve.

Ma vie est comme un bol cassé (My life is like a broken bowl). Elle se sent inutile.
L’image est employée dans les Psaumes  (31.12) pour décrire la mort :
« 
Je suis oublié des cœurs comme un mort, je suis comme un objet cassé ».
Et dans l’Ecclésiaste (12. 6) :
«
 Souviens-toi de ton Créateur… avant que le bol d’argent ne se casse... »

Pas d’eau pour l’âme (Water). On pense à la conversation de Jésus avec la femme samaritaine, lorsqu’il déclare qu’il peut donner une eau vive qui désaltère vraiment (Jean 4.14). L’auteur suggère que l’eau dont il s’agit est celle provient selon l’Évangile de Jean, du Christ lui-même.

Cordial. Se sentant comme une « chose congelée », elle reconnait avoir besoin d’un stimulant, de quelque chose qui lui redonnera la vie et qu’elle besoin de l’aide des autres…


Feu (Fire). Dans ce poème le feu est une image de purification et de l’espérance qui l’accompagne...

Une coupe royale  (A royal cup for Him my King). Dans la Bible le mot « royal » est associé à Dieu qui est roi et qui gouverne.  L’auteur reconnait par là qu’elle veut offrir à Jésus sa vie comme une offrande, dont il peut boire, ce qui lui permettrait, elle, d’être en même temps d’être transformée.
L’image d’une coupe royale peut aussi être le symbole du sang de Jésus (1 Corinthiens 11. 25).


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Ne t'inquiète-tu pas ?

Parfois Rossetti exprime son angoisse comme dans le poème, « Dost Thou Not Care? » (Ne t'inquiète-tu pas ? )
Mais ce poème se termine par le rappel par le Christ de son sacrifice, ce qui éclaire tout !


J'aime et je n'aime pas : Seigneur, cela me brise le cœur

d’aimer et de ne pas aimer.

Te voila dans ta gloire, tu t'es séparé

Dans ton sanctuaire, qui est au-dessus,

Ne m'aimes-tu pas, Seigneur, ou ne t'inquiètes-tu pas

Pour cette mine malade ? ' -

-Je t'aime ici et maintenant,

J'accepterai ton cœur brisé, sois tranquille.


Seigneur, c'était bien, toi et moi, dans le temps passé

Cela ne revient pas,

J'étais alors frais et joyeux, qui l'était plus que moi ?

J’étais frétillant, j’étais plein de gaité:

Maintenant je suis usé de douleur,

loin de ta vue et loin de ton cœur;

Seigneur, pour combien de temps ? ' -

-Je te regarde comme tu es,

-J'accepterai ton cœur défaillant, sois fort.

« Reste tranquille », « sois fort » aujourd'hui ; mais, Seigneur, demain,

Quand sera-t-il de demain, Seigneur ?

Y aura-t-il un repos du tourment, une trêve de chagrin,

De la vie renaissante, de la verdure pleine de vie,

quand maintenant, il n’y a qu’une tombe stérile pour moi,

Y aura-t-il autant de la joie pour tout le chagrin? –

-Ne suis-je pas mort pour toi ?

Est-ce que je ne vis pas pour toi ? Laisse-moi le jour de demain.


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Qui a vu le vent ?
Qui a vu le vent ?
Ni moi, ni toi :
Mais quand les feuilles frémissent,
C’est que le vent passe par ici.

Qui a vu le vent ?
Ni moi, ni toi :
Mais lorsque les cimes fléchissent
C’est que le vent passe par là.

(Sing Song : A Nursery-Rhyme Book, 1872.)

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Quand nous nous retournons
Quand nous nous retournons sur le sentier de la vie,
Nous voyons les lueurs et le vert subsister sous nos pas ;
La distance estompe et fond tout à présent ;
Quand nous nous retournons.

Rose, violet et gris argenté,
Ce nuage est-il bien celui que nous trouvions si noir ?
Le soir harmonise tout à présent,
Quand nous nous retournons.

Fous ces pieds si enclins à s’arrêter ou à se perdre,
Fou ce cœur si agité dans ses tourments !
Nous soupirions hier, mais plus à présent,
Quand nous nous retournons.

(Verses, 1893)

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Gravir le chemin
Le chemin monte-t-il tout le temps en lacets ?
Il monte jusqu’au bout, ami.
Le trajet prendra-t-il toute la longue journée ?
Oui, du matin jusqu’à la nuit.

Mais est-il pour la nuit un lieu de repos ?
Un toit pour els heures lentes et sombres.
Les ténèbres ne vont-elles pas me le dérober ?
Tu ne peux pas manquer cette auberge.

Rencontrerai-je d’autres voyageurs, la nuit ?
Ceux qui sont partis avant moi.
Devrai-je frapper ou appeler, le seuil en vue ?
A cette porte, tu n’attendras point.

Trouverai-je réconfort, recrue et meurtrie ?
Tu trouveras le somme de la peine.
Y aura-t-il des lits pour moi et pour tous ceux qui cherchent ?
Oui, des lits pour tous ceux qui viennent.

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La vie passe
La vie passe dit le monde, la vie passe :
Chances, beauté, jeunesse, chaque jour sont minées :
Ta vie jamais ne se poursuit immobile.
L’œil s’obscurcit-il, les cheveux noirs grisonnent-ils
De n’avoir gagné ni myrte ni laurier ?
Je me vêtirai au printemps et fleurirai en mai :
Toi, flétrie au cœur, ne relèveras point ta ruine
Sur mon sein à jamais.
J’ai répondu : C’est vrai.

La vie passe, dit mon âme, la vie passe.
Lourde de crainte et d’espoir, de jeu et de peine ;
Écoute ce qu’en témoin affirme le passé :
Rouille en ton or, une mite ronge tes atours,
Un chancre ton bourgeon, ta feuille doit périr.
A minuit, au chant du coq, au matin un certain jour,
Voici, le fiancé viendra et viendra sans retard :
Toi donc, guette et prie.
J’ai répondu : Oui.

La vie passe, dit mon Dieu, la vie passe :
L’hiver passe après la longue attente :
Raisins neufs sur le cep, figues neuves sur le tendre rameau,
La tourterelle appelle la tourterelle au mai du Paradis.
Je tarde, mais attends-Moi, crois en Moi, guette et prie.
Lève-toi, viens, la nuit a pris fin et vois, il fait jour,
Je te dirai : Mon amour, Ma sœur, Mon Épouse.
J’ai répondu : Oui, pour toujours.

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Souviens-toi
Souviens-toi de moi quand je serai partie
Partie bien loin au pays du silence ;
Quand tu ne pourras plus me tenir la main,
Ni moi choisir de partir ou rester.

Souviens-toi de moi quand tu ne me parleras plus
Jour après jour de tes projets pour notre avenir :
Souviens-toi simplement de moi ; tu comprends
Qu’il sera alors tard pour les conseils ou les prières.

Pourtant, si tu devais m’oublier un temps,
Puis te souvenir, ne sois pas triste :
Car si dans l’obscurité et la décomposition subsiste
Un vestige des idées qui furent les miennes,

Mieux vaut que tu oublies en souriant
Plutôt que de te souvenir en pleurant.



Echo
Viens à moi dans le silence de la nuit ;
Viens dans le silence éloquent d’un rêve ;
Viens, les joues rondes et douces, les yeux étincelants
Comme un ruisseau ensoleillé ;
Reviens en pleurs,
O souvenir, espoir, amour d’années révolues.

O rêve si doux, trop doux, trop doux-amer,
Dont le réveil aurait dû se produire au Paradis
Où des âmes comblées d’amour vivent et se rencontrent,
Où des yeux assoiffés de désir
Observent la porte qui, doucement,
Laisse entrer pour ne plus laisser sortir.

Pourtant, reviens-moi en rêve, que je revive
Ma vie bien que mortellement transie :
Reviens-moi en rêve, que je rende
Pulsation pour pulsation, souffle pour souffle :
Baisse la voix, penche-toi bien,
Comme il y a longtemps, mon amour, bien longtemps.

(Goblin Market and Other Poems, 1862.)



Quelque part ou ailleurs
Quelque part ou ailleurs doit se trouver
Le visage invisible, la voix inaudible,
Le cœur qui n’a pas encore – jamais – hélas !
Répondu à mon appel.

Quelque part ou ailleurs, ici ou là ;
Au-delà des terres et des mers, bien caché ;
Au-delà des errances de la lune, au-delà de l’étoile
Qui chaque nuit la suit.

Quelque part ou ailleurs, là ou ici ;
Dissimulé derrière un simple mur, une simple haie ;
Dissimulé sous les dernières feuilles d’une année qui s’achève
Tombées sur une herbe verdie.

(The Prince’s Progress and Other Poems, 1866.)

[SANS TITRE]

Un rondeau semble convenir à la ronde des jours
Qu’ils soient les jours d’un honnête homme ou d’un escroc :
Permets-moi alors d’édifier à ta louange
Un rondeau.

[Cette fleur d’esprit s’avère être une mauvaise herbe comme le séneçon :
Mais daigne la recevoir, comme les plus nobles baies
Poussant sur le rivage de Girvan, de la lame la moisson.]

Accepte l’amour qui sous-tend ces lais ;
Pardonne les rimes barbares qui sonneront faux
Mais construisent, à la surprise de tous les Poètes,
Un rondeau.



(Published posthumously : The Complete Poems of Christina Rossetti, Rebecca W. Crump (ed.), vol. 3, p.871)


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La rose

Le lys repose sur une douce tige
Qui jamais ne blessera ta main
Mais la rose, de ses ronces,
Émerge et règne sur le monde

 

Il y a de la suavité dans un pommier
Du bienfait dans le blé
Mais la reine de toutes les beautés
Est la rose sur ses épines

 

Quand, dans la mousse et le miel
Elle tend sa tige
Et déploie ses pétales lumineuses
Elle embrase le monde.

 

Une clé d’interprétation de ce texte peut se faire grâce à cet autre poème de Christina Rossetti, publié dans Bartlett’s Familiar Quotations, 10e édition en 1919. On y retrouve les mêmes analogies au niveau des fleurs : le lys représente la foi, la rose et ses épines, l’amour.

 

L’espoir, comme la campanule, tremble dès sa naissance
L’amour est comme la rose, la joie du monde,
La foi, comme le lys, blanc et élancé
L’amour est comme une rose, pur délice.
Campanules et lys ne piquent ni ne blessent
Mais la rose, malgré ses épines, les surpasse tous deux.











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