3 novembre 753. Le symbole des apôtres
Le Symbole des Apôtres est appelé le Credo (je crois). Deux confessions de foi différentes peuvent revendiquer cette appellation. Ce ne sont d’ailleurs pas deux Fois différentes mais deux expressions différentes de la même Foi :
-Il y a tout d’abord le symbole de Nicée-Constantinople (325 et 381). C’est un texte important qui résume la réponse des deux premiers conciles aux grands défis des premiers siècles. Il fallait en effet formuler la foi en particulier au sujet du Christ (« Vrai Dieu né du vrai Dieu, Engendré non pas créé, Consubstantiel au Père ») et de l’Esprit saint (« Il reçoit même adoration et même gloire »).
- Il y a ensuite un texte plus ancien encore, très proche de la génération apostolique : on l’appelle le Symbole des Apôtres.
Son histoire
Le texte que nous connaissons du Credo des Apôtres, tel que nous le connaissons, est inclut par Pirmin dans ses « Dicta Abbatis Pirminii », le manuel qu'il utilisait pour former des moines ou de jeunes chrétiens. La dernière abbaye qu'il fonda fut Hornbach au confluent de deux rivières. Selon la tradition, Pirmin mourut à Hornbach le 3 novembre 753.
Pirmin rapporte que selon la tradition, la Confession de foi des Apôtres aurait été composée par les douze apôtres, chacun en formulant un des articles.
Pierre aurait commencé en disant : « Je crois en Dieu le Père tout puissant », puis Jean aurait continué par « créateur du ciel et de la terre », jusqu’à Thomas qui aurait affirmé que « le troisième jour il est ressuscité des morts ». Le dernier venu, Mathias, celui qui avait été élu à la place de Judas, se serait contenté de conclure en disant « Amen ».
Le texte de Pirmin, inclut la proposition « il est descendu au séjour des morts», qui n’est pas attestée dans les toutes premières versions du Symbole des apôtres. Le credo latin de Pirmin était :
Credo in Deum Patrem omnipotentem, Creatorem caeli et terrae.
Et dans Iesum Christum, Filium Eius unicum, Dominum nostrum,
qui conceptus est de Spiritu Sancto, natus ex Maria Virgine,
passus sub Pontio Pilato, crucifixus, mortuus, et sepultus,
descendit ad inferos, tertia die resurrexit a mortuis,
ascendit ad caelos, sedet ad dexteram Patris omnipotentis,
inde venturus est iudicare vivos et mortuos.
Credo in Spiritum Sanctum,
sanctam Ecclesiam catholicam, sanctorum communionem,
rémission peccatorum,
carnis resurrectionem,
vitam éternam.
Pourquoi une telle tradition ?
Sans doute pour affirmer que ce texte résume, condense, récapitule en quelques phrases l'essentiel de la prédication des apôtres. Et donc que la foi chrétienne remonte aux apôtres, et que l’Eglise est apostolique dans le sens où ce qu’elle enseigne correspond à la doctrine des apôtres.
Dans une lettre écrite par Ambroise de Milan en 390, nous rencontrons pour la première fois le nom Symbole des Apôtres. Déjà utilisé dans le langage profane, symbole désigne à l’origine
un étendard. Chaque légion romaine avait le sien. Quand un soldat était perdu dans la mêlée du combat, il savait où retrouver son unité et ne risquait pas de rallier, par erreur, le camp de l’ennemi. C’est un signe d’appartenance, un point de rencontre. Si une confession de foi est appelée symbole, c’est donc pour signifier que les chrétiens reconnaissent en elle une expression légitime de leurs convictions fondamentales.
L’origine du Symbole des Apôtres remonte cependant encore plus loin. Peu après l’an 200, Hippolyte de Rome rédigea un manuel appelé La tradition apostolique. Dans le chapitre sur le baptême, Hippolyte reproduit sous forme de questions posées au candidat au baptême une confession de foi qui, dans ses grandes lignes, est la même que la nôtre. Il n’en diffère que par quelques additions ultérieures ou notes explicatives. Jugez-en vous-mêmes : en voici le texte :
« Je crois en Dieu, le Père tout-puissant.
Et en Jésus-Christ, son Fils unique, notre Seigneur. Qui est né du Saint-Esprit, de la Vierge Marie, a été crucifié sous Ponce Pilate et a été enseveli. Le troisième jour, il est ressuscité des morts. Il est monté au ciel ; il est assis à la droite du Père, d’où il viendra pour juger les vivants et les morts.
Et au Saint-Esprit, la sainte Eglise, la rémission des péchés, la résurrection de la chair. »…
Au deuxième siècle Irénée de Lyon dans son livre « Contre les hérétiques » proclamera que les apôtres sont les auteurs de ce vieux symbole romain.
Quoiqu’il en soit le Symbole des apôtres tel que nous l’avons aujourd’hui, dérive en droite ligne de textes analogues en usage dès le début de l’ère chrétienne. Il remonte incontestablement jusqu’à l’époque apostolique sans être pour cela de la plume même des apôtres.
On en trouve des linéaments dans le Nouveau Testament, par exemple quand Paul rappelle l’Evangile qu’il a annoncé :
« Le Christ est mort pour nos péchés,
conformément aux Ecritures,
il a été mis au tombeau,
il ressuscité le troisième jour
comme l’avaient annoncé les Ecritures.
Il est apparu à Pierre, puis aux douze».
(Lettre aux Corinthiens 15. 3-4 Bible du Semeur)
Paul ajoute plus loin que ce contenu de la prédication est commun à tous les apôtres : « Que ce soient eux, que ce soit moi, voilà ce que nous prêchons et ce que vous avez cru ».
Sa nécessité
Très tôt, la nécessité de formuler une confession de foi s’est imposée pour diverses raisons.
Dans l’Eglise ancienne, la confession de la foi faisait partie de tout culte. L’assemblée récitait l’un des symboles résumant l’essentiel de la foi chrétienne (symbole des apôtres, symbole de, Nicée), affirmant ainsi ce que chacun croyait, devant les visiteurs païens occasionnels. Cette récitation était aussi un témoignage d’unité. C’était une façon de dire : « Quelles que puissent être nos divergences sur des points de détails, voilà ce sur quoi nous sommes d’accord ».
Loin d’être un exercice théologique, la confession de la foi exprimait également l’adoration des chrétiens. La lettre aux Hébreux (1.3) nous donne une idée d’une hymne ancienne dans laquelle l’Eglise chante sa foi et adore le Christ.
« Ce fils est le rayonnement de la gloire divine
et l’expression parfaite de ce qu’est Dieu.
Il soutient toutes choses
Par sa parole
Revêtue de puissance
et, après avoir accompli
La purification des fautes
Il siège dans le cieux
A la droite du Dieu suprême ».
(Lettre aux Hébreux 1.3 Bible du Semeur)
Dans ce texte l’Eglise proclame et adore un Christ qui existait déjà dans la gloire de son Père avant les temps et qui fut l’Agent actif lors de la création. Un Christ qui est devenu homme et a accompli la rédemption du monde par ses souffrances et par sa mort. Un Christ glorifié qui a été intronisé comme Seigneur de l’univers et de toutes les sphères cosmiques.
Il y a ici la triomphante assurance que le Christ est vainqueur de tous les ennemis de l’homme et que c’est à juste titre qu’on l’adore comme l’image du Dieu suprême.
Le baptême était également une occasion particulière de confesser sa foi dans le Christ. rédempteur et Seigneur. Le baptême devait être précédé par l’instruction du nouveau chrétien. Il fallait lui donner ensuite l’occasion de proclamer sa foi en termes clairs et simples. Le livre des Actes nous fournit une excellente illustration de ce principe. Il s’agit de l’histoire du baptême de l’eunuque éthiopien. Ce ministre de Candace déclara : voici de l’eau, qu’est-ce qui empêche que je sois baptisé ? Philippe dit : si tu crois de tout ton cœur, cela est possible. Il répondit : Je crois que Jésus-Christ est le Fils de Dieu (Actes 8. 36-38). Il est vrai que ces derniers mots manquent dans les manuscrits anciens. Il y a beaucoup de chances pour qu’il soit un additif dû à un copiste du deuxième siècle. Mais cela les rend encore plus précieux : car cela veut dire que bien après l’époque apostolique, on estimait que tout baptême devait être précédé d’une confession personnelle de la foi.
Un symbole de foi s’avérait utile pour témoigner du Christ et pour affirmer la foi en temps de persécution.
Finalement c’était une arme indispensable dans le combat contre les erreurs et les hérésies.
Ainsi dire « Je crois en Dieu le Père tout-puissant, Créateur du ciel et de la terre », n’était-ce pas prendre position contre le polythéisme ?
Et affirmer que le fils de Dieu est bien devenu homme, « qu’il a souffert sous Ponce Pilate, qu’il a été crucifié, qu’il est mort », n’était-ce pas s’opposer à ceux qui n’accordaient aucune réalité à la personne humaine de Jésus-Christ ?
Sa dimension œcuménique
Même si l’Eglise orthodoxe utilise exclusivement dans son culte le Symbole de Nicée-Constantinople, en revanche, le symbole des apôtres a été à partir des années 1970 de plus en plus utilisé dans la liturgie catholique, avec le Symbole de Nicée-Constantinople. Ce qui souligne son caractère oecuménique.
On peut également rappeler que la Déclaration de foi de l’Eglise réformée de France (1938), affirme son attachement à ces deux confessions de foi classiques.
La Fédération baptiste de son côté affirme de son côté dans sa Confession de Foi (révisée en 1989) : « Depuis sa rédaction… un texte de confession de foi a rassemblé l’ensemble des chrétiens. Avec eux, nous disons : Je crois en Dieu… »
Quand les chrétiens récitent ce texte aujourd’hui, ils se placent dans une continuité historique qui les relie avec leurs origines chrétiennes les plus anciennes. Ils manifestent leur solidarité avec ce qui, dès le début, a été la colonne vertébrale de la foi de l’Eglise. Au delà des particularités confessionnelles ils se reconnaissent comme membres de la grande famille chrétienne.
Il ne faut pas oublier non plus que dans la grande tradition de l’Eglise universelle, la confession de foi est placée à la suite des lectures bibliques et de la prédication. Elle est une réponse collective à ce qui a été dit juste avant.
C’est bien cela que la nouvelle liturgie de l’Eglise réformée de France (1996) exprime en disant : « Eclairés et rassemblés par la Parole de Dieu, nous affirmons notre foi ».
Le missel romain, dans sa forme actuelle (2002) prévoit ceci : « Après la proclamation de l’Evangile et l’homélie, il y a un temps de silence. Puis les dimanches et solennités, tous se lèvent pour dire la profession de Foi » (le Missel ajoute d’ailleurs qu’on peut utiliser soit le Credo de Nicée-Constantinople soit le Symbole des Apôtres).
Son actualité
On entend quelque fois dire que ces confessions de foi ne parlent plus à notre temps. Il faudrait les traduire dans un langage moderne. Mais le souci d’actualisation ne doit pas se faire au mépris des anciens symboles qui ont traversé les siècles et qui se sont montrés inusables. Certains mots nécessitent sans doute une explication. En effet ils utilisent des expressions comme rémission des péchés, communion des saints, résurrection de la chair dont nous ne sommes pas sûrs de comprendre tout ce qu’elles disent. Mais dans leur ensemble, ces textes ne sont pas plus difficiles à comprendre que le Notre Père ou certains passages de la Bible. Avec un peu de curiosité et de bonne volonté, la tâche n’est pas insurmontable.
Aujourd’hui encore le Symbole des Apôtres se dresse au-dessus des opinions changeantes des hommes, des modes intellectuelles ou théologiques. Il rappelle avec force que la foi chrétienne n’est pas n’importe quoi. Elle a un contenu clairement balisé. On peut donc connaître ce qui est l’essentiel de la Foi chrétienne et à partir de là rencontrer le Christ et découvrir toute sa parole.
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La traduction française du Credo des Apôtres se lit comme suit :
Je crois en Dieu, le Père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre.
Je crois en Jésus-Christ, son Fils unique, notre Seigneur, qui a été conçu du Saint-Esprit, et qui est né de la Vierge Marie. Il a souffert sous Ponce Pilate, il a été crucifié, il est mort et il a été enseveli. Il est descendu au séjour des morts. Le troisième jour il est ressuscité des morts, il est monté aux cieux. Il siège à la droite de Dieu, le Père tout-puissant, et il viendra de là juger les vivants et les morts.
Je crois en l’Esprit Saint; je crois en la sainte Église universelle, la communion des saints, la rémission des péchés, la résurrection de la chair et la vie éternelle. Amen.
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