Le parcours du docteur Alexandre Yersin (1863-1943) s’explique largement par son protestantisme. A commencer par ses origines huguenotes : les ancêtres maternels de Yersin étaient, en effet, des protestants du Midi réfugiés en Suisse à l’époque des dragonnades. Sa mère a également veillé à donner à ses enfants une éducation protestante, le frère ainé d’Alexandre devenant pasteur de l’Eglise évangélique libre de Suisse romande.
Alors qu’il n’a que 23 ans, Yersin découvre la toxine de la diphtérie et devient vite un chercheur reconnu. En 1902, Yersin crée l’Ecole de médecine de Hanoï. Pasteur, Roux et Calmette font alors appel à Yersin pour aller à Hong Kong où sévit la peste, semant la panique dans tous les ports de commerce. Yersin prélève des bubons et découvre que les vecteurs de contamination sont les poux et les mouches, comme le pigeon qu’il qualifie de « rat du ciel » ! Le 20 juin 1894, il isole à Hong Kong le bacille de la peste (le « yersina pestis« ) qui devient donc inoculable en vaccin.
Parcourant la planète pour étudier les fièvres, il rapporte l’hévéa, l’arbre à caoutchouc, qu’il acclimate en Indochine, et en 1904, il vend sa première récolte de latex à Michelin. L’hévéa, et la culture de la quinine, financent ses recherches sur le tétanos, le charbon, la fièvre aphteuse et la piroplasmose. Il met au point une mixture à base de coca avec laquelle il requinque les malades. S’il avait pensé à la faire breveter, il aurait fait fortune, car elle a donné naissance à une boisson bien connue !
Source : Patrick Deville, Peste et Choléra, Seuil, 2012