Pour bien comprendre ce commandement, il nous faut revenir à son fondement biblique dans les chapitres 1 et 2 du livre de la Genèse, où il nous est parlé de la création de l’homme et de la femme.
Genèse 1.27 déclare : « Dieu créa l’homme à son image... il le créa mâle et femelle(1) ». En Genèse 2.18, il est écrit : « L’Éternel dit : “ Il n’est pas bon que l’homme soit seul. Je lui ferai une aide qui soit son vis-à-vis. ”[...] 23 L’homme dit : “ Voici cette fois celle qui est faite des mêmes os et de la même chair que moi. On l’appellera femme parce qu’elle a été tirée de l’homme. C’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère et s’attachera à sa femme, et ils ne feront qu’un ”. »
Dans ces deux chapitres, l’union du couple humain nous est montrée non comme une simple réunion de l’homme et de la femme, mais comme une unité profonde. L’homme n’est vraiment une bonne créature, complète, à la gloire et à la ressemblance de Dieu, que lorsqu’il a trouvé un conjoint auquel il s’unit. Jésus lui- même dira : « Ils ne sont plus deux, mais qu’un. »
Comment cette unité se produit-elle ?
Un être unique
Le texte biblique précise que Dieu a d’abord créé un homme. Qu’était cet homme au point de vue sexuel ? Était-ce l’être mâle par opposition à l’être femelle qui n’existait pas encore ? Personnellement, je ne le pense pas. Je crois, avec quelques exégètes, certes minoritaires, que l’homme tiré par Dieu de la poussière de la terre était un être complet qui n’était ni mâle, ni femelle, mais possédait en lui-même la totalité des attributs masculins et féminins. Ce premier homme, créature unique, possédait donc, concentrée en lui-même, la plénitude de la réalité humaine(2).
Or Dieu constate que cet homme qui a tout en lui- même est, en définitive, un être trop complet, trop complet, trop parfait pour être vraiment heureux. En effet, quand on possède absolument tout, on n’a plus rien à désirer. Quand tout est en soi, on est seul, on n’a rien à choisir, on n’a rien à aimer.
La plénitude concentrée dans le premier homme, au lieu de l’enrichir, l’isole donc et le replie sur lui-même. Malgré tous les dons merveilleux que le Créateur s’est plu à lui faire, il ne peut être ainsi vraiment à la ressemblance et à l’image de Dieu. Non, un tel être ne ressemble pas au Seigneur qui ne se complaît jamais en lui-même et ne se replie pas sur sa perfection. Dieu est amour, il a choisi d’aimer et de donner : l’œuvre de sa création en est la preuve.
Il faut donc qu’à son tour l’homme puisse choisir, aimer et se donner pour ressembler à son Créateur. Voilà la raison pour laquelle Dieu dit : « Il n’est pas bon que l’homme soit seul, je lui ferai une aide semblable à lui. »
Différenciation
Dieu intervient alors pendant le sommeil de l’homme pour amener à l’existence un nouvel être. Comment opère-t-il pour accomplir ce dessein ? En quelque sorte, il opère un dédoublement ; il coupe l’homme en deux et le sépare en deux êtres distincts : d’un côté le mari, de l’autre, la femme.
Oui, Dieu disjoint cette plénitude de l’être unique : il différencie les sexes, sexe mâle et sexe femelle. Il rassemble en l’une des moitiés toutes les réalités masculines et en l’autre toutes les caractéristiques féminines. Dieu, avec le bistouri de sa Parole, fait une opération chirurgicale.
L’épître aux Hébreux nous rappelle en effet quel bistouri est la Parole de Dieu. Elle est « vivante et efficace, plus tranchante que toute épée à deux tranchants, pénétrante jusqu’à séparer âme et esprit, jointures et moelles ».
Il me semble voir ici, lors de la création de la femme, non pas seulement l’extraction d’une des côtes de l’homme, mais ce partage des sexes, cette séparation d’âme et d’esprit, de jointures et de moelles que la Parole vivante et efficace opère de façon si merveilleuse. Quand Adam sort de son sommeil, il n’est plus cet être complet qui n’aspirait à rien parce que tout était en lui ; il ressent maintenant qu’il est un être mâle, un homme. Puis, à cause du vide qui s’est formé en lui, il ressent aussi qu’un être féminin, inconnu encore, existe en dehors de lui. Il lui faudra désormais chercher jusqu’à ce qu’il la trouve cette créature sortie de lui et qui lui ressemble. Oui, quand Adam se réveille, son cœur bondit d’espérance.
Et, tout à coup, Dieu lui amène celle qu’il attend.
« Voici cette fois, s’écrie-t-il, celle qui est os de mes os et chair de ma chair ». Sans hésitation, il la reconnaît comme un autre lui-même, il la choisit, il l’aime. Ces deux créatures, que Dieu a dissociées pour mieux les unir se retrouvent l’une en face de l’autre, comme deux parties d’un tout, comme deux moitiés d’une unité. Elles sont deux êtres complémentaires qui n’aspirent désormais qu’à s’attacher l’un à l’autre et qui, en s’unissant totalement, vont retrouver ensemble la plénitude de l’être à laquelle Dieu les a destinés.
C’est là que nous comprenons mieux la parole du Seigneur : « Ils ne sont plus deux, mais un. Que l’homme donc ne sépare pas ce que Dieu a uni. » Ainsi, la formation de la femme, c’est l’acte dernier et, en un sens, le plus élevé de toute la création. Dieu a séparé la femme et l’homme pour mieux les unir, pour leur apprendre à se choisir et à s’aimer.
Union
Nous pouvons tirer de tout cela une loi spirituelle générale que le Saint-Esprit nous enseigne : les séparations que Dieu opère n’ont pour but que de mieux unir encore. Cela est vrai de l’homme et de la femme, cela est vrai de Dieu et de ses créatures.
Si Dieu a placé devant lui les hommes, s’il les a, en quelque sorte, tirés et séparés de lui, ce n’est pas pour avoir à ses pieds des êtres inférieurs à courber et à humilier sous sa puissance, mais c’est pour pouvoir les aimer et les bénir. Quand il a créé les hommes, le Seigneur n’a eu pour but que de s’unir à des créatures selon son image.
Voilà pourquoi deux besoins identiques, d’un caractère et d’une force uniques, existent dans le cœur de l’homme dès avant la chute provoquée par son péché. Ils subsistent toujours en lui malgré sa dégradation :
1) D’abord le besoin de Dieu. Comme on l’a dit, il est un abîme dans le cœur de l’homme que seule la présence de Dieu peut remplir. Oui, il y a en nous cette immense soif de celui qui nous a créés, de ce Dieu que nous désirons connaître.
2) Ensuite, le besoin d’un vrai partenaire. Homme ou femme, nous éprouvons en effet le besoin d’une aide à nos côtés, le besoin d’un autre nous-même, de cet être de l’autre sexe qui nous est complémentaire et auquel nous nous unissons pour n’être plus deux, mais un.
Ainsi le Seigneur demande aux hommes de se tenir en sa présence pour n’avoir pas d’autre Dieu que lui, et d’être en face de leur femme pour n’avoir d’autre épouse qu’elle seule.
Un avec Dieu, Un avec notre femme… Telle est notre vocation, car il ne peut y avoir pour le chrétien qu’un unique Dieu et qu’une unique femme.
L’adultère
Qu’est-ce donc que l’adultère ?
C’est, sur ce double plan, le fait de sortir de cette unité dont nous venons de parler. Adam avait accepté Dieu, il avait choisi Ève. Dans les deux cas, il avait fait un choix unique, il s’était engagé à choisir toujours Dieu comme son Dieu et à choisir toujours Ève comme sa femme.
La chute d’Adam et d’Ève, le fait qu’ils aient accepté de rompre leur communion avec Dieu pour écouter la voix d’un faux dieu, a été le premier adultère. Cette faute est d’ordre spirituel. C’est l’infidélité au Dieu créateur. Adam et Ève, qui ont rompu l’unité, n’ont plus un seul Dieu ; ils en ont deux : Dieu et le serpent.
L’adultère est donc entré dans le monde, non par une faute du corps, mais par une faute...